Mon nom sur ton poignet

Chapitre 5 - Pivoine

Quand je regagne la soirée, le feu s'empare des mes joues. D'un coup, en croisant le regard de Mathew, je me rends compte de ce que j'ai fait. Je revois la main d'Eric Wang s'engager dans mon dos, sous ma robe. En y repensant, il n'a pas effleuré ma peau. Sauf que j'aurai très bien pu demander à Amy ou à Kara de le faire pour moi. Quelle cruche !Pour qui va-t-il me prendre ? Je soupire par le nez envidant le reste de ma bouteille. Je me rue ensuite vers les fenêtres et les ouvrent le plus grand possible. Une brise rafraîchissante rentre dans la pièce et j'entends quelques murmures satisfaits parmiles invités, me signalant que je n'étais pas la seule à mourir de chaud.

Je repars,effectuant ma ronde jusqu'à l'escalier en question, celui où un invité aurait vomi. En général, ils ont la gentillesse et la politesse de venir nous prévenir. Je découvre Kara en train de tirer le chariot d'entretien, à quelques mètres du vomi en question. L'odeur m'attrape le nez et le plisse.

- Kara, où est le personnel d'entretien ?

- Je n'en sais rien, dit-elle en relevant la tête.

Ses mèches parfaitement bouclées semblent prendre vie alors qu'elle relève sa jupe crayon rouge pour pouvoir marcher plus facilement. Je l'aide à nettoyer, sans faire trop attention à la tâche ingrate dont nous venons d'écoper. Il faudra que je dise deux mots aux responsables de la salle de réception, mais je décide de ne pas en faire en drame pour le moment.

Quand nous avons terminé, je jette les essuie-touts et les gants jetables dans la poubelle et vaporise un nuage épais de désodorisant là où le client à recracher son alcool et son dernier repas.  

- Oh mon dieu Clarice !

Je sursaute et me plaque une main sur la poitrine, calmant mon cœur qui vient debondir.

- Tu es rouge pivoine !!

- Quoi ?

Je m'étonne et pose une main sur ma joue, brûlante.

- C'est la chaleur, je mens en pensant clairement à Eric Wang et son intervention sous ma robe.

- Tu te sens bien ? Tu devrais peut-être faire une pause et aller prendre l'air ?

Je pouffe sans rire. J'en viens, et l'air frais n'est pas assez froid pour calmer le rouge qui m'est monté aux joues. Je la rassure d'un sourire quand Mathew arrive dans mon dos. Sa voix rauque me ramène en arrière et je me dévisse le coup pour le voir.

- Clarice, il y a un problème avec Nick.

Je fronce les sourcils. Nick, c'est le DJ. Je pose mes poings sur mes hanches, une idée de ce qui ne va pas.

- Il est bourré ?

- En plein dans le mille.

Je secoue la tête en m'élançant d'une démarche féline vers la salle principale, où je reconnais la musique de la playlist que j'ai composée. Je lève un doigt vers le ciel et lance :

 - J'avais bien dit qu'il fallait pas le mettre près du bar ! Je l'avais dit !

J'entends Kara éclater de rire, puis les roues métalliques du chariot d'entretien se mettre en route et pour finir, les pas de Mathew derrière moi.

Nous arrivons près des platines rapidement, et Nick est dans un état lamentable. Je me maudis intérieurement de l'avoir cru sur parole quand il m'avait assuré tenir toute la soirée, et lui tapote la joue.

- Apporte lui de l'eau, je souffle à Mathew.

Il disparaît vers le buffet un instant alors que je redresse le DJ sur le tabouret. Je l'entraîne tant bien que mal vers l'arrière-salle, camouflée par un rideau blanc pailleté et le pousse dans le petit canapé. Il tombe trop lourdement pour que j'ai espoir de le récupérer avant la fin de la soirée. Il ne me reste que deux options : appeler en urgence un autre DJ, bien que je doute qu'à cette heure et avec si peu de délai j'en trouve un de disponible, et...

- Je peux prendre le relais, intervient Mathew en tendant la bouteille à Nick.

Je le fusille presque du regard tant je savais qu'il allait dire ça. La musique,c'est sa passion, mais il n'ait pas assez doué pour en vivre. Enfin,c'est ce que les maisons de disques lui ont dit quand il avait vingt ans. Pourtant, je l'ai déjà entendu aux platines, et il est génial.

- Très bien, je te laisse faire, je lance.

Il me colle un baiser sur la joue avant que j'ai pu esquiver ; avant que j'ai pu anticiper ce geste.

- Clarice, t'es la meilleure !

Il disparaît en trottinant, la mine joyeuse, comme un enfant ouvrant ses cadeaux à Noël, pendant que je reste hébétée, ma main essuyant doucement la trace invisible de son baiser. J'entends Nick éclater de rire et me penche vers lui, le regard dur.

- C'est ta faute Nick ! C'est la dernière fois que je t'embauche, tu m'entends ?

- Mais oui, grogne-t-il en souriant. Je sais parfaitement que tu es... fo-folle de moi !

Je pouffe, mi amusée et mi vexée de sa remarque. Est-ce que je donne cette impression à tous les hommes ? Celle d'être facile et aguicheuse, ou ce ne sont que les divagations d'un homme saoul. Je me passe une main dans la nuque puis me laisse tomber un instant sur les fauteuils en cuir qui se trouvent sur ma droite. Cette arrière-salle fait office de loge pour les artistes, et je ne suis pas étonnée d'y trouver un comptoir avec miroirs, vide de toute maquillage. Je pose mes coudes sur la surface froide et brillante et m'observe un instant. Je suis sciée devant la rougeur de mon teint. Je suis pivoine.