CHAPITRE 2

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J'ai continué à ruminer une bonne semaine. Un jour, j'étais en accord avec ma décision, le lendemain, je remettais tout en question. Dans un sens, je mets ma vie en jeu, c'est tout à fait légitime de se remettre en question...Car, quelle que soit la finalité de cette histoire, je vais vivre avec des regrets.

Aujourd'hui, j'ai décidé de reprendre le cours de ma vie "normale". Je compte profiter de mes derniers jours avant de partir au Japon. Je suis en chemin pour aller au travail. J'envoie un message à Noémie lui donnant rendez-vous à notre café habituel pour tout lui expliquer en fin de journée. J'annonce à mon responsable que je suis contrainte de prendre un congé sans solde avec une durée indéterminée pour des problèmes familiaux à l'étranger. J'ai bien vu dans son regard que cela l'embêter, beaucoup voudraient ma place, il serait facile de me remplacer. C'est grâce à la bonne relation que j'entretiens avec mon responsable et aussi certainement la qualité de mon travail que ce jour sans solde m'a été accordé sans trop de questions.

J'ai beau faire les mêmes gestes, les mêmes actions que d'habitude, je n'arrive pas à avoir l'impression de reprendre le cours de ma vie. Ce n'est qu'un leurre. Je suis là simplement dans l'attente du cas échéant de mon départ. Je ne peux dire la vérité à personne, qui me croirait de toute façon ? "Bonjour oui alors, je vais devoir m'absenter pour une raison totalement insensée, j'ai été plus ou moins promise à un yakuza et si je refuse et bien, il bute mon père !" Même moi en le disant ça me parait totalement absurde.

La productivité de ma journée de travail est quasi nulle. J'ai passé mon temps à regarder mon téléphone. Je ne sais pas pourquoi...Dans l'attente d'un message d'Arthur ? Quelle raison il aurait à me rappeler ? Je l'ai jeté comme une merde et je ne peux pas me confronter de nouveau à lui avec le poids de ce mensonge. Ou peut-être un message de mon père ? Même si ma décision est prise je ne l'ai toujours pas appelé pour le mettre au courant. Il peut bien attendre encore un peu, c'est de bonne guerre !

La journée est passée difficilement, mais elle touche à sa fin. J'accélère le pas vers mon lieu de rendez-vous, je suis déjà en retard et Noémie va me passer un savon. Nous aimons nous retrouver dans ce petit café du quartier de la Bastille, les propriétaires sont colombiens et leur café ainsi que leurs plats sont délicieux.

- Bonsoir Marie, me salue gaiement la serveuse. Elle t'attend déjà au sous-sol, je t'apporte un expresso avec un carotte cake ?

- Oui, c'est parfait merci beaucoup !


J'emprunte le petit escalier juste à côté du bar. J'aperçois Noémie tapotant sur son téléphone. Elle lève les yeux et me foudroie du regard.

- Et bien ce n'est pas trop tôt !

- Pardon, pardon ! J'ai fait au plus vite, mais je devais à tout prix boucler le dossier avant la vente de demain.

- Oui, j'ai l'habitude de ton discours. Tu n'as qu'à mieux gérer ton temps de travail.


Noémie est mon amie depuis le collège, nous nous sommes perdues de vu pendant nos études supérieures et nous avons décidé de partir faire notre début de carrière à Paris. Elle est dans le marketing numérique pour une grosse boite internationale. Elle gère plusieurs salariés, elle ne compte pas ses heures de travail lorsqu'il le faut, elle se donne vraiment à fond. Par contre, elle est très perfectionniste et elle n'a pas la langue dans sa poche, pour rien au monde, je voudrais qu'elle soit ma supérieure.

Je quitte ma veste en cuir et je m'installe sur le fatboy qui se trouve juste en face d'elle.

Je bois quelques gorgées de mon café et j'avale un petit morceau de mon gâteau. Je retarde l'échéance. Je lis dans ses yeux qu'elle l'a très bien compris et qu'elle ne me laissera pas partir tant qu'elle n'aura pas une explication.

Yamatora-GumiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant