Le jour même (succédant à celui de la veille, jour précédant celui-ci)

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            Il était là. C'était bien lui. Son air sévère et méprisant avait jeté un voile sombre sur l'amphithéâtre numéro quatre cent quatorze. Le grand S****, le maître, le divin, le suprême, nous jugeait du regard, enfin surtout moi. J'étais rouge de colère après que le groupe des p'tizamis m'aient ignoré et je ne dérougis pas, maintenant face au grand homme. J'étais mort de honte et sa voix résonnait dans ma tête "RUUUUUDE, Grégou, RUUUUUUDE". Ce qui me faisait le plus mal à ce moment précis, ce n'était pas la remarque de ce vilain professeur, mais bien celle de l'UFO (unidentified flying object, également appelé l'OVNI - objet volant non identifié). Comment avait-il osé parler de Jean-Luc Reichmann, présentateur sur TF1, chaîne concurrente de France 2, sur laquelle était diffusé Motus, le jeu de mon père ? Je ne faisais que ressasser ce souvenir de Jean-Luc, invité à Noël en 2014, qui n'était jamais venu. Il avait pourtant confié à mon père être fan de boules, surtout les noires. Le méchant professeur avait eu le temps de déplacer toutes les chaises de l'amphithéâtre contre le mur, de boire à la paille dans sa gourde bleue *glou glou* et de repartir, pendant que j'étais encore dans mes pensées. Je sortis moi aussi, laissant la porte claquer pour montrer mon mécontentement au groupe des p'tizamis. 

Je me dirigeais vers les escaliers pour en apprendre davantage sur le déroulement d'un possible rattrapage des  examens auxquels je n'étais pas allé, trop chamboulé par la séparation de mes parents. Non mais vous le croyez vous ? Avoir Mylène Fermière comme belle-mère ? Non merci. C'est une libertine, une catin. Tout ce qu'elle veut c'est qu'on la déshabille. Je ne comprends pas ce que ma mère lui trouve. En tous cas, je n'irai pas vivre avec elles. Cela dit, il va falloir que je trouve un meilleur endroit où dormir, la poubelle de la fac n'était pas très confortable cette nuit. J'aurai bien mieux dormi sur le ventre de l'homme enceint, cependant je ne sais pas s'il aurait tant apprécié. Peut-être devrai-je demander à ma promise de m'héberger le temps de retrouver une vie stable. Elle accepterait peut-être, elle qui est si douce et si gentille. Je donnerai tant pour qu'elle coiffe ma moustache chaque matin. C'est décidé, je ferai le premier pas après avoir réglé cette histoire de partiels. C'est en montant les marches que je me rendis compte que je ne savais pas où se situait le bureau de l'homme à la moto (comme le titre de la chanson d'Edith Piaf), l'endroit sombre où il mangeait ses repas chaque midi devant un épisode de Scooby-Doo. Trop occupé à gamberger s'il mettait ou non des cornichons dans ses sandwichs, j'en vint à rater une marche. PATATRAS. J'avais dévalé l'entièreté de l'escalier. J'entendis un crac (comme le nom des gâteaux dont parlent souvent les p'tizamis, j'ai cru comprendre qu'ils écrivaient eux-mêmes CRAC sur les gâteaux). Une douleur soudaine envahit ma jambe. Elle me semblait cassée. Zut, moi qui m'étais déjà cassé l'autre jambe quelques semaines auparavant en tombant dans ce fichu trou sur le trottoir. Tout d'un coup, tout était devenu flou, un peu trop fou pour moi, et j'en avais peur, la suite je ne m'en souvins pas. 

Je me réveille, me frotte la moustache comme chaque matin, mais quelle surprise : elle a repoussée ! Je m'assois dans mon lit mais .. ce n'est pas mon lit ? Où est ma couette Thierry Beccaro ? Et ma chambre ? Ce n'est pas ma chambre ? Où suis-je ? Oh..... C'est vrai. Ma jambe. Je dois sûrement être à l'hôpital. Mais, pourquoi ma moustache a-t-elle repoussée si vite ? J'entends au loin crier : "Grégouuuuu, mon fils adoré, mon Grégou, qu'est-ce que tu nous as fait peur !". C'était ma mère, Josiane Belasko.   

- Enfin maman, pas la peine de crier, je vais bien. Où est papa ? Ne me dis pas que tu as amené la fermière avec toi ? 

-  Il est en tournage, il prépare un remake de Motus avec France 2. Mais mon Grégou, on s'en fiche de ton père après ce qu'il vient de t'arriver. J'ai cru que tu n'allais jamais te réveiller, tu m'as fait tellement peur. Je n'ai cessé de répété à Mylène : "Je - je suis si fragile-e, qu'on me tienne la main". 

-  Comment ça que je n'allais jamais me réveiller ? T'as jamais vu quelqu'un faire la grasse matinée ?? On peut plus dormir tranquille ?! 

-  Mais enfin Grégou, ça faisait 2 semaines que tu étais dans le coma. Tu n'as pas supporté la douleur de ta jambe cassée et tu t'es évanoui. En arrivant aux urgences, les médecins t'ont placé dans un coma artificiel par peur que tu te ré évanouisses constamment à cause de la douleur.   

-  QUOI ?? C'est donc pour ça que ma moustache a complètement repoussée !    

-  Maintenant que tu es réveillé, tu vas pouvoir retourner à l'université et avoir ta licence. D'ailleurs, je ne t'ai même pas demandé comment s'étaient passés tes examens. Excuse moi mon Grégou, j'étais tellement préoccupée par les papiers du divorce. Bon, l'infirmière a dit qu'il te faudrait environ 3 semaines en fauteuil et plusieurs séances de rééducation pour que tu puisses remarcher normalement."

Comment allais-je faire pour séduire ma belle avec une jambe dans le plâtre et un fauteuil roulant ? J'étais désemparé. Il me fallait quelques temps pour réfléchir à une stratégie avant de retourner à la fac et affronter les regards moqueurs des étudiants. Je cherchais en vain des solutions, tout en regardant les recettes de Michel Dumas sur la télévision du salon, profitant de l'absence de papa pour zapper de temps en temps et regarder Qui veut gagner des millions ? une émission que j'apprécie mais que je ne pourrai jamais regarder en présence de mon père. Après la fameuse réplique de Jean-Pierre Foucault "C'est votre dernier mot ?", un éclair de génie me traversa l'esprit : j'allais faire croire à tout le monde que j'avais disparu pour voir si je manquais à ma promise, et j'allais ensuite revenir comme un héros gentleman, et lui préparer un bon petit plat qu'on dégusterait ensemble entre deux cours.

- Alicia Keys, la mouche

Love Is GregouWhere stories live. Discover now