Chapitre 4 : Rouge au Noir

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Je me lève un peu perdu, je regarde toujours partout autour de moi en essayant de trouver un interrupteur pour y voir plus clair, car même si la lune perce quelques rayons à travers les stores, je prend un risque à chaque pas de rentrer dans un bureau ou de taper le pied du lit. J'allume la lumière grâce à un bouton juste à côté d'une porte, mais je fais demi-tour. Sous mon lit se trouvait une valise, je l'ouvre et j'y vois pas mal de vêtements qui m'appartiennent.

Mais où je suis bordel ? Et pourquoi je suis ici ?

Je m'habille puis je vais ouvrir les stores. Derrière le carreau de la fenêtre, je voyais des tas de grands immeubles difformes organisés bizarrement, j'étais moi même dans l'un de ces immeubles, sûrement à quatre ou cinq étages au dessus du rez-de-chaussée.

Qu'est-ce que je fous à Astera ?

Je sors de la chambre où j'étais et je me retrouve dans un complexe de couloirs, je me perds plusieurs fois, parfois je tombe sur un cul de sac, d'autre fois je faisais un tour complet pour revenir à mon point de départ, mais après vingt bonnes minutes, je tombe sur un ascenseur. Dès qu'il arrive je saute dedans et j'appuie sur le bouton pour me rendre au rez-de-chaussée. J'étais seul dans la cabine, accompagné par une de ces fameuses "musiques d'ascenseur". Quelques secondes plus tard les portes s'ouvrent et je me retrouve dans un grand hall aux couleurs vives. 

A gauche, il y avait deux couloirs qui s'enfonçaient dans le bâtiment, au fond, une demi-douzaine de portes qui donnent sur l'extérieur, et à droite, plusieurs comptoirs. Derrière l'un de ces comptoirs se trouvaient Sélène, la mère de deux amis qui vivent à Astera. Sélène est une mage de terre, elle a de longs cheveux pourpres qu'elle a remonté en un épais chignon ainsi que deux yeux à l'iris dorés qui traduisent ses émotions comme un mot écrit à l'encre noire sur une feuille blanche. Elle est habillée d'un uniforme rouge au col jaune et aux manches courtes, c'est son uniforme d'hôtelière, j'en conclut donc que je suis dans l'hôtel où elle travaille. Je vais la voir, elle saura sûrement pourquoi je me suis retrouvé ici.

-"Bonjour Lucide, bien dormi ? commença-t-elle.

- Bonne question, répondis-je ironique, je sais pas si je pourrai te répondre un jour. Mais sinon, tu sais pourquoi je suis ici ? Et où sont Alkan et ses parents ?

- A l'heure qu'il est ils dorment encore, tu ferais mieux de les laisser dormir, ils n'ont sûrement pas fermé l'œil de la journée, juste pour être sûre, ta chambre c'est la quatre-cent vingt-et-un, Alkan est juste à côté à la quatre-cent vingt et ses parents à la quatre-cent dix-neuf.

- Pourquoi est-ce qu'ils ont pas fermé l'œil, il s'est passé quelque chose pendant la journée ?"

Elle garda le silence quelques secondes en se mordant la lèvre et en détournant le regard. Au même moment, je sens deux petites tapes sur mon épaule. C'était Io, il était avec sa jumelle Ia. Ce sont les enfants de Sélène, âgés de douze ans chacun et tous deux sont des mages d'air. Ils ont tous les deux les cheveux violets et les yeux vairons, Io a l'œil de sa mère à gauche et le bleu de son père à droite tandis qu'Ia a le jaune à droite et le bleu à gauche. Io a les cheveux mi-longs qui passent au dessus d'un bandeau jaune qu'il porte tous les jours, il porte un pull jaune qui tire légèrement sur le orange et un short de la même couleur plus ou moins. Les cheveux d'Ia sont aussi longs que ceux de son frère, mais attachés sur le côté par deux simples barrettes noires, elle a aussi deux longues crolles lisses de chaque côté de son visage. Elle est habillée d'un pull rayé bleu et blanc et d'un jean bleu replié en ourlets.

-"On va t'expliquer, me dit Io, mais avant, ça te dit pas qu'on aille sur le toit ? On aura une meilleure vue là haut, comme c'est la première fois que tu viens à Astera."

Je les suis alors jusque l'ascenseur qui nous emmène directement sur le toit de l'immeuble, après vingt-trois étages. En poussant la porte vers l'extérieur, je pris une grande bouffée d'air qui me donne quelques picotements à la gorge, qui avaient déjà disparus à ma seconde respiration. Astera est vraiment une ville impressionnante comparé à Galeïade. Même si ma ville d'origine dans ce monde est plus vaste, Astera est bien dix fois plus moderne, sûrement plus moderne encore qu'Orlando.

-"Lucide ? me reprit Ia, Je vais t'expliquer ce qu'il s'est passé cette journée, mais sois bien attentif. Regarde là-bas, dit-elle en pointant vers l'est."

Je suis son indication et son doigt du regard, mais en voyant ce qu'elle voulait me montrer, je me fige sur place.

Galeïade était en ruines, je la voyais à travers un drap rose. Il restait bien quelques bâtiments qui tenaient debout, mais même à des kilomètres on voyait que Galeïade était détruite. Il n'en tenait plus à grand chose pour qu'on la raye de la carte.

-"Comment c'est arrivé ? demandé-je.

- Hier soir, reprit Ia, quand tout le monde venait de se lever, Alys est partie pour son pèlerinage, comme elle le fait chaque année la nuit qui suit celle de la messe des étoiles filantes. Quand elle est repassée près du temple, elle s'est faite posséder par la sorcière, grâce à sa magie des ténèbres. Sous l'emprise de la sorcière, elle est rentrée dans le temple, et elle a volé la pierre des dieux et elle s'est métamorphosée : ses cheveux rouges sont devenus noirs et ses yeux, ainsi que ses vêtements et le ruban dans ses cheveux ont tous viré au rouge.

- Et donc elle a récupéré les magies des quatre dieux. deviné-je.

- En plus de la magie des ténèbres que lui a confié la sorcière. ajoute Io. Tu vois lucide ? La bulle rose autour d'Astera, c'est une barrière magique. Rien de ce qui est magique ne peut la traverser, que ça soit dans un sens ou dans l'autre, donc Alys ne peut pas causer plus de dégâts, Astera est en sécurité. Le seul moyen qu'elle ait de passer est qu'elle perde la pierre des dieux et qu'elle se fasse toucher par l'épidémie, car les mages de ténèbres et de lumière touchés par l'épidémie ne sont pas considérés comme magiques. Mais du coup à cause de la barrière, les habitants d'Astera ne peuvent plus aller chercher de nourriture, c'est donc les habitants de Galeïade qui s'en chargent, ils ont tous migré à Astera pendant l'attaque d'Alys. Cette organisation ne me plaît pas mais il n'y a aucun autre moyen... En plus... Tu sors demain, avec Xiantha...

- Il faudra qu'on fasse attention à pas croiser Alys, si je comprends bien.

- Désolée, dit Ia, mais une fois dehors, Alys ne sera pas votre seul problème..."

Elle venait de finir sa phrase que retentit un hurlement frissonnant. Je me retourne brusquement, et derrière la barrière se trouvait un Ornithan. Il était gigantesque, il mesurait bien un dizaine de mètres de long.

- Mais les Ornithan ne sont pas magiques ? repris-je.

- Si ils le sont, me répondit Ia, tu ne le savais pas ? Leurs ailes ont beau être gigantesques, elles ne leur permettent pas de voler, ils utilisent la magie de l'air."

La porte qui mène au toit s'ouvrit de nouveau, c'était Alkan.

-"Sélène m'a dit que je vous trouverai ici.

- Alkan ! Je suis désolé ! J'ai pas pu m'endormir à la fête de Maya !

- T'en fais pas, me répond-t-il, on est hors de danger de toute façon. Allez viens, on va chercher Xiantha. Io, Ia, vous venez avec nous ?"

On repart alors en compagnie d'Alkan et on finit par sortir de l'immeuble pour rejoindre un autre hôtel , celui où Xiantha est hébergée. Pour le rejoindre, on longe la barrière du côté de Galeïade, ça me laisse tout le temps de voir les dégâts causés par Alys. Je pousse un long soupir en fermant les yeux, quand je les rouvre, j'aperçois une silhouette noire et rouge passer très rapidement de l'autre côté de la barrière, c'était sûrement Alys, j'espère qu'on arrivera à la ramener.

En attendant, son prénom avait perdu tout son sens...

Elle s'était éteinte.

LucideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant