Toxique

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Kyle Broflovski était furieux, et  encore, c'était peu dire. Voilà deux bonnes heures maintenant que son rival de toujours, Eric Cartman, alias "gros lard", le provoquait. Le jeune roux de seize ans avait une maîtrise de lui-même très approximative sur sa colère, il n'était donc pas exagéré de constater qu'il était à présent fou de rage après le garçon aux yeux vairons, des yeux dans lesquels le juif aimait se noyer à ses heures perdues. Les différentes expressions qu'il pouvait voir dedans le fascinaient secrètement. Mais actuellement, cela ne l'intéressait nullement. Tout ce qu'il voulait était casser la figure à ce petit gros mal-léché. Il s'avança donc vers la source de ses émotions écrasantes, arrachant la clope d'entre les lèvres du pauvre pour la jeter rageusement plus loin. Kenny McCormick râla pour la forme, sachant parfaitement que son ami n'en avait que faire de ses plaintes. Il ne valait mieux pas s'attirer ses foudres dans l'immédiat d'ailleurs. Quand Kyle était dans cet état, il ne fallait surtout pas se retrouver sur son chemin si l'on n'avait guère envie de subir ses coups. C'est qu'il faisait vraiment mal quand il en avait la volonté. Si Cartman ne l'affirmerait jamais à voix haute par fierté, le blond toujours caché sous sa parka orange le disait sans aucune honte. Il fallait savoir reconnaître la valeur du premier de la classe en combat de rue. Une fois fou de rage, les autres ne faisaient plus le poids face à lui. Mieux valait ne rien laisser de tranchant à sa portée dans ce genre de situation, simple précaution. 

Le gros cul n'en menait pas large. Provoquer ce petit salop de juif était son passe-temps préféré, ce dernier ayant du répondant. Se prendre une dérouillé par ce même individu l'était beaucoup moins étrangement. Il détestait le voir emplit de cette haine qui lui était adressée. Cartman avait peur qu'un jour il aille trop loin et qu'il perde définitivement le plus grand. Que serait ce monde sans cet ami si stupide ? Rien. Absolument rien. C'était aussi pour cette raison que le garçon instable mentalement haïssait ces bagarres. Elle signifiait une potentielle rupture entre l'amitié-haine qu'entretenaient les deux. Cependant, ce n'était jamais arrivé encore. Le lendemain, Kyle et Cartman se parlait comme d'ordinaire le matin à l'arrêt de bus, sans jamais mentionner ni s'excuser des actes de la veille. Qu'est-ce qu'ils pouvaient être étranges quand ils voulaient. Stan et Kenny avaient toujours du mal avec cet aspect de la relation qu'entretenaient les "frienemies". 

Il faut dire que les rapports entre le juif et l'atteint du cerveau étaient souvent plus que houleux, laissant très peu de place à un réel lien d'amitié ente eux. Oui, il fallait avouer que leur relation était bien plus toxique que bénéfique pour l'autre, mais ils en avaient besoin. L'un pour ne pas sombrer dans la folie de son esprit tordu, le second pour ne pas péter un câble sur le premier imbécile venu qui jouerait avec ses nerfs, et dieu sait combien il pouvait y en avoir chaque jour. Ils étaient leur bouée de sauvetage respective, aussi étrange que cela puisse paraître. C'était donc pour cela qu'une fois de plus le roux se jeta sur l'enrobé, bien qu'il est perdu du poids depuis qu'ils avaient grandi, essayant de le marteler de coups avec force. La baston éclata alors et un petit groupe s'amassa autour d'eux. Cartman attrapa furieusement les mains de son rival et les lui tordit pour qu'elles lâchent prise, car même s'il été presque apeuré d'avoir poussé le bouchon trop loin, il ne devait rien laisser paraître et sauver sa peau comme il pouvait.

Kyle laissa échapper un petit cri étouffé, mais se ressaisit aussitôt, la rage plus forte que toute. Il dégagea ses mains de la poigne de fer de son ennemi avec violence. Il leva son poing en l'air avant de l'abattre sur le visage de Cartman, pas si surpris de l'initiative du juif. Il avait l'habitude maintenant. Les coups de poings étaient les attaques préférées de l'adolescent avec les coupures au canif. Oui, il ne fallait vraiment pas tenter le diable avec lui. Plusieurs minutes s'enchaînèrent, chacun se défendant contre l'autre. La foule ne voyait plus deux jeunes hommes se battant, mais deux bêtes féroces se livrant une guerre. Broflovski avait clairement l'avantage bien que son nez soit en sang et qu'un énorme bleu trônait sur sa joue pale. Eric ne démordait pas, même avec son coquart violacé, son arcade sourcilière sanguinolente et la trace d'une paire de mains autour de son cou. Ils n'avaient pas fier allure ainsi. Leurs phalanges semblaient être en très mauvaise état à force de frapper le corps de leur rival. A bout de souffle, n'en pouvant plus, ils s'effondrèrent tous deux au sol, au milieu de la saleté et de l'amas de gens qui les observait. Sans plus faire attention à rien, côte à côte, les deux amis reprenaient une respiration correcte tandis que l'adrénaline redescendait. 

Recueil d'OS South ParkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant