68. Accuser le Mort

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- C'est une menace ?, je murmure pas plus haut qu'elle, un sourire irrépressible aux lèvres.

- J'ai pas encore décidé, lâche-t-elle sur un ton plat.

- Oh. Un aveu alors ?

- Hm... Si tu le dis ?

Elle pince les lèvres pour ne pas sourire, et je décide de prendre cette réaction comme une confirmation. En sentant mon ventre se réchauffer, je me demande si je fais autant d'effet à Sarah qu'elle ne m'en fait. Il lui suffit de quelques mots pour que mon corps réagisse avec force, est-ce que j'ai ce pouvoir moi aussi ?

- Tu sais qu'on va se faire du mal ?, ajoute-t-elle.

L'appréhension dans sa question me touche, mais je ne me formalise pas vraiment pour ce que ça signifie. Ça signifie juste que Sarah flippe, et Sarah flippe régulièrement, donc tout est normal. J'aurais même dû m'inquiéter si ce genre de question n'était pas venu rapidement.

- Information prise en compte. Maintenant j'ai un scoop : on va aussi se faire du bien, et ça c'est cool, je la taquine avec un jeu de sourcils idiot. Toi tu me fais déjà du bien. Peut-être que moi aussi ?

J'espère de tout mon cœur qu'elle acquiesce, parce que j'ai aucune idée de ce que je dis. Je ne sais pas si j'espère la rassurer ou me rassurer moi, je ne sais pas si je lui fais une promesse ou si je partage seulement un ressenti ponctuel. Elle hésite longtemps avant de secouer sa tête de haut en bas, avec un sourire timide. Je me rends bien compte que cette discussion est très importante pour elle, elle l'est aussi pour moi. C'est bien la première fois qu'elle formule à voix haute ce qu'elle ressent pour moi et je veux qu'elle sache que ça compte.

- On dirait que personne ne souffre alors, plus besoin de me menacer. Enfin sauf si tu as mal quelque part, mais je peux te faire un bisou magique ?

Son sourire s'élargit sans pour autant qu'elle ouvre la bouche pour répondre. Elle secoue négativement la tête.

- Tu sais que tu peux dire des mots, Sarah ?, je me moque gentiment, son silence me rendant nerveux malgré ses sourires.

J'ai envie de la prendre dans mes bras, de la serrer contre moi, de la rassurer, de lui promettre tout ce qu'elle me demandera et plus encore. Mais j'utilise le peu de bon sens qu'il me reste pour nous épargner cette bêtise et prêter attention à ses réactions. J'ai la sensation qu'elle a quelque chose sur le cœur qu'elle hésite à me dire, et ça me fait un peu peur. Je m'approche doucement et appuie mes avants bras de chaque côté de sa tête, puis me retrouve penché juste au-dessus d'elle. Mes mains atterrissant dans ses cheveux commencent naturellement à jouer avec. Elle ferme alors les yeux très fort et retient sa respiration, me faisant presque retenir la mienne par automatisme.

- Je t'aime.

Je suspends mes mouvements, ne m'attendant pas à ce qu'elle soit si directe. Elle qui a pour habitude de tourner autour du pot. Elle ouvre doucement un œil pour jauger ma réaction, et doit alors constater mon visage bien plus sérieux que juste avant sa déclaration. Elle lève sa deuxième paupière tout doucement et pince les lèvres comme si elle avait fait une bêtise. Je fixe mes iris aux siens, son regard est incroyablement intense. Mon sang réchauffe chaque partie de mon corps en quelques secondes, vraiment toutes.

- Waw, donc tu peux le prononcer sans que le ciel ne nous tombe sur la tête.

La réalité est que je suis trop submergé par mes émotions, j'espère que mon trouble n'est pas visible.

Elle fait une grimace qui me fait penser qu'elle se mord l'intérieur des joues, ou quelque chose comme ça. En tout cas, sa moue est embarrassée. Je descends une main de sa tête à sa joue, pour caresser sa peau si douce. On est tellement proches qu'on respire le même air.

Juste un SourireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant