Les écouteurs dans les oreilles, j'attendais le bus. Même si je n'avais rien bu, je me sentais comme détaché de mon corps. C'était la fatigue. Je me forçais à ne pas fermer les yeux, certain que si je le faisais, je m'endormirais aussitôt. Et j'avais un bus à prendre.
Enfin, je le vis arriver. Avec des gestes machinaux, je montais à l'intérieur, validais ma carte et m'avançais vers le fond. Je me figeais lorsque je le vis, l'homme du bus. Je le reconnus aussitôt, malgré son sweat noir dont la capuche couvrait sa tête. Quelques une de ses boucles brunes dépassaient néanmoins. Encore une fois, il était sur son portable.
Je le vis relever la tête vers moi, alors je m'empressais de m'asseoir à la première place que je vis. Je me mis du côté de la fenêtre et posais ma tête dessus. La vibration de la vitre m'apaisait, tout comme le morceau lent qui passait dans mes oreilles. Une très belle chanson nommée I wanna write you a song. J'avais tellement envie de fermer les yeux...
Après tout, je pouvais très bien les fermer quelques secondes, juste pour me reposer... Je n'aurais qu'à faire attention de ne pas m'endormir. Mais j'étais si fatigué... Je n'avais tellement pas l'habitude de me coucher tard que la moindre sortie nocturne était une tortue. Bon, c'était décidé. Je fermais les yeux, laissant ma tête se reposer totalement sur la fenêtre.
La chanson me donnait l'impression d'être dans un monde à part. C'était si apaisant... Je me sentais sombrer peu à peu dans le sommeil, mais je ne luttait pas, accueillant ce repos bénéfique avec joie.
Je repris conscience lentement. Totalement déboussolé, je clignais des paupières pour stabiliser ma vue et aperçus devant moi le couloir du bus. Je fronçais les sourcils, avant de me passer une main sur le visage. Je m'aperçus soudain qu'une grande main n'avait pas lâché mon épaule.
je tournais vivement la tête en me recroquevillant contre la fenêtre et écarquillais les yeux en voyant l'homme du bus. Il était à côté de moi et je n'apercevais que partiellement son visage à cause de ses cheveux, de sa capuche et de la luminosité relativement faible. Sa voix grave me parvint:
< - Tu descends bien à Freedome street?>
Sa voix... Elle était tellement sexy! Rauque, grave, elle faisait courir des frissons sur ma peau.
Devant ma non-réaction, l'homme me secoua légèrement:
< -Eh! Ton arrêt c'est Freedome street?
-Hein? Oh... Ou...>
Je comprenais enfin de quoi il me parlait. Mon arrêt, celui auquel je descendais. Je me sentis rugir de honte. Il devait me prendre pour un abruti incapable de comprendre une question... Je crus le voir sourire, mais n'en était pas sûr à cause de sa capuche. Il eut un mouvement de tête vers la porte:
< -C'est le prochain. Tu ferais mieux de te bouger.>
Je tournais la tête vers la fenêtre et vis qu'en effet, le bus arrivait vers chez-moi. Aussitôt, je me relevais en vitesse pour l'arrêter. La porte s'ouvrit devant moi et je tournais un instant la tête vers l'homme. Il s'était rassis au son portable.
Étrangement déçu, je sortis lentement et restais un instant immobile. Après tout, à quoi pouvais-je m'attendre? Pour lui, je n'étais qu'un étourdi qui s'était endormi au lieu de surveiller son arrêt. Un soupir m'échappa et je me mis en route.
Je poussai la porte de mon appartement et retins un soupir en voyant l'état déplorable des lieux. Après avoir vu la maison de James, je me sentais misérable... J'ôtais mon manteau et mes chaussures, avant de balancer ma besace sur le canapé-lit. Je n'avais rien mangé de la soirée, mais je n'avais pas faim. De toute façon, une petite recherche dans mes placards me confirmas ce que je pensais. Je n'avais quasiment plus rien à manger, à part les plats de Liam. Et il fallait que je les garde jusqu'à la fin du mois.
Je passais ma main dans mes cheveux châtains, avant de me déshabiller pour mettre un jogging et un T-shirt. Sans entrain, je me brossais les dents, avant de déplier mon clic-clac. La tête vide, je me glissais sous la lourde couette, dans laquelle je m'enroulais comme une chenille, avant de fermer les yeux.
