Hostage

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Je suis assise sur une chaise, dans la salle de classe 002. Toutes les filles sont en salles 001 et 002. Les deux salles communiquent par une porte, mais les deux salles sont plus silencieuses que jamais. Personne ne bouge. Chacune est assise à sa table, et se rend le plus invisible possible.

Il est quatre heures du matin. Vers minuit, les élèves qui viennent ici depuis deux ou trois ans, ceux qui ont seize ou dix-sept ans je crois,  ont bu. Ils ont eu la merveilleuse idée d'enfermer tous les animateurs, surveillants, et adultes en charge de la colonie dans leurs chambre. De faire sortir tous les élèves qui sont venus dans cette colonie de vacances de leurs chambres.

Cette colonie de vacances est sur une minuscule île appartenant à l'Angleterre. Dessus, il n'y a que la colonie. Cette île n'est pas particulièrement belle, donc les touristes sont rares. Tous les élèves qui sont ici restent deux mois. La colonie a pour but d'améliorer notre anglais, avec des cours toute la journée. La plupart des élèves ont été obligés de venir, ce qui "explique" qu'ils ne soient pas contents d'être là.

Vers minuit, donc, ils ont enfermé tous les adultes dans leurs chambres. Puis ils ont réveillé tout le monde avec This Is How We Do de Katy Perry. Ils ont diffusé un message disant de s'habiller et d'aller dans certaines salles. Tout le monde a été surpris, mais tout le monde s'est exécuté en vitesse, pensant que c'était important. Quand les salles devinrent pleines, ils enfermèrent les gens dans les salles. Au début, tout le monde s'est agité, en voyant les garçons les plus stupides les enfermer. Puis après, d'autres garçons, ayant bu aussi, arrivèrent et ordonnèrent de rester assis et silencieux. Cela fait une heure que je suis assise, en silence, dans cette salle.

Un des garçons regarde son portable, qui vient de vibrer, puis se dirige vers les autres garçons qui tiennent la salle en silence. Il hochent la tête. Puis, celui qui a eu le message se place devant le tableau.

"- Bonjour mesdames ! (Il sourit, amusé. Je crois qu'il a bu, et que sous l'emprise de l'alcool, il prend une voix grave et triomphante. J'ai une grande envie de le frapper, surtout que je fais du taekwendo depuis toute petite.) Donc, cette nuit, nous avons enfermé les surveillants et les profs.  Comme vous pourrez le remarquer, nous dirigeons désormais cette île. Enfin, il y a quand même le cerveau de toute cette histoire qui dirige, je suppose que vous avez déjà entendu parler de Chris ? Donc, tous ceux qui n'obéiront pas seront exclus du Domaine, et seront livrés à eux-mêmes. Tout ça pour dire que vous avez intérêt à obéir, parce que au bout de la septième infraction, vous êtes exclus. Fin, dans tous les cas, si vous obéissez pas, on vous nique vos mères. Voilààààà !

Je grimace. C'est n'importe quoi. On n'est pas dans le monde des grands méchants qui prennent le contrôle du haut de leurs seize ans. Y sommes-nous ? Peut-être que les gars se sont sentis pousser des ailes et ont eu un élan d'intelligence en se disant " Et si on fichait n'importe quoi, juste pour le fun ?".

- Donc, maintenant, on va vous appeler, et quand on vous appelle, vous venez dans la remise, repris le gars. C'est clair ?

Personne ne répond. Tout le monde est exaspéré de la situation plus que grotesque dans laquelle on se retrouve...

- Cherry.

Une fille au longs cheveux bruns se dirige vers la remise, rapidement. On entend des bruits de coups, et Cherry ressort, le nez en sang, le bras droit replié dans le dos, tenu par un garçon. Il s'arrête au niveau du garçon qui vient de tout expliquer.

- Donc, un conseil, évitez de faire comme elle, qui a essayé de se rebeller du haut de ses douze ans. Voici la première exclue.

- C'est n'importe quoi, dit Cherry. Ils vous font mal, et vous ne devez pas vous défendre. C'est pas normal de nous retenir comme ça. Du haut de mes douze ans, comme tu dis, je me sens déjà plus intelligente que toi.

- Tais-toi.

Il l'emmène dehors. Je me prends la tête entre les mains, exaspérée de la situation. Je n'y crois pas. C'est bien réel, mais c'est tellement impossible ! Soudain quelqu'un secoue mon épaule, violemment. J'enlève mes mains de mon visage, et regarde la personne qui m'a secouée droit dans les yeux. J'espère que mon regard est noir, car j'ai mal à cette épaule depuis quelques jours, et qu'il vient de me faire mal.

- Quoi !? Dit-il, agressif.

Il serre le poing. Je ne réponds pas, et baisse la tête.

- Quoi !? Répète-t-il.

Il me secoue l'épaule à nouveau, et la douleur me met les larmes aux yeux.

Je me lève, repoussant ma chaise dans un grincement. Je le fusille du regard.

- Alors ? Tu vas dire ce qui te pose problème ?

Il est beaucoup plus grand que moi. Son regard est menaçant, et son poing est serré. Ce n'est sûrement pas une bonne idée d'affronter quelqu'un de seize ans qui a bu. Je me rassois.

- Ouais c'est ça, ferme-la.

Il frappe mon épaule, d'un coup de poing puissant.

C'est plus fort que moi, je frappe le bras qui m'a frappée.

Il me prend par l'aisselle et m'oblige à me lever. Je résiste, mais il est plus fort que moi.

Il me sort dans le couloir.

- Tu t'appelles comment ?

- Alice.

- T'as quel âge ?

- Treize ans.

Il rit.

- De tes treize ans, tu pense me surpasser. Et bien, j'ai une info pour toi. Si tu ne t'excuse pas, il risque de t'arriver de mauvaises choses.

Je hausse un sourcil. Il me donne un coup dans le ventre. Mes poumons se vident, et je tombe à genoux.

- Excuse-toi !

Il refrappe dans mon ventre, du pied, cette fois.

- Désolée ! Me suis-je exclamée.

- Pardon ?

- Désolée...ais-je soufflé.

- Relève-toi !

J'essaye. Pour me relever, il faut que je m'appuie sur mon bras droit, mais c'est aussi l'épaule sur laquelle il a frappé, et la douleur a eu des répercussions dans tout mon bras.Je n'y arrive pas. Il me reprend par l'aisselle, et me relève. Il me regarde dans les yeux.

- C'était quoi ton problème tout à l'heure ?

- J'ai mal à l'épaule.

- OK. Je crois que c'est réglé. Maintenant, tu attends calmement, comme tout le monde, et tu la ferme. Moi, c'est Luke. Tu me respecte ou je te refais le portrait. D'accord !?

- OK, ais-je lâché, à contrecoeur, frustrée de ne pas pouvoir lui répondre sans me faire démolir;

Il me raccompagne à l'intérieur, sous les yeux sidérés des autres élèves.

- Maintenant tu bouge plus. D'autres volontaires pour se rebeller ?

Un silence lui répond. Il prend une expression confiante et reprend sa place.

Pendant mon absence, la classe s'est vidée de moitié. Il reste les plus jeunes, qui ont douze ou treize ans, comme moi.

- Alice !

Luke me regarde d'un oeil noir.

The IslandWhere stories live. Discover now