MY BAD ROMEO [ ÉDITÉ CHEZ HARPER COLLINS - COLLECTION &H ]

|| CHAPITRE 4 ||

Mon masque bien en place sur mon visage, je secoue ma bombe de peinture rouge et, tout en maintenant mon pochoir sur le mur, je vaporise celui-ci. Plutôt satisfaite du résultat, je continue mon œuvre en changeant de couleurs et de disposition.

Il y a quelques jours, j'ai eu la soudaine envie de peindre l'un des murs du salon que je trouvais beaucoup trop triste. Alors, armée de mes bombes, de mes pinceaux et du reste de mon attirail, j'ai commencé mon œuvre.

Ma coloc Nikka, qui adore mes créations, a posé une seule condition : elle veut un mélange de style. Pour satisfaire mon amie, je suis partie sur une œuvre un peu street et complètement déstructurée, mélangeant les genres, les univers et les matières.

J'ai rencontré Nikka un peu par hasard. Il y a deux ans, j'ai quitté Londres pour New York afin de commencer une école d'art, et pour beaucoup d'autres raisons. En arrivant ici, j'ai trouvé un petit studio dans le quartier du Queens, mais il y a quelques mois, il a pris feu en même temps que l'immeuble. Contrainte de me reloger, j'ai épluché les petites annonces et suis tombée sur celle de Nikka : elle proposait une colocation dans un loft. Je n'ai pas hésité, j'ai sauté sur l'occasion.

Toutes les deux, on s'est tout de suite bien entendu. J'ai facilement accroché à son humour et à sa forte personnalité. Grande, mince, la peau d'une jolie couleur caramel assortie à une crinière aux boucles brunes, soyeuses et parfaitement dessinées, Nikka est une fille magnifique aux origines multiples. Le genre de fille qu'on peut trouver en couverture de magazine.

Depuis plus de huit mois, je vis avec elle dans ce super loft, à Dobro, au nord-ouest de Brooklyn. Malheureusement, le quartier craint un peu, surtout le soir, et ce n'est pas à côté de mon école. Mais l'appart' est super, on s'y sent bien.

Grand, spacieux, lumineux, dans une esthétique brute et industrielle, cet endroit est fait pour une artiste comme moi. Ce que je préfère, ce sont les poutres métalliques apparentes, le sol en béton, les grandes baies vitrées donnant sur une vue incroyable, mais aussi la mezzanine qui me fait office de chambre.

Là-haut, j'ai un espace rien qu'à moi. De la place pour peindre, où dormir, et même ma propre salle de bain. La chambre de Nikka est au même niveau que la cuisine et le salon. Nous avons une terrasse immense, mais je dois avouer que je n'y ai encore jamais mis les pieds.

En équilibre sur un escabeau, je peaufine la partie que je viens de peindre. Enfin, je descends et me recule de quelques pas pour mieux admirer mon œuvre. Bras croisé, je souris, plutôt satisfaite de mon travail réalisé en à peine deux jours. J'aime les nuances de couleurs, mais aussi les effets de lumières que j'y ai ajoutés.

Ma fresque, à la fois sombre et lumineuse, met en scène une sorte d'ange déchu fait uniquement de nuances de noir, surplombé par de grandes ailes abîmées protégeant une femme aux cheveux longs, drapé de blanc. Le tout fondu dans du texte extrait des paroles d'un groupe de rock que Nikka adore, et dont je ne me souviens plus du nom.