Chapitre Ⅱ: Comme la souris et le chat.

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Ⅱ.

À l'arrêt de bus, 7h55.

     Le bus arrive, il n'y a personne qui y est assis mise à part quelques employés d'entreprises et 2/3 retraités. Je conçois que je suis sûrement la seule à être en retard aujourd'hui. J'entre dans le bus et m'installe au fond. Je regarde, pendant ces 15 longues minutes, l'extérieur luisant de Tokyo. Quelle ville fascinante ! Je joue avec les quelques goutes humide de pluie qui ont traversées la vitre. Dehors, un homme cours à coté du bus, il l'a raté et malheureusement pour lui, certaines lignes ne peuvent s'arrêter en chemin, et lorsqu'il s'en aperçoit la tristesse laisse tracer des lignes profondes de déceptions sur son visage. Il me voit le dévisager, je soutiens son regard froid, et brûlant à la fois. Désolé à vous jeune homme, la vie peut parfois basculer chez certains sans aucune raisons apparente. Il laisse ses bras, qui servaient d'appels, tomber et ralentit sa course, il me regarde toujours, je le regarde toujours, quelques secondes suffisent pour que la vitesse du bus coupe notre liaison, et je ne le voit plus. Je détache mes yeux de l'extérieur et regarde en face de moi attendant le prochaine arrêt.

Les dernières minutes s'écroulent lentement et le bus se stoppe. Je sors de celui-ci et me dirige vers mon lycée.

*

Salle 105 8h13.

     J'ai l'allure d'une fraiche flaque d'eau, une sorte d'éponge de vaisselles. La honte. Quelle honte, vraiment. Arrivée à ma salle de classe, je toque. La profonde voix de mon professeur retentit derrière les murs.

« Entrez !  »

J'ouvre doucement pour ne pas trop déranger le cours, je suis déjà en retard, me faire remarquer serait de trop. Lorsque j'enclenche la marche pour me diriger vers ma table. Je constate en peu de temps quelque chose de différent. La stupéfaction se lit sur mon frêle visage, d'autres élèves s'y trouvent, d'autres élèves sont à ma place. Je cherche Moe du regard et la perce au fond, à côté de David. Je ne comprends pas.

« Après le conseil de classe, les professeurs et moi-même avons décidé d'un nouveau plan d'emplacement. Je n'ai pas besoin de mentionner le fait que vous soyez tous très bavards.  »

Je suis assez déçu, mon dernier souhait était sûrement de devoir me retrouver aux côtés d'une autre personne. Le professeur prend son papier et indique :

« Saaya, tu es à côté de Tashira, première colonne, deuxième rang. Merci de t'installer rapidement.  »

Pendant cette seconde, pendant cette simple seconde, tous bascule. Je prends conscience que je suis à côté du bien connu : Tashira Tsubasa. Le jeune garçon surnommé par les filles de l'école, Dīpugurīn (vert profond), ses yeux en sont la cause. Il est arrivé à Tokyo il y a seulement 2 ans, seulement 600 jours, et il est déjà le plus populaire dans les alentours. Comment ? Comment son nom s'est-il fait marquer dans toutes les têtes ? Eh bien, la beauté joue dessus, les publicités de parfum aussi. Pour le peu d'apparition sur l'écran qu'a t'il fait, ça a été suffisant voyez-vous. Trois pubs viraux, peut-être pour des millions de vues, il doit être riche.

Je ne le connais pas vraiment, du moins absolument pas. Mais je sais que les adultes le voit comme de l'or, les filles comme un lipstick, les garçons comme un joueur de foot. En bref, il est la drogue de tous le monde. Et moi ? Qui suis-je ? Rien de bien spécial à côté de lui. Il doit être le genre moqueur de part sa popularité qui fait de lui quelqu'un de supérieur. On connait tous ce type d'élève dans un lycée. Trop cliché, pas à mon goût pour tout vous dire.

Comme ma mère disait de mon père : "Sa "perfection" le rend si imparfait."

Je me crispe légèrement, mon cœur tambourine contre mes côtes. Mes mains sont paralysées et mon regard perdu dans la salle de classe qui semble infiniment plus grande. Ça recommence... Ma sœur n'avait pas tort finalement, je stresse pour le peu de choses qui arrive à ma simple vie. C'est frustrant, sérieusement.

"Tu peux m'expliquer ce que ça fait ?"

Qu'elle me dirait.
Et c'est vrai quoi, qu'est-ce que ça peut bien me foutre d'être à côté de ce gars. Si je m'en convaincs, je pourrais me persuader qu'il n'est pas supérieur. Il a beau envouter tout le monde avec ses yeux couleurs natures, ça ne fonctionnera pas avec moi.

« Saaya ? Je ne le répéterai pas, va t'asseoir.  »

Oh, ça doit faire sûrement une bonne trentaine de secondes que je suis figée, le regard vide, à débattre avec moi-même des conséquences de ma nouvelle place. Mon Dieu ! J'entends quelques rires qui viennent du coin où se trouve Tashira. Il doit se foutre de moi avec ses camarades, je n'ose même pas le regarder.

J'avance vers ma place, la tête baissée, mon cœur s'alourdit. Qu'est-ce qui m'arrive ? Je suis stressée, bien sur, mais plus que d'habitude, je crois avoir même peur d'être sa voisine. Je ne l'aime pas, je le sais et maintenant il doit lui aussi s'en être aperçue.

"Eh, tu l'aimes pas le Tashira ?"

Je... Un garçon, cheveux brun, je ne vois nullement son visage, il est tout au bout de la classe. Il vient de lancer le coup de grâce de mon humiliation, merci d'avoir gâché ma journée, merci infiniment. Le pire, c'est qu'il empire la situation déjà bien amochée, et c'est après le coup de grâce qu'il désire me terminer alors que je suis déjà genoux à terre.

"Ou peut-être que tu le kiff tellement que t'en ai pétrifié."

Je recule, comme si un lion menacé de se jeter sur moi, la classe rigole comme si elle assistait à un spectacle humoristique. Je recule, effrayée, les yeux ronds, la bouche ouverte. Pétrifier des mains que je disais ? Plutôt pétrifier de haut en bas, non ?
Stresser pour le peu de choses qui arrive à ma petite vie, apeurée pour des situations que d'autres passent s'en une quelconque frayeur. Voilà qui je suis, un moustique dans un monde de félin.

I want to swim in your blood.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant