Récits

Maman

C'est sa faute si, aujourd'hui, je me retrouve gisant dans la baignoire avec mon sang glissant en grande dose mais petit à petit le long de mon poignet. Jamais je n'aurai cru que tout cela aurait d'aussi importantes conséquences. Il m'a détruite, moi, mon moral, ma famille, mon enfance.

La musique provenant de mes écouteurs m'empêche d'entendre ce qu'il se passe autour de moi. Mon corps ne produisant plus d'énergie m'oblige à les laissés fermer, me laissant dans l'ignorance totale. J'aime cette sensation qui commence à se propager dans mon corps. Ce sentiment de plénitude, d'aise, ce sentiment si réconfortant. Malgré le peu de force qu'il me reste, j'esquisse un sourire du coin des lèvres pour ce sentiment. Je me sens comme aspirée dans un autre monde merveilleux et plein de bonté. Un autre monde... J'aimerai quittée mon corps pour rejoindre cet autre monde si inconnu de tous et pourtant si plaisant.

Tel un Dieu qui exauce ma prière, je me sens partir vers ce monde inconnu...

Un son assourdissant me réveille peu à peu de cet état de nirvana. Ce bruit devient de plus en plus intense pour que je ne puisse l'ignorer. Je m'efforce d'ouvrir mes yeux. Hélas, mon effort fût réduit à néant lors qu'un ressentit inexplicable s'est propagé dans mon corps. Comme si mes paupières étaient collées, à tout jamais, comme si je ne les avais jamais ouvertes...

Un autre bruit résonne dans la pièce, celui des talons de ma mère claquant sur le calage. Ce bruit, ce son, cette mélodie est si douce à mes oreilles. C'est comme si le son assourdissant c'était arrêté d'un coup pour laisser place à cette divine musique. Je reconnaîtrai toujours les bruits de pas de ma mère. A ce son, j'en déduis qu'elle a dû mettre ses merveilleux escarpins lustrer rouge, celles que j'aime tant mais qu'elle déteste. Rien qu'à travers ce geste pourtant si insignifiant, je peux ressentir son amour.

Et c'est à l'instant précis où ma mère me prend la main qu'un sentiment de profonde tristesse et de culpabilité naissent en moi. Malgré mes paupières toujours collées, je sens une longue larme coulée le long de ma joue. Malgré mon incompétence à faire réagir mon corps, mes sentiments prennent le dessus au grès de mon corps qui, lui, voudrait rester endormi pour toujours.

Un son de sanglot étouffer me parvient... Et là je ne peux plus, je craque... Un torrent d'eau jaillissent de mes yeux pour couler le long de mes joues. Tel un miracle, je parviens en papillonnant des paupières à ouvrir les yeux.

Je découvre un monde froid et triste. Le monde froid et triste d'une chambre d'hôpital avec, à mon chevet, une mère aimante pleurant sans arrêt.

La vérité est que ma mère souffre, je me suis toujours promis que jamais je ne la ferai pleurer, souffrir. Que jamais, je ne la décevrai. Hélas, le coût de cet infâme péché est ma souffrance. Ma souffrance d'avoir brisé une telle promesse. Malgré mes efforts je sais d'ores et déjà que jamais je n'arriverai à effacer cette erreur, ou encore l'oublier et la faire oublier des autres.

Ma mère renifle légèrement en enlevant sa main de la mienne pour les passer sur son visage rougi par les larmes. Elle remet quelque mèche rebelle en place pour ensuite afficher un sourire amer sur son doux visage. J'ai songé qu'elle ne m'avait pas encore vue. Mais lorsqu'elle pose ses magnifique yeux bleu océan sur moi, j'ai sus qu'elle était blessée, déçue, dégoûtée, honteuse, énervée. Mais elle avait ce voile de pitié qui cachait les autres. Malheureusement je la connais plus que tout. Chacun de ses sentiments, de ses ressentis je peux les apercevoir, rien qu'en noyant mes yeux dans les siens, où en examinent chacun de ses faits et gestes.

Un seul mot a pu franchir la barrière de ses lèvres avant qu'un long moment de silence s'interpose, un seul mot. Le seul mot, la seule question à laquelle je ne pourrai jamais y répondre. Cette seule question sans réponse qui a fait partir ma mère de cette chambre. Cette seule question qui est si significative, c'est cette question qui a terminé ma relation avec ma mère...

Pourquoi ?