Des monstres en transe font une petite révérence dans la tête de Blaise. Un dragon fait peur à une sorcière dans la brume. Un animal incontrôlable complimente les monstres. Ce n'est ni un rêve, ni une hallucination, ni une œuvre d'art. Des vaisseaux spatiaux se crashent dans des faisceaux de lumière. Blaise pose ses mains sur ton torse, parcourt sa poitrine. C'est l'été. Il crève de chaud. Il crève tout court. Des coups de soleil sur ses bras le carbonisent. Un morceau de David Bowie se joue dans les ténèbres. Les monstres dansent. Autour de lui, il a l'impression de mener une guerre, contre lui, contre son corps, contre la colère, contre l'aigreur d'être soi-même et cette idée qu'on ne peut jamais bouger de soi-même, qu'on n'est jamais qu'un être en devenir qui fait du surplace dans une réalité atrophiée. Le manège tourne. Ses sentiments ont l'air d'avoir trente ans de trop. Blaise est un artiste utopique et cannibale, il représente une sexualité brutale et meurtrière, il ne sait pas aimer une seule personne à la fois, ses organes génitaux le dérangent. Son imagination se perd dans les créatures mythiques à qui il invente des histoires extraordinaires. Blaise est né dans un corps de fille, enfin, c'est ce que dirait les gens. Mais Blaise est un garçon. Au bout de ses doigts blancs se trouvent des tâches noires comme s'il avait trop joué avec les ombres de sa vie et les monstres en transe continuent de danser au cœur de ses longues insomnies. Dans la brume, les cendres et la poussière, Blaise se débat dans un monde sans amour pour lui-même que quelques regards de beaux inconnus qui lui donnent envie de croire à l'impossible. Quand les lumières s'éteignent, reviennent toujours les mêmes pensées. Un ménestrel téléphone à une voyante, vaguement. Au dessus des restes de créatures visqueuses, un prétendant de sa vie se défoule sur son cœur. Il sort avec deux hommes, deux amis qui sont aussi ses amoureux, comme dans la chanson. Pierre est doux, une fleur dans les cerveaux, toujours joyeux, toujours très beaux. Blaise caresse ses cheveux noirs, sa chair le tiraille et la noirceur de sa chambre lui perce ses yeux ambrés. Max fait du yoga, de la méditation, de la philosophie, il est drôle, intelligent et doué, aucun obstacle ne peut l'arrêter. Blaise passe ses mains sur son visage, ses traits trop fins, des yeux fatigués qui ont trop lu de livres dans le noir, ses lunettes sont un peu trop loin, il se mord la lèvre. Pierre a beaucoup d'amis, c'est un soleil vivant qui carbonise tout ce qu'il touche, blond, les yeux gris, une beauté mystique mais qui ne peut faire fuir les monstres qui tourbillonnent dans la tête de Blaise, et c'est bien dommage parce qu'il l'espère trop. Max est calme, silencieux, intellectuel aux mêmes expressions faciales, les cheveux noirs, la peau foncée, les yeux en amande. Un papillon de nuit tourne en rond dans sa chambre à la recherche de lumière. Blaise peut l'entendre. Il a envie d'appeler Pierre pour lui parler des monstres, de la sorcière, du ménestrel et du papillon de nuit. Mais il est trois heures du matin. On ne parle pas de ce genre de choses à trois heures du matin. En fait, on n'en parle même jamais. Parce que ça n'a aucun sens. Blaise hésite à rire mais il a peur de réveiller Max qui dort juste à côté de lui. Il finit par se lever néanmoins. Il erre dans les couloirs qui lui apparaissent sans fin. Ça tourne en spirale dans sa tête. Blaise est un mec trans anxieux, lunatique, adorateur d'horreur et de musiques des années 60, de poésie de lugubre et de sexe hargneux, il n'aime pas les je t'aime, ni les mots d'amour, il aime la bestialité singulière du monde qui se trouve propre dans le cœur de chaque être humain. Il est intrigué par leur noirceur, les choses cachées à l'intérieur, les voix dissimulées derrière les pleurs.
Des monstres en transe font une petite révérence dans la tête de Blaise. Son corps dans le couloir flotte légèrement comme s'il se trouvait dans une autre dimension, qu'il pouvait marcher au plafond. Son cœur en tissu se déchire, rugueux comme du papier de verre, il noie son cerveau dans un verre d'eau avant d'entendre la solitude qui l'enterre. C'est comme ça que l'histoire commence. Blaise qui n'arrive pas à dormir dans le lit de Max. Et c'est ainsi qu'elle se finira sans doute. C'est ce que Blaise espère pour lui-même.
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COMMENT AIMENT LES GARÇONS
TerrorAu coeur d'une apocalypse, un couple de trois garçons, Blaise, Pierre et Max s'interrogent sur le sens de leur vie. Entre survie, lutte, amour et horreur, ils tentent de se débattre dans l'existence tout en protégeant leur amour les uns envers les a...