demi-tâtons

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À tâtons comme dans une nuit sombre de lumière stroboscopique, à tâtons ses yeux s'ouvrent à peine pour lui survivre, des perles de vagues, un Hokusai en bouteille.

Sous ses paupières la douleur d'un marquage au fer rouge, dans sa matière  la beauté d'un tatouage éphémère, sur ses iris ,  l'encre indélébile.

Elle se sent mourir doucement parfois comme si une partie de ses points cardinaux tirait sa force vers les oubliettes de sa personnalité.

Elle avait fuit. Lâchement.  En réalité elle n'avait même pas fuit, elle avait adopté le comportement qui lui semblait le plus normal, le plus inconséquent. Les yeux eux l'avaient transpercée de part en part, l'avaient trop sondée pour que tout ne soit pas l'annonce de l'orage.

L'orage froid et mentholé d'une vie qui efface ses propres traits.

Elle avait sentit l'admiration pour ces cils bouillir et sursauter, aiguille d'une montre trop  longtemps arrêtée. Mais cette admiration sans bornes lui avait fait peur. Elle n'était pas assez pour parler et regarder la nuit côte à côte avec les yeux qui semblent eux, si talentueux et individuels. Elle n'est pas individuelle, elle n'est pas unique, la hiérarchie veut donc qu'elle regarde la nuit seule sous un ciel qui a trop vu de gens comme elle, sans en parler.

Personne ne devait savoir qu'elle passait son temps ainsi qui plus est, à profiter de son ardeur de vie pour faire ce qui est considéré comme rien.

Observer n'est pas le maître mot du cahier des charges de ses attentes. Mais les yeux sans visage, sans prison, ils savent.

Et c'est effrayant pour Agathe.

Alors ses semelles d'argent ont repris la route, son expression de mépris à teinté la nuit de noir, tout d'un coup il est minuit.

Mais si les yeux savaient, c'est qu'ils savent toujours, Agathe.

Et les yeux ont leur propre parchemin à trainer, leur propre volonté à tracer.

Mais qu'es-ce que tu fuis alors, Agathe?

l'  a n   n u i t

Demi-MesureWhere stories live. Discover now