chapitre premier

70 6 1
                                    


L'ennui faisait partie intégrante de sa vie.

Tandis que son hamac tanguait doucement, ses yeux s'affolaient. Les lignes, les mots ou encore les pages défilaient à intervalles réguliers. La jeune femme avait emprunté ce livre à la grande bibliothèque de son village. Mais exaspérée, elle referma en claquant le livre. Dans un soupir, elle murmura :

- Encore une faute...

« toute affolée encore, Elisa se jeta sur le premier passant pour fuir le monstre qui la pourchassait.

_ Il est là ! s'écria-t-elle. Juste là !

Elle indiquait vaguement la direction dont elle venait. Les yeux blancs, elle continuait de gesticuler.

_ Pourtant, je suis passée en première ! »

La jeune femme se redressait tout juste qu'une voix s'éleva, provenant de l'intérieur de la maison. Elle roula des yeux avant de se mettre debout :

- Nausica ! C'est l'heure vient !

Facilement, la rousse vénitienne se dirigea vers grande porte-fenêtre. Dame Léa l'appelait de sa vieille voix rauque. A cette pensée, la jeune laissa un sourire en coin se peindre sur son visage. Sa professeur n'était pas si vieille que ça, mais ses cordes vocales paraissaient fatiguées de répéter inlassablement à la rousse de continuer ses exercices. Sa professeure l'attendait, poings sur ses hanches, dans la grande salle qui leur servait de gymnase. Le corps tonique de son enseignante semblait tendu. Interloquée, Nausica s'approcha. Elle portait un chignon brun parsemé de gris qui était tendu au dessus de sa tête. Avant même que son élève puisse ouvrir sa bouche, l'institutrice l'arrêta d'un geste de la main.

- 300 répétitions. Exécution.

Dans un soupir, la jeune femme s'allongea sur le petit tapis de sport. Alors qu'elle s'activait à faire ses abdos quotidiens, elle gardait ses yeux gris rivés sur le plafond. Tous les jours, la routine la tuait à petit feu. Heureusement, les cours étaient bientôt finis. Maths, Littérature, Histoire du Monde et Sport. Toujours dans le même ordre, toujours avec les mêmes professeurs.

Pas d'amis, de vie. 18 ans d'existence, quasiment autant d'ennui. Elle n'avait pas vraiment de souvenirs de son enfance. Tout en répétant l'exercice autant de fois demandé, Nausica laissa échapper un énième soupir. Sa professeure de dos, la réprimanda :

- pas de soupirs !

La rousse, mi- amusée mi-exaspérée, roula les yeux au ciel. L'enseignante pourtant de dos, tapa légèrement du pied.

- Et pas de roulement des yeux !

Ce n'était pas très français, ce qui fit rire l'élève tandis que Dame Léa s'approcha d'elle. Un sourire de compassion étira les lèvres de la femme avant qu'elle ne s'accroupisse à côté de son unique élève. Elle posa une main affectueuse sur son crâne.

- Je sais que ça t'ennuie... mais il le faut hein ?

La rousse, toujours pas convaincue, ne dit rien. Puis se fut au tour de Léa de pousser un soupir.

- Bon, peut-être qu'on peut abandonner la danse classique ou la boxe pour aujourd'hui.... Et que dirais-tu d'une petite virée à la bibliothèque ?

Seul le sourire de la rousse lui répondit.


*_*_*_*


La porte claquait tout juste derrière elle, qu'elle s'enfonçait déjà dans le labyrinthe de livres. Bientôt engloutie par tous ces mots, Dame Léa lui lança :

- Et pas un mot au Père !

Sans lui donner de réponse, elle laissa la voix de son institutrice se perdre en deux lattes de parquet. Il était évident qu'elle ne dirait rien. Pourquoi irait-elle dénoncer son seul moment de pure joie de la journée ?

Alors qu'elle avait enfin trouvé le rayon qui l'intéressait, elle entendit quelques gloussements. Fatiguée, elle jeta un œil lassé sur le groupe de jeune du village derrière elle. Stupides, pensa-t-elle. Ils étaient toujours amusés de la voir, comme si c'était une bête de foire.

Se détournant d'eux, Nausica posait un doigt sur la tranche de livre qui l'intéressait. Elle l'avait remarqué depuis plusieurs temps déjà, mais ne l'avait jamais emprunté. Une histoire policière où les éléments permettaient au fil du récit de comprendre la chute. Le deuxième livre qu'elle saisit fut bien différent. Son professeur de littératures, Maestre Roubai, lui avait demandé de se documenter sur la philosophie du XVIIIème siècle. C'est peu attentive qu'elle se saisit d'un vieux livre aux coins cornés. « Philosophie » était simplement écrit sur la couverture. Les lettres noires semblaient être abîmées par le temps, mais aucun auteur ne figurait sur la première page.

La curiosité de Nausica fut piquée, et elle alla s'installer au bureau le plus proche. Elle passa une main douce sur la couverture, comme si ce livre avait vécu des horreurs et qu'il avait besoin de réconfort. Alors elle se saisit de la première page, puis de la deuxième. Comme cela, elle feuilletait le recueil. Le coin plié de la page 76 retint son attention. C'était comme si quelqu'un avait voulu marquer cette page. Pourtant, rien. Mais quelques extraits après, une des citations était surlignée au fluo jaune.

'' Cachez soigneusement votre supériorité, de crainte de vous faire des ennemis '' d' Arthur Schopenhauer.

Sourcils froncés, la jeune femme revint aux lignes précédentes pour les relire entièrement. Rien de particulier ne lui sauta aux yeux. Alors, elle chassa le reste de ses idées en secouant la tête. La rousse suivit le fil du texte avant de tomber 20 pages plus loin sur un vieil article de journal. Il semblait égaré mais cependant soigneusement disposé entre les deux feuilles. Interloquée, Nausica le prit dans ses mains et se pencha pour le lire.


*_*_*_*


« SCANDALE EN NORVEGE !

Ce 10 janvier dernier, les autorités internationales sont intervenues pour saisir un manoir en Norvège près de Bodo, au centre du pays. En effet, ce manoir avait été décrit comme suspect par les habitants locaux. Ils ne connaissaient ni les propriétaires, ni les habitants. Des témoins relaient des rumeurs terrifiantes à propos de 16 enfants qui y seraient retenus, tous âgés entre 2 et 6 ans. Ils seraient une quinzaine d'adultes à élever les enfants. Il est difficile de savoir dans quel état les jeunes sont, mais nos informations nous pousseraient à croire qu'ils sont dans un état très critique. Nous n'en savons pas plus mais cette affaire est à suivre dans les plus brefs délais. »


_ _ _ _ _

Fin du premier chapitre !

J'espère que vous aimez Altérée, et s'il vous plaît, commentez et votez, ça me ferait vraiment plaisir de connaître votre avis ! Et puis vos hypothèses aussi...

Bonne fin de journée (:

AltéréeWhere stories live. Discover now