- Profiter de ma diversion pour voler le Blue Hope à ma place... il en faut, de l'audace.
Les yeux d'Oliver s'écarquillèrent alors qu'il avait levé les mains. Cette voix lui était étrangement familière. Féminine, avec une pointe d'amusement dans la tonalité.
- Retournez-vous.
Cette fois-ci, la voix avait été plus sèche, comme pour s'assortir au doigt impitoyable pressé sur la détente, prêt à tirer. Oliver soupira et se retourna en douceur, pour ne pas énerver celle qui le menaçait. Avant même qu'elle ne retire sa casquette enfoncée sur ses yeux, Oliver s'était souvenu. Amelia Lloyd le regarda avec un peu d'étonnement en le découvrant sous le couvre-chef. Mais il fut de courte durée, remplacé par un sourire en coin presque ravi :
- Eh bien, Monsieur Whiteman... pas si blanc de toute soupçon que cela.
- Je pourrais vous retourner le compliment, Miss Lloyd, fit-il entre ses dents, tendu.
- Oh, cela fait quelques temps que plus personne me connaissant n'est dupe sur mes activités. Ne soyez pas si naïf voyons...
Elle le menaçait toujours du canon de son petit pistolet de poche. La jeune femme n'avait plus grand-chose à voir avec celle qu'Oliver avait rencontrée à la réception, quelques heures plus tôt. Sa coiffure était plus pratique, une simple tresse plaquait ses cheveux blonds comme les blés. Et sa robe de soirée avait été troquée contre une chemise et un pantalon, par-dessus lequel Oliver constata la présence d'une jupe noire retroussée et attachée à sa ceinture.
- Vous vous êtes infiltrée par la porte du personnel, fit-il à voix haute, presque malgré lui, trop étonné.
- C'était la meilleure soirée pour cette diversion, il y a beaucoup d'employés temporaires... Un nouveau visage n'a rien d'étonnant.
- Vous êtes venue voler le diamant Hope.
Amelia eut un air tout à fait incrédule, comme si cette phrase était surréaliste. Un long rire sincère sortit de sa gorge claire et elle fit mine de s'essuyer un œil de sa main libre pour écraser une larme imaginaire :
- Vous dites cela comme si c'était un délit grave.
- C'est un délit grave, répondit-il d'un ton insistant.
- Bien sûr ! Mais venant de vous, qui êtes ici tout comme moi, c'est un comble !
Si la confusion avait un visage, celui d'Oliver aurait parfaitement convenu à cette réplique. Il bredouilla quelques mots incompréhensibles, puis se ressaisit et se défendit :
- Je ne suis pas là pour le voler !!
- Par pitié... soupira-t-elle, hilare. Soyez un peu honnête dans votre malhonnêteté !
- Non, vraiment, je vous assure !
- Alors vous avez pris le risque de venir jusqu'ici pour quoi ? L'admirer ?
La jeune voleuse eut un petit rire dédaigneux et l'incita à se décaler un peu de côté pour lui laisser la voie vers le diamant. Mais Oliver resta solidement vissé où il se trouvait, les mains toujours en l'air, mais buté.
- Eh bien, eh bien... d'accord, si ça vous fait plaisir, je vous crois, fit-elle d'un ton peu convaincu. Puis-je accéder à l'objet désormais ? Ou voulez-vous que je vous tire dessus pour vous donner de l'élan ?
- Au risque d'interpeller le personnel ?
- C'est un vacarme sans nom qui sévit deux étages en dessous de nous... je pourrais en faire un concert complet, personne n'entendrait rien, dit-elle judicieusement. Dégagez. Je ne voudrais pas vous alourdir de plomb.
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Les Portes d'Ys - Origines
ParanormalDécennie 1860, Angleterre. Oliver est un jeune fils de Lord sous le règne de la reine Victoria. Sa vie semble toute tracée : il succédera à son père à la tête des affaires de chemins de fer, entre Grande Bretagne et Inde. Mais un événement tragique...