1. Entretien

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« Je suis ... prête ? Mmh ? Disons ça. »

27 Octobre 2005

Elle haussa un sourcil. Face au miroir de sa chambre, elle se tâtait encore entre cette satanée robe noire, et celle au corsage en dentelle bleu, sans doute ... non, toutes réflexions faites, celle-ci était largement plus sexy que la première. Mais enfin, était-elle réellement en train de faire tout ce cirque pour un entretient d'embauche ? Qu'elle n'aurait sans doute pas ? Comme les trois derniers qu'elle avait passé la semaine précédente en échouant lamentablement face aux virulentes questions posées par ces PDG frimeurs et capricieux ? Cela semblait être la cas, en effet.

Et quel entretient que celui-ci ! Intégrer Stark Industries ! Elle semblait réellement les attirer ces directeurs arrogants et mégalomanes. Celui-là était d'ailleurs une sacrée pointure en la matière, mais elle n'aurait sans doute pas à le rencontrer. Cela faisait déjà 5 mois que l'entreprise cherchait à pourvoir une dizaine de postes en finances. En 5 mois, en temps normal, on aurait eu le temps de remplacer l'ensemble du personnel de l'entreprise, de repeindre entièrement les locaux, de dévaliser IKEA en rachetant des meubles neufs pour les open-spaces, de monter tous les bureaux JKORTML, d'assembler toutes les chaises HROTGARL et de faire une quarantaine de réunions syndicales. Mais en 5 mois, chez Stark Industries, on arrivait à peine à recruter pour une place dans le secteur financier.

Virginia resserra pour la énième fois son chignon, puis soupira, enfila la dites robe noire et la paire de talons raccord, pris son sac à main, ses clés, son CV, oublia sa bouteille d'eau et ses anti-dépresseurs et sortie de chez elle, déterminée, prête à en découdre avec le monde entier.

Le trajet en voiture se déroula sans trop de difficultés. Elle cala en voiture à l'entrée du ville centre et se maudit de ne pas avoir changé de voiture, depuis le temps que cette vieille Toyota grise la suivait partout où elle allait depuis environ une dizaine d'années. Elle repensait sans cesse à Aldrich Killian, se demandant si elle aurait réellement dû quitter son poste, puis se ravisait à chaque fois, toujours plus sure de son choix. Une fois devant la grande tour de la SI, Virginia serra le volant jusqu'à en faire blanchir ses phalanges, puis descendit la pente du garage souterrain, et sortit enfin de Meghan (le nom qu'elle avait donné à sa voiture suite à une merveilleuse soirée arrosée dont elle ne voulait pas parler), après effectué trois fois le tour du parking et s'être fait voler deux places par une Maserati et une Tesla. Que cette journée commençait bien se dit-elle.

Virginia rentra par l'entrée basse, partagea l'ascenseur avec quatre inconnus et arriva enfin dans le grand hall. Haut sous plafond, éclairé par d'immenses néons dont s'échappait une pâle lumière bleue, il grouillait d'employés en vadrouilles, faisant trembler son sol de marbre dans lequel n'importe qui aurait facilement pu se refaire une beauté sans l'aide d'un quelconque miroir de poche. Des escaliers en pierre blanche menaient aux différents étages qui s'élevaient au dessus de la tête de la jeune femme.
Tout avait été construit dans la démesure. Un rien paraissait gigantesque. Les fenêtres étaient dotées de vitres d'une dizaine de mètres de haut pour certaines, entretenues en permanence par des laveurs de carreaux avec une motivation sans faille. Même les plantes les plus anodines semblaient avoir effectué une mutation poussée à l'extrême.

Tout en regardant autour d'elle, elle tâtait son chignon, histoire de se présenter sous son meilleur jour. Enfin, son regard se posa sur le guichet de l'Accueil, où stagnaient des dizaines d'autres personnes amassées dans ce qui s'apparentait à une monstrueuse file d'attente.
Elle regarda sa montre et se sentit immédiatement en retard par rapport au temps que son cerveau avait inconsciemment calculé pour passer tous ces contrôles.
Prise de panique, elle grilla toutes les places, se prit à l'occasion quelques remarques telles que « la queue c'est derrière ! » ou « ne vous gênez pas surtout ! » et le traditionnel « faites comme chez vous ! » qu'elle affectionnait tout particulièrement.

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