13 Décembre 2018. 8h53.
La douce lumière du soleil traversa les rideaux et propagea un léger brouillard dans la chambre. Je me retourna dans le lit à la recherche du corps chaud de Ken mais je fus vite déçue. J'ouvris avec difficulté les yeux et je confirma mes pensées.
- Ken ? Criais-je dans l'appartement.
Le silence.
Je m'adossa au dos du lit et checka mon téléphone. Une photo de Ken et moi prise par Sneaz' à notre crémaillère m'accueillit avant que je me concentra sur mes notifications. Plusieurs notifications Insta et un message de Ken.
" Bon réveil, j'suis parti tôt ce matin au stud', j'ai des trucs à régler. On se voit ce soir. Tiens moi au courant pour ton test. Bisous mon amour"
Je ne répondis pas et me leva du lit. C'était toujours la même chose, il partait très tôt, trop tôt le matin et ne revenait que très tard dans la soirée. Nous n'avions plus l'occasion de nous voir. J'étais totalement pris par mon nouvel emploi dans la clinique, et lorsque je rentrais au alentour de 21 heures, Ken n'était souvent pas encore rentré. Il ne passait le pied de la porte que quelques heures plus tard, le plus souvent minuit passé.
Et cela tous les jours.
Je quitta l'air chaud de la chambre pour rejoindre la cuisine pour me préparer un bon café. J'en profita pour filer aux toilettes, toutes les semaines je fessais un test de grossesse.
Toutes les semaines.
Et à chaque fois, le même résultat s'affichait, une seule barre.
Je m'assis sur le sol froid de la salle de bain et je restais le plus souvent assise pendant de longues minutes, en imaginant le petit enfant que nous pourrions avoir avec Ken mais qui ne venait pas.
Je pensais à nous, notre couple, qui se déchirait plus les semaines passées et plus les tests s'empilaient dans la poubelle. Ken passait le plus clair de son temps et nous n'avions plus aucun moment à deux.
Cela fessait 4 mois que nous essayions d'avoir un enfant avec Ken mais rien ne fonctionnait.
Et chaque semaine, j'espérais apercevoir la deuxième barre apparaître seule sur le sol froid de la salle de bain.
Mais elle n'en fit rien.
Je pris appui sur le sol de me releva pour jeter le test à la poubelle et me lava les mains. Je vérifia mes messages et le verrouilla sans même prendre soin de leur répondre.
Je n'en dis rien à Ken, je n'en avais plus le courage. De plus, même s'il ne montrait rien, je voyais bien qu'il était très peiné, voire bien plus que moi de ne pas avoir d'enfant. Depuis que nous avions envisagé la grossesse, il prenait à cœur sa tache de futur papa et ne pouvait s'empêcher des petits bricoles de temps en temps.
Ces mêmes jouets qui s'empilaient dans la boite en carton rangée dans le bureau du brun. Il avait promis de libérer la pièce pour en faire une chambre d'enfant.
Quand le temps sera venu.
Face à moi, le miroir reflétait un visage que je n'aimais pas, je n'étais plus celle que j'avais été. Mes traits étaient tirés par toutes ses tentatives ratées et mes joues se creusaient un peu plus chaque jour à cause du stress.
Je souffla et rejoignis la cuisine pour boire mon café, face à la fenêtre.
Après avoir bu, je pris place sur le canapé et retrouva mon téléphone, j'ouvris Twitter mais quelques secondes le visage de Ken apparut sur mon écran.
"- Allo ?
- C'est moi.
- Oui je sais.
- Ca va ? Tu as fait le test ?
- Oui.
- Et alors ?
- A ton avis.
- C'est pas grave Chloé, te prends pas la tête avec ça. Ca va venir ne t'en fais pas mon amour.
- Ouais, je sais.
- Tu finis à quelle heure ce soir ?
- 21 et toi tu comptes rentrer à quelle heure encore ce soir ?
- Je ne sais pas, on a du taff ici.
- Ok.
- Bon je dois te laisser garde le sourire, je t'aime.
- Bisous."
Je souffla et jeta mon téléphone sur le canapé et fila sous la douche. J'allais être en retard.
J'attrapa les clés qui traînaient au fond de mon sac et ouvris la porte en traînant les pieds. L'appartement était plongé dans la pénombre. Je me défis de mes chaussures et alluma la lumière de l'entrée. Je me délesta de mon épais manteau et déposa mon sac sur le fauteuil.
J'avança dans le noir et rejoignis la chambre pour préparer mes affaires de nuit. Lorsque j'alluma la lumière de la pièce, Ken se trouvait assis sur le lit avec dans ses mains une petite boite.
- Bonsoir. Dit-il en me souriant de son plus beau sourire.
- Ça va ? Demandais-je en m'asseyant à ses cotés.
- Oui mais là n'est pas la question.
- Ah bon et elle est où la question ?
- Prépare toi, on sort.
- Comment ça ? Demandais-je ne m'allongeant sur le lit, épuisée.
- Oui j'ai réservé une table chez Lusia Maria.
- Mais je suis crevée Ken..
- Allez ça va nous faire du bien, viens avec moi manger tes pâtes préférées en plus je t'ai réservé une surprise, il hocha la tête avec la petite boite qu'il avait déposé sur la commode en face du lit.
- Ken, s'il te plait... Dis-je en me relevant pour aller prendre ma douche.
- Ok sympa..
- J'suis désolée mais pas ce soir.
- Alors quand Chloé ? Sa voix monta et je pria pour ne pas que l'on en arrive à une énième dispute.
- Pas maintenant c'est tout.
- Mais t'es jamais ok pour sortir, ça fait des mois que tu t'enfermes à la maison. Tu sors plus voir les gars, tu sors même pas pour voir tes copines. Qu'est-ce que tu as ? S'exclama en me suivant de la cuisine.
- J'ai rien Ken pourquoi tu me prends la tête ce soir, je suis fatiguée j'ai juste pas envie de sortir.
- En fait c'est depuis qu'on a abordé le sujet, tu veux plus rien faire.
- Ça n'a strictement rien à voir, mais vu que tu tiens tellement à aborder le sujet, peut-être que si tu rentrais plus tôt à la maison on pourrait se faire des trucs. Je ferma la porte du frigidaire. En plus tu sais très bien qu'aujourd'hui ça n'a pas été facile pour moi.
- Ça n'a pas été facile pour moi aussi Chloé, cet enfant tu ne le fais pas seul.
- Je n'ai pas dit ça Ken j'ai juste dit que tu aurais pu choisir un autre jour plus favorable pour convenir d'une sortie.
- Je n'avais qu'aujourd'hui de libre.
- Voilà le problème Ken.
- Bah quand tu seras décidée à me parler et à sortir avec moi tu me tiens au courant. Dit-il en fermant la porte vitrée du balcon derrière lui.
Je souffla et ferma la porte de la salle de bain.
L'eau chaude de la douche me fit un bien fou. Et les larmes coulèrent.
