3. Interdictions.

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Malgré tout ce qu'il s'était passé, quand ils se rejoignirent au collège, Jasper et Monty se prirent par la main sans aucune hésitation. C'était parce qu'ils s'aimaient bien sûr, mais en même temps pour braver le regard des autres, les scènes de la veille, aller contre leurs parents qui agissaient bizarrement depuis qu'ils savaient.

- Mes parents parlent plus, dit Jasper, j'ai essayé de leur expliquer que t'étais mon amoureux mais ils ont fait comme si je n'avais rien dit.

- Ma mère trouve que c'est mal parce qu'on est deux garçons.

- Pourquoi c'est mal ? Demanda Jasper.

Monty haussa les épaules, parce qu'il n'en savait rien du tout. Jasper fit la moue puis retrouva le sourire :

- Les adultes sont vraiment bizarres, décida-t-il.

Les lèvres de Monty s'étirèrent à leur tour.

- Pédales, cria un gamin en passant à côté d'eux.

Jasper leva les yeux au ciel et Monty se rembrunit. C'était vraiment plus simple quand personne ne savait.

Maya et Harper les évitaient désormais. Jasper se demandait pourquoi Maya ne voulait plus lui parler, quand il l'avait salué, elle lui avait tourné le dos. Harper, de son côté, avait repoussé Monty en criant :

- Ne me touche pas !

Ils se retrouvaient donc seuls entre eux. Ils avaient d'autres amis dans leur classe, mais tous semblaient mal à l'aise désormais. On chuchotait sur leur passage, on ricanait dans leur dos. Il n'y avait que Clarke, une cinquième, qui était venue leur dire des choses positives. Comme quoi ils ne devaient pas écouter les autres, et qu'ils étaient très mignons ensemble. Ils avaient souris.

Jasper et Monty continuaient à se dire que les choses s'amélioreraient au bout d'un moment, que tout rentrerait dans l'ordre. Ils faisaient avec les moqueries, ils continuaient à se taquiner, à jouer ensemble, à discuter. Ils ne changeaient pas, c'était les autres qui avaient changé.

Une de leur prof insista pour qu'ils ne soient plus l'un à côté de l'autre. Elle leur dit que c'était parce qu'ils faisaient trop de bruits quand ils étaient ensemble, mais les deux enfants soupçonnaient autre chose. Le pion les avait à l'œil dans la cour de récré, quand ils étaient trop proches, il intervenait immédiatement, les séparait et les menaçait de tout raconter au directeur s'ils continuaient « leur cinéma ». Un garçon de troisième vint les bousculer, puis les traita de malade :

- Mes parents y disent que c'est dégueulasse de laisser des pédés dans le collège, que vous étiez contagieux et ma mère a dit qu'elle allait parler au directeur pour qu'il fasse ce qu'il fallait. Vous allez être renvoyés bande de tafioles !

Jasper s'approcha de lui et lui toussa dessus :

- Fais gaffe où tu risques d'être malade toi aussi !

L'autre s'était reculé, horrifié, les avait encore insultés puis s'était enfuit. Monty avait rigolé, mais c'était un rire un peu triste. Jasper lui caressa la joue :

- Tu n'es pas du tout malade, dit-il.

- Toi non plus.

Le pion débarqua immédiatement et les sépara brutalement, en les poussant. Monty trébucha et failli se casser la figure. Jasper fusilla le pion des yeux.

- On faisait rien de mal !

- Vous étiez trop proche.

Et au loin, dans la cour, Jasper voyait Finn et Raven dans les bras l'un de l'autre. Il prit la main de Monty et s'éloigna. Se tenir la main, ce n'était pas interdit pour deux garçons. Mais pour combien de temps ?

Trop jeuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant