Chapitre 3

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La traversée se fit sans encombre et cinq jours plus tard Colibry arrivait à Hurlevent en début d'après-midi. La quiétude du temps passé en mer avait permis à l'elfe de réfléchir sur ses choix et leurs conséquences. Elle en était venue, encore et encore, au fait que si c'était à refaire elle le referait.

Elle se rendit directement à l'auberge pour y déposer ses maigres affaires. Le temps était clément ; une douce brise faisait voleter les feuilles mortes et le soleil automnal réchauffait les peaux.
Colibry alla se promener en ville, s'attardant dans les jardins du quartier des druides. Ceux-ci étaient paisibles, contrastant avec l'agitation du centre ville. Assise sur un banc de pierre blanche, la prêtresse songea aux nombreuses années qu'elle avait passée dans cette ville et à toutes celles qu'elle venait de passer sans y revenir.

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flashback
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C'était un matin d'hiver, un long manteau blanc avait recouvert les toits et les rues d'Hurlevent mais aussi toute la nature environnante.
Colibry se tenait à la fenêtre de sa chambre, un feu crépitant dans la cheminée réchauffait la pièce. Cela faisait plusieurs jours que la guilde n'était pas partie en mission et la plupart de ses frères d'arme profitaient de ce répit pour se reposer et reprendre des forces. Certains étaient partis voir leurs êtres chers, d'autres, comme elle, étaient simplement restés dans leur quartier au sein du grand bâtiment servant de quartier général à la guilde. Il n'était pas rare le soir qu'ils se retrouvent à la taverne pour partager leur repas, une chope ou quelques anecdotes sur leur journée. Colibry appréciait ces moments chaleureux, petites bulles de bien-être, douces accalmies avant de nouvelles tempêtes de fureur, de sang et de souffrance.
Depuis plusieurs lunes, elle ne supportait plus les combats qu'ils engageaient contre les forces du mal. Les longs moments où la peur et la rage étaient palpables tandis qu'ils bataillaient, chacun faisant attention à sa vie mais aussi à celle des autres, l'angoisse quand leurs forces commençaient à leur faire défaut, la peine si l'un d'entre eux était grièvement blessé ou pire encore...
Depuis plusieurs lunes, le doute s'immisçait en elle. Le doute et surtout la lassitude. À quoi tout cela servait-il ? car il était indéniable qu'ils ne viendraient jamais à bout du mal. Sans le mal, point de bien... Tout comme le jour et la nuit, l'un ne peut exister sans l'autre.
Chaque fois qu'un représentant du mal avait été défait, un autre était apparu et cela depuis la nuit des temps ; les Dieux très anciens qui veillaient toujours dans l'ombre, l'arrivée de la Légion ardente, Illidan lors de sa folie, Arthas sous l'influence du Roi Liche, Neltharion devenu Aile-de-Mort, et tant d'autres encore qu'elle ne pouvait tous se les rappeler...
Le mal serait toujours présent car cela était dans l'ordre des choses. De fait, à quoi bon continuer de lutter sans cesse ; il n'y aurait aucun répit. Peut-être valait-il mieux laisser le mal cohabiter avec le bien et l'équilibre se ferait de lui-même.

Ce matin-là, Colibry avait pris une décision qui allait changer sa vie, sans se douter qu'elle changerait aussi celle d'êtres chers.
Elle prit son sac, y rangea les quelques affaires qu'elle gardait à la guilde, éteignit le feu dans la cheminée et, après avoir vérifier que tout était en ordre, tourna une dernière fois la clé de la porte de sa chambre.
Elle se rendit dans la salle commune pour déposer sa clé au panneau prévu à cet effet. Puis elle partit à la rencontre de Uisces, chef de la Ligue des Allianceux, sachant celui-ci dans ses appartements.
- Merci pour tout, lui dit-elle simplement en lui tendant la clé de la porte de la salle du conseil, un pincement au creux de sa poitrine.
- Garde la, lui répondit-il en serrant ses mains dans les siennes. Tu seras toujours la bienvenue, si un jour tu souhaites refranchir cette porte.

Elle ne l'avait plus jamais franchie...

Comme je t'ai aimé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant