De l'autre côté du voile

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Le soleil se couchait au loin alors qu'Emmy prenait un rond point sans ralentir son allure.

-Ce type m'inquiète, tu feras attention à lui quand tu seras chez toi, dit-elle à Élise qui s'accrochait fermement à une poignée.

-Je n'avais pas vraiment l'intention de m'en approcher...

Emmy ne répliqua pas et elles continuèrent leur route en silence. Elle semblait tendue sur son siège et ses mains serraient assez fort le volant pour rendre ses phalanges blanches. Élise associait cette réaction à ce jardinier qui les avait observé de manière si insistante, même si ça l'étonnait de la part de son amie qui était d'un tempérament plutôt tranquille habituellement.

Elles s'arrêtèrent sur la place de parking habituelle. Élise s'apprêtait à sortir quand Emmy la retint par la manche.

-Attends...

Elle semblait mal à l'aise et ne cessait d'agiter sa jambe.

-Je voulais savoir si ça te dérangeait de venir dormir un peu chez moi pendant quelques jours, demanda-t-elle sans regarder son amie.

-Est-ce que tout va bien? demanda Élise inquiète. Tu as eu l'air perturbée toute la journée et là, tu me demandes de passer du temps chez toi alors que tu te le refuse depuis qu'on se connais...

Son interlocutrice se mordit la lèvre en regardant droit devant elle avant de planter ses yeux noisette dans ceux de son amie.

-Tu sais que tu peux tout me dire, insista Élise.

-Je m'en veux un peu de te demander ça en fait... Mais tu sais ça ne se passe pas très bien chez moi et comme si ce n'était pas suffisant, ma stupide sœur va venir passer quelques jours à la maison... Du coup je me suis dit que ce serait peut-être plus facile à supporter si il y avait quelqu'un avec moi. Mais je ne veux pas que tu te sentes obligée de supporter cette situation embarrassante. De plus, je sais que tu as ta propre famille à gérer entre ta sœur qui ne parle plus du tout et ton père qui est effondré...

Un doux sourire s'afficha sur le visage d'Élise qui pris les mains d'Emmy dans les siennes.

-Ne t'inquiètes pas pour moi, ce serait un plaisir de te soutenir. Tu ne veux peut-être pas que je rencontre ta famille mais personnellement ça me rends encore plus curieuse. Et puis tu te rends compte que c'est très égoïste de ta part de ne pas me faire visiter une maison aussi gigantesque, ajouta-telle en riant.

Le visage d'Emmy se détendit brusquement comme si un énorme poids venait de disparaitre de ses épaules et elle afficha son sourire habituel pour la première fois de la journée.

-Merci, souffla-t-elle en prenant Élise dans ses bras.

-Par contre ta mère voudra bien que tu m'invites à dormir chez toi?

-Jamais de la vie, mais ma mère n'est pas un obstacle, répondit-elle en affichant un sourire mutin.

-Dans tous les cas je ne peux pas te dire maintenant si je viendrais car il faut que je vois comment je peux m'arranger avec mon père, histoire qu'il ne me fasse pas une nouvelle crise, mais je te promet de faire tout ce qui est en mon pouvoir.

Les deux amies s'étreignirent une dernière fois et sortirent de la voiture en repartant chacune de leur côté.

Élise rentra dans sa maison et comme souvent, elle retrouva son père dans son fauteuil, ronflant avec force, face à la télé qui parlait toute seule, une bière à moitié vide à la main.

Elle rentra à pas feutrés dans la cuisine et y découvrit Léa qui dessinait silencieusement sur la table.

-Salut toi, tu as mangé? demanda-t-elle à l'enfant qui leva la tête vers sa sœur.