CHAPITRE 1 : Livrée à moi-même.

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23 novembre 2013

[00h39]

5 heures.

Cela fait maintenant 5 heures que je marche et erre sur les grands boulevards froids de Minneapolis.

Je me suis établie une première règle de survie : toujours rester là où la foule est à portée de vue et éviter les ruelles sombres.

Cela me semble la chose la plus logique à faire. D'ailleurs, établir des règles me semble important. Après tout, je suis maintenant livrée à moi-même.

Les néons des magasins et des bars aveuglants ainsi que les quelques lampadaires situés sur le bord de la route sont mes seules sources de lumières. Je me fais bousculée un nombre incalculable de fois par des passants pressés, sûrement de rentrer chez eux pour retrouver leur chère et tendre famille. Quelle bande d'imbéciles. La mienne n'a jamais pris soins de moi, au contraire. Elle m'a toujours rabaissée plus bas que terre, toujours traitée comme une moins que rien. Malgré que ma scolarité n'ai pas toujours été parfaite, je n'étais pas un cas désespéré. Jusqu'à l'âge de 9 ans, mes notes étaient en constante chute libre. Je n'avais aucun intérêt pour l'école, et en classe je m'ennuyais pendant chaque seconde qui défilait. Ils ont fini par m'envoyer chez un psychologue soi-disant réputé pour ses méthodes d'augmentation du quotient intellectuel. Un bel amat de conneries. Pendant ma première séance, il m'a fait passé un test de Q.I, résultats : un quotient intellectuel égal à 172. Mes parents n'ont rien voulu entendre et se sont empressé de m'emmener voir un autre psychologue, beaucoup plus qualifié, afin de prouver que c'était impossible que leur idiote de fille possède un Q.I sûrement plus élevé que le leur. Même verdict. Ils ont fini par accepter que j'étais dotée d'une intelligence supérieure a la norme. Je fus déscolarisée, puis j'ai commencé à prendre des cours par correspondance, adaptés à ma situation. Mes notes se sont nettement améliorée, et j'ai eu mon brevet un an à l'avance. Mais malgré tout cela, aux yeux de mes parents, je n'étais pas à la hauteur. Ils me battaient, m'insultaient à longueur de journée, et les reproches fusaient. J'ai fugué. Ils devaient s'y attendre. Et j'ai choisi la date parfaite : le jour de mon anniversaire, mes 14 ans. Au moins, ils remarqueront que je ne suis plus là. Peut-être qu'ils vont s'inquiéter, ou peut-être pas. Au fond, je m'en fiche un peu. Mon but premier n'est que de m'éloigner le plus possible d'eux.

Mon ventre se met à se manifester. J'ai faim, vraiment très faim. Je savais que j'aurai du manger avant de partir. Mais je n'ai eu assez de temps que pour embarquer quelques affaires et 2 barres de céréales que j'ai vite englouti.

Je devrais établir une deuxième règle : ne manger la nourriture que lorsque la faim se fait VRAIMENT sentir.

Les délicieuses odeurs des différents restaurants du grand boulevard caressent délicatement mes narines. Je glisse ma main au fond de la poche droite de mon jeans pour essayer d'atteindre le fond. 12 dollars, c'est tout ce que j'ai. Je ne risque pas de survivre bien longtemps avec si peu. Je repère un distributeur de divers paquets de gâteaux et de bonbons sur le trottoir d'en face. Je traverse la route en trottinant et en faisant attention à la circulation, très abondante au passage, puis une fois de l'autre côté, je me faufile à travers la foule et me poste face au distributeur. Il y a tellement de choix ! Je me décide finalement après 5 bonnes minutes de réflexion, et opte pour un paquet de biscuits aux chocolats à 2 dollars 35. Je compte ce qu'il me reste d'argent...9 dollars 65.

D'ailleurs, voici l'apparition de la troisième règle : toujours recompter l'argent et ne pas le dépenser inutilement.

Je fourre la monnaie restante dans ma poche et enlève mon sac de mon dos pour y mettre le paquet. J'en profite pour faire l'inventaire de ce que j'ai pu emporter : un sweat-shirt bordeaux, un jeans bleu simple, une écharpe, des sous-vêtements, et pour finir, une trousse de toilette remplie du nécessaire. C'est pas trop mal. Mais j'aurais sûrement du prendre plus d'affaires. Je ferme mon sac et le remet sur mon dos.

Il commence vraiment à se faire tard, et moi qui n'est d'habitude pas du tout frileuse, le froid se fait sentir sur ma peau. Je ne me suis pas énormément couverte, je ne porte qu'un pull en laine beige, un jeans slim bleu, ainsi que des bottes montantes marrons et des mitaines. Je frotte mes mains l'une contre l'autre pour les réchauffer, en vain.

Je me demande bien où je vais pouvoir dormir cette nuit.

Après 20 minutes de marche en plus, mes jambes sont épuisée. Un pas de plus et je sens que mes muscles vont complètement se relâcher et laisser mon corps inanimé au sol. J'aperçois un petit hôtel, assez miteux, caché entre un magasin de vêtements et un bar. Je parcours du regard l'enseigne : "Hotel The Traveler". Un peu plus bas est fixée une petite affiche : "seulement 7$ la nuit !". Je pousse un soupire de soulagement, respire un bon coup, puis entre dans l'hôtel. J'ai à peine le temps d'entrouvrir la porte qu'une petite cloche sonne au dessus de ma tête. Heureusement, personne ne me remarque, je n'aime pas que les regards soient portés sur moi. Le bruit de mes pas est couvert par des bavardages incessants provenant du bar. Je m'approche du comptoir à petit pas et dépose mes avant-bras sur le dessus.
"Qu'est-ce que je peux faire pour toi ma p'tite ?"

La personne s'occupant de l'accueil est une femme aux cheveux noirs mi-long et légèrement ondulés. Ses yeux sont d'un gris clair, ils se marient d'ailleurs parfaitement bien avec sont chemisier beige.

"Je...j'aimerais une chambre pour cette nuit."

Elle ne me répond pas et s'éloigne pour attraper le téléphone placé derrière elle. Je n'arrive pas à distinguer ce qu'elle dit, le bruit provenant du bar est bien trop imposant.

"Tu me semble très jeune, que fais tu seule à cette heure ?"

J'ai beau cherché, je ne trouve pas de mensonge assez crédible pour justifier ma situation. Je fais alors comme ci de rien n'était, et baisse le regard tout en pinçant mes lèvres.

"Très bien. Ne t'inquiète pas, je vais te trouver une chambre de libre."

Elle se retourne de nouveau pour examiner une grande planche en bois plaquée au mur et ornée de clefs accrochées à des petits crochets. Elle en décroche une et la glisse vers moi sur le comptoir.

"Chambre 4, monte au premier étage par cet escalier et dirige toi vers la gauche. Ne t'inquiète pas, tu pourra payer demain matin." me dit-elle en souriant.

Je lui rend un sourire poli et m'en vais trouver ma chambre.

Une fois au premier étage, j'enfonce la clef dans la serrure et déverrouille la porte en bois marron, assez vieille au passage.

Je tourne la poignée pour entendre un grincement insupportable, mais à peine ai-je le temps de faire un pas, qu'un bras m'engouffre à l'intérieur de la pièce. Un homme vêtu d'un tee-shirt noir et d'une paire de jeans me tient fermement contre lui par derrière. Ses bras aussi musclés que ceux d'un catcheur américain se resserrent sur moi et au moment où je m'apprête à ouvrir la bouche afin d'appeler de l'aide, l'homme plaque un chiffon humidifié d'un liquide dont l'odeur est insupportable, sur mon visage et recouvre ma bouche et mes narines. J'ai beau me débattre et donner des coups dans tout les sens, je n'arrive pas à m'échapper. Quelques secondes seulement suffisent pour que je sente mon corps devenir de plus en plus faible. Mes paupières se referment d'elles mêmes et je perds connaissance...

Survive The Reality (OFF)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant