Emma

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C'était un samedi 19 septembre, il faisait chaud en cette fin de soirée et moi j'étais paumé dans un coins de mon bled au nom en Saint. Adossé contre mon tas de ferrailles qui me servait, et sert toujours, de voiture je me perdais dans les songes d'un mec tout juste capable aux yeux de l'Etat d'voter, songes qui, grosso modo étaient: « Est ce que les pizzas avec de l'ananas sont vraiment des erreurs dans l'histoire de ce plat ou juste une représentation maladroite d'une autre culture? »
Normalement on souvient pas trop d'avoir pensé à une connerie dans ce genre, je rejoins ce point. Pourtant cette connerie c'est la dernière pensée que j'ai eu qui n'était pas inondée par elle. Car elle est arrivée juste après. Comme ça, elle c'était plantée devant ma "voiture" tout en s'y adossant sans pression, comme si c'était la sienne alors que non. Ses lunettes qui lui bouffaient la moitié du visage mon fixées puis sa bouche avait lancé:

«- Elle est pourrie ta caisse.»

J'avais pas répondu direct, non pas que j'étais un de ces nullos sans répartie mais bien car au loin je voyais Adrien, son tracteur et sa face de couillon finit, fière d'avoir enfin son permit. J'évitais ainsi la scène gênante du: « Quoi?! Tu dis quoi?! J'entends rien!» Un génie, je sais.

«- P'têtre bien, mais elle roule au moins. (Le tracteur était passé.)
  - Ah! Je voulais t'entendre dire ça avant de t'la chourer!»

Son pied se trouvait enfoncé bien profondément dans mon PUTAIN de flanc! La marque qu'il avait laissé après n'était même pas bleue mais violette! J'tombais comme une merde pendant qu'elle en profitait pour rentrer dans mon auto grinçante comme un d'nos vieux du village.
Ouais, je suis ce type de mec qui laisse ses clés sur le contact tout en rêvant d'une fermeture automatique.
Jl'entendais essayer de mettre le contact, une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, cinq fois, claquer la porte, plus rien.

«- T'es sûr qu'elle roule?»

Un gémissement de douleur traversait mes lèvres à ce moment pour lui répondre. J'étais lamentable.

«- Je me sens mal pour toi et ta pseudo bagnole maintenant, disait-elle, tient une orange. Appelle pas la police s'teu plaît.»

Suite à ça, elle c'était affalée à côté de moi tout en épluchant rageusement une orange purement innocente, comme mon flanc.
C'est comme ça que j'ai fait connaissance avec elle. Je sais pas si c'est le fait qu'elle était ou juste que j'avais le syndrome de Stockholm, mais on c'était mis à parler. Je me souviens encore d'lun de nos échanges:

«- T'es pas ordinaire comme meuf.
  - C'est pour pallier le fait que jm'appelle Emma, plus banal tu meurs je pense.
  - C'est vrai que sur l'échelle de l'originalité c'est pas ouf, moi c'est Léon.
   - Ça passe large sur ton échelle. »

Il y a un ensuite à cette histoire, elle est pas juste repartie comme elle est arrivée, bien évidemment.  Car, grâce à elle j'ai découvert que j'en avais autant ras la casquette qu'elle de c'te cambrousse. Alors on a prit la route, tout les deux, dans ma voiture qui au passage fonctionnait à merveille, il suffisait juste d'insérer violemment la clés. Et non c'est pas une métaphore à la con. J'peux pas raconter toutes nos merdes qui sont arrivées durant notre "road trip" dans les coins paumés d'France, trop long, mais j'peux spoiler la fin.

Durant un 2 novembre, plutôt frais, elle prenait du temps au chiotte, normal pour une nana, mais comme je l'avait clairement dit plus haut, elle était pas ordinaire et de plus on était seul sur cette air d'autoroute au beau milieu d'nul part. Alors ayant marre de poireauter comme si on me mettait un lapin, ch'uis parti checker, voir si elle tombait pas dans l'trou.

Conclusion:
La porte, déverrouillée.
La lumière, éteinte.
Le lavabo, remplit de ses cheveux blonds.
Le miroir, écrit en lettres capitales « JE PREND MA TANGENTE ».

Suite à ça j'avais compris que j'étais un gosse perdu dans la campagne française avec quasiment plus un rond sur lui et avec en prime la nuit qui commençait à s'montrer. La panique me submergeait tandis que mes jambes me menaient à ma merde roulante. Cette nuit là, je l'avais passé à frapper tout les coins de ma voiture et à pleurer comme une fiotte, embaumé par l'odeur, les sourires, la voix, les rires, les yeux, le nez, les lèvres, les cheveux, la peau, le buste, le dos, les jambes, les bras, les pieds, les mains, les ongles, les grains de beautés, en bref les souvenirs d'Emma et au petit matin je l'avais trouvé, son livre, écrit de sa main.

Facinorum

Ce livre appartient à: Emma pour l'originalité
Il vit à̵̶ :dans le Nowhere ma gueule
Et il me sert à: écrire des merveilles!!!

Et je l'ai ouvert.

FacinorumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant