Untitled part

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Je crois que j'ai un problème.

Si vous me voyez dans la rue, j'ai l'air de quelqu'un de normal. Si vous me croisez, vous ne retiendrez probablement pas mon visage non plus. Je pourrais peut-être vous sourire si vous me jetez un regard dans le métro.

Et puis j'ai des mauvais jours. Des jours où les larmes ne cessent de ruisseler sur mes joues lorsque personne ne regarde ou que je suis seule chez moi. Et parfois, c'est trop dur alors même dans la rue, en allant attraper un bus ou faire une course, on peut voir mes yeux rougies. Je m'arrange toujours pour cacher mon nez dans mon écharpe pour cacher les larmes sur mes joues. Si vous me croisez sans vous attardez, vous penserez juste que je suis frileuse, ou que j'ai des allergies.

Mais je crois que j'ai un problème.

Il y a des jours où ça va. Ma journée au travail s'est bien passé, mes employeurs étaient de bonne humeur et les clients au rendez-vous alors ça va. Les journées où je n'ai pas de problèmes pour rentrer chez moi. Les journées où j'apprends des choses. Où le nouvel épisode de ma série préférée sort. Où j'arrive à me plonger dans un livre et à tout oublier autour de moi.

Et puis il y a les autres jours. Les jours où je suis tellement angoissée d'aller au boulot que je dors mal la nuit. Les journées où j'espère qu'il m'arrive quelque chose sur la route du travail pour ne pas y aller. Les journées où mes employeurs stressés passent leurs nerfs sur nous et où je dois répéter en boucle dans ma tête, comme une litanie "ne pleure pas, ne pleure pas, ne pleure pas." Les journées où dans les transports de vieux pervers se frottent à moi et tu es tétanisée et de toute façon, on est serré dans les transports, personne ne le croirait. Et les journées où j'apprends que les examens médicaux de ma mère ne sont toujours pas concluant et on ne sait toujours pas ce qu'elle a.

Ces jours là, j'ai envie de hurler au monde entier que ça ne va pas. Mais mes problèmes me paraissent si insignifiant à côté de ceux des autres. Après tout, j'ai un toit au-dessus de ma tête, de quoi manger tous les soirs, un travail, des amis et une famille. Alors je me contente de sourire. C'est plus facile. Et de toute façon, qui pourrait bien comprendre ce qu'il se passe dans ma tête ? 

Qui pourrait  comprendre que je préférerais être clouée dans un lit d'hôpital plutôt que d'aller travailler ? Même moi je ne me comprends pas parfois. J'ai un métier que j'ai choisi et que j'aime après tout. Qui pourrait comprendre qu'à chaque fois que je rentre sur Paris, dans mon appartement, je pleure ? Je déteste vivre à Paris mais c'est le rêve de tous les gens de vivre dans la capitale des amoureux et puis j'ai un toit dans un quartier agréable, alors je n'ai pas à me plaindre.

Personne ne sait ce que je ressens réellement au plus profond de moi. Ma mère sait que je déteste Paris et que j'ai des jours plus durs que d'autres mais on mets ça sur le compte de la fatigue. Je fais des gros horaires, avec des trajets compliqués et j'ai des patrons stressés. C'est normal que tu sois fatiguée et qu'un rien te paraisse énorme. Et j'essaie de m'en convaincre aussi. Parfois, j'arrive à me convaincre que ce n'est que la fatigue. Je veux vraiment y croire. Qu'une bonne nuit de sommeil réglera tout. Mais bizarrement, ce n'est jamais le cas.

Alors je crois que j'ai un problème. Mais je crois que qu'en en parlant à quelqu'un, j'aurais l'impression d'être folle, que quelque chose ne va vraiment pas chez moi et j'ai envie de croire que tout va bien, que tout va s'arranger. Alors quand tout va mal, quand j'ai l'impression que je ne vais pas survivre à cette journée mais que je peux pas le dire, je fais ce que je sais faire le mieux. Faire semblant que tout va bien. Je répète dans ma tête comme un mantra "ne pleure pas, ça va aller". Et je souris.

OKWhere stories live. Discover now