La glace devant laquelle je suis me reflète une image qui ne m'enchante pas du tout. Des bleus, des égratignures, des points de suture, des gonflements... Voici l'état actuel de mon corps. Je me sens tellement comparable à un déchet, une merde. C'est comme si j'étais usée, dépourvue de toute dignité. Et tout ça, c'est de sa faute. C'est lui qui me fait subir tous ces malheurs. On en serait pas là si j'avais pris le temps d'analyser les choses avant de le suivre jusqu'ici, dans ce taudis maudit, perdu au fin fond d'une décharge de dechets en tout genre.
Je regarde toujours mon reflet à travers ce miroir. Dylan est sorti très tôt ce matin – comme à l'accoutumée – après notre nuit d'amour explosive. Je profite donc de son absence pour visualiser ce que je suis devenue en l'espace de trois ans seulement. Mon image est tout simplement désuette, et mes larmes se mettent à dévaler mes joues au fur et à mesure que je m'observe. Je n'ai plus cette clarté qui attirait l'attention de tous les hommes à mon passage. J'ai perdu cette beauté que jalousaient les filles à mon passage. Et puis j'en arrive encore à maudire l'homme que je dis aimer.
Lassée de cette vision déstabilisante et méconnaissable de ma personne, je décide de prendre une douche afin de gommer les traces de ses mains sur mon corps. Je frotte tellement fort que ma peau se met à rougir progressivement, mais j'ai l'impression que ce n'est pas assez, alors je continue d'accentuer la pression sur ma peau de nature pâle. Mes larmes coulent sous l'effet de la douleur que je m'impose mais ma souffrance intérieure est plus grande que celle extérieure.
Lorsque j'estimai être suffisamment « propre », je m'habillai ensuite d'un pull extra large rose et un pantalon noir. J'aimais porter ce genre de vêtements pour cacher les blessures et les bleus sur mon corps. Ça m'évitait d'éveiller la curiosité des gens du quartier qui passaient le clair de leur temps à se mêler des histoires des autres. Et oui ! Malgré ce que cet imbécile pouvait m'infliger, je l'aimais et je le protégeais. J'espérais même secrètement que tout redevienne comme avant.En sortant de la maison, je pris soin de la refermer et me voilà sur la route du boulot. J'exercais en tant que ménagère pour une dame dans les environs et j'y allais trois fois dans la semaine. Je n'y gagnais pas grand chose mais au moins on arrivait à survivre avec ce temps de vaches maigres. Mais avec un mec ivrogne comme celui que je cotoyais, on n'arrivait jamais à finir le mois sans encombre. C'est embêtant mais que voulez-vous que je fasse.
Après une quinzaine de minutes de marche, me voilà devant le grand portail de madame Jill Fayer. C'était une maison spacieuse, gigantesque et magnifique, tout à l'image du propriétaire. Elle vivait seule avec pour seuls employés Greg, le portier que j'affectionne beaucoup. C'est un jeune homme qui avait sûrement la même tranche d'âge que moi. Il était gentil et charmant avec moi; il arrivait souvent qu'il me dépanne avec les sommes d'argent qu'il me donnait.
— Hey hey, fis-je timidement en le voyant fièrement positionné à son poste habituel.
— Hey, coucou Louisa ! me répond-t-il joyeusement.
Il est toujours comme ça avec moi.
— Tu m'a manqué tout le week-end, me confie-t-il par la suite.
— Oh que c'est mignon ! je rigole un moment. Tu avoues enfin que tu m'aimes, ajouté-je pour le taquiner comme à mon habitude.
— Hum, si tu savais, il se renfrogne en baissant les yeux.
— Hey, fais pas cette mine ! Je disais caepour rigoler, Greg.
— Ouais et justement. Enfin, bref.
Je n'eus pas la volonté de rajouter un mot de plus, sentant que je l'avais peut-être vexé par mes mots. En plus de mon état mental actuel, je faisais un effort surhumain pour ne pas pleurer devant lui. Gênée et confuse, je baffouai donc rapidement l'excuse du retard avant de courir presque pour m'engouffrer dans la grande demeure de Mrs. Fayer.
Ma patronne devait être dans l'un de ses innombrables bureaux. En dépit de ma fatigue physique, je me mis au travail essayant de garder une bonne humeur.
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Rédemption
RomanceLouisa subit perpétuellement des violences physiques de Dylan, son compagnon. Elle n'a jamais entrepris de le quitter, se disant que sa situation finira par s'améliorer. Mais elle y sera contrainte quand les choses dégéneront. Sa tante Trisha la rec...