L'amour d'un aristocrate 1/4

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Wastwater, England, 1921.

Des eaux limpides entourées de montagnes vertigineuses, une vue époustouflante depuis sa chambre. Un immense parc ombragé était agrémenté d'une pelouse et d'une orangerie. Les fontaines apportaient quelque chose de pieux et cet endroit avait le don de rendre Louis de bonne humeur à chaque levé du soleil. Le village le plus proche était à plusieurs kilomètres en contrebas, la vaste lande du Wastwater s'étendait à perte de vue.

Louis déjoua le clignement de ses yeux afin de pouvoir admirer ce spectacle le plus longtemps possible sans avoir à rater une miette. Une pluie traversière gifla les prairies verdoyantes. Le vent secoua les grands arbres avec délicatesse. Il faisait frisquet, le printemps peinait à tracer son chemin.

Un soupire de quiétude lui échappa.

Ce manoir à l'architecture élisabéthain était ce à quoi il aspirait. Pourtant, le domaine de quatre-cents hectares ne lui appartenait aucunement; tant bien même qu'il l'aurait voulu.

Après la mort de son père, Francis, il n'était devenu que son successeur dans le métier qu'il exerçait:

Un domestique.

Le voilà fils d'un valet de pied depuis sa naissance. Vingt-et-une années. Dire que Louis n'était à présent pas un habitué des règles très strictes qui régissait la vie entre aristocrates et serviteurs serait un euphémisme.

Son géniteur avait commencé très jeune l'étude et la création de jardins, jusqu'à devenir le jardinier du comte George Wellington lors de la naissance de Louis et la mort de sa femme.

Le Comte était un homme bon et généreux, issue d'une famille aisée et possédant un titre loin d'être coutumier. C'est pourquoi il laissa Louis grandir dans son manoir. Rare se faisait qu'un enfant d'un valet puisse résider dans une grande maison qui avait à son service plusieurs domestiques. Mais le comte Wellington n'y voyait aucun inconvénient, tant que Francis faisait son travail correctement.

Cependant, quatorze heureuses années plus-tard, ce dernier avait fini par démissionner pour consacrer son temps-plein en tant que valet de pied dans une nouvelle demeure, une nouvelle famille. Servant jusqu'à il y a encore deux ans, le comte et la comtesse de Wastwater, jusqu'à sa mort.

Il y laissa comme trace de son passage, Louis. Ce dernier avait donc fini orphelin à l'âge de seulement dix-neuf ans.

Cette demeure n'était autre que la solide résidence familiale des Styles qui occupait une grande majorité de la ville Wastwater, et Louis n'en était donc qu'un domestique depuis sept années.

Le jeune homme était charmé par ce château bâti quelque peu sous terre, aux fenêtres colossales. Ah, et ce bois fracassant et un peu jaunâtre qui donnait à ce lieu, l'effet d'un beau rêve élancé. Mais ce n'était pas ce que préférait Louis à cet endroit.

Cet endroit avait pour trésor le silence. Un silence entraîné par les éclats des vagues et des mouettes.

Il connaissait ce château par-cœur et pouvait y circuler aveuglement. Allant des chambres, aux salles communes, à la bibliothèque et salle de travail jusqu'aux passages secrets qu'avaient tout manoirs; tout cela ne lui était guère inconnu.

Son endroit préféré se trouvait être le salon de musique, qui prenait vie autour d'un piano à queue disponible pour les élans mélomanes de ses supérieurs.

Il chérissait cette pièce car elle se trouvait être très silencieuse lorsque le comte de Wastwater ne l'aménageait pas en tant que salle de bal. Il y passait pratiquement tout son temps libre, assit sur le piano à lire les livres empruntés de la bibliothèque.

OS - LarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant