La vie debuta ainsi

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                       Comme tous les hommes et toutes les femmes de ce monde, je dirai même de cet univers, j'ai mes secrets. Pourtant je m'en vais vous les livrer, dans ce récit sans fard aucun. Je débuterai donc mon histoire là où commence tout bon récit qu'il soit de fiction ou autobiographique, je démarrerai donc par le début sans grande originalité. Je suis née un jour ou nuit pluvieuse du mois de Mars d'une année dont vous me ferez grâce, on le sait, demander son âge à une femme est bien impoli. Et même dans un récit comme celui-ci qui se veut dans quelques formes autobiographique, l'intérêt de vous le donner est moindre. Je vous laisse le soin de calculer et rechercher tout ce que vous souhaiteriez sur moi à la fin de ce récit, mais de grâce, laisser moi au moins, le temps de ce récit, d'un peu de mystère. Je vous demanderai aussi de pardonner mes écarts quant à la bonne conduite de ce récit. Après tout, une vie ne pourrait s'écrire sans quelques détours ou digressions. Suite à cette naissance, l'on a rapidement dessiné pour moi un avenir brillant dans le domaine scientifique. A force d'années et de travail acharné, en tout et pour tout huit années pleines, j'ai finalement obtenu d'échouer lamentablement dans ce destin tracé par mes parents. Face à mon aversion pour les matières scientifiques, et aidé par le désespoir de mes professeurs, l'on décida d'une nouvelle orientation pour moi. Encore une fois je n'eus pas la chance de donner mon avis quant à ce nouveau brillant avenir qui m'attendait. Alors âgée de onze ans, je ne me plaignais pas de ce changement d'orientation, persuadée tout comme mes chers parents, que des talents exceptionnels allaient se découvrir en moi dans le domaine des arts plastiques. Domaine vaste vous en conviendrez. Je me lançais donc corps et âme dans cette toute nouvelle vocation. Qui me vaudrait un jour, faute d'être un garçon plein de charme, brillant et sportif, une femme plutôt jolie et assez intéressante pour que l'on daigne apprécier suffisamment sa compagnie. Ce fut à mon grand désespoir un nouvel échec, je pensai pourtant mes peintures de cimetières métaphoriques pleine de charme, elles n'étaient malheureusement pas au goût de Mme Champhon ma professeure de peinture. Une vielle femme, plus vielle probablement que ce monde entier. Elle a fini par nous quitter brusquement. Non pas quelle soit morte, non !, elle a préféré abandonner son poste. Elle craignait que malgré toute sa foi catholique, et sa croix autour du cou de finir par douter de son Dieu à force de me côtoyer. J'étais déjà jeune fille quand je compris que mon point de vue n'était pas tout à fait celui de tout chacun.

                 A chacun de mes nouveaux essais, dans divers domaines comme la musique, le droit ou encore même la religion, tout se soldait par un cuisant échec. Si bien que mes parents souhaitèrent avoir un nouvel enfant. L'idée étant d'avoir un enfant un peu plus capable, un peu plus garçon, ou tout à fait garçon finalement. Ils ne s'étaient finalement jamais fait à l'idée que je sois née femme. Quelle honte, j'étais pour mes parents à cette époque. Ce n'était pas faute d'efforts, j'étais alors pétrie d'un amour infini pour eux qui me poussait à toujours vouloir me surpasser pour gagner leur approbation. Je n'ai gagné cette approbation que bien plus tard quand le petit frère tant espérer est apparu sous les traits d'un jeune cousin très éloigné dont la mère morte et le père trop peu soucieux de lui fit qu'il atterrit chez nous. Je ne dirais pas que son arrivée dans la famille fut la chance de sa vie. En effet, ce fut plutôt ma chance, mon aubaine, ce garçon de quelques années plus jeune que moi a réussi à obnubiler mes parents, toujours plein d'espoirs. Loin d'être un idiot, il a très bien su s'adapter aux demandes toujours plus complexes de mes parents qui petit à petit devenaient les siens. Moi prenant de l'âge, je ne pouvais que savoir apprécier cet oubli momentané de mes parents pour ma personne. C'est à ce moment-là, je le crains fort que je me décidais à me jeter corps et âme dans un tout nouvel univers. Au détour d'un couloir de notre maison qui me semblait toujours immense du haut de mes 13ans, je découvrais une bibliothèque murale qui patientait pleine de poussière. Je n'avais jusqu'alors jamais eu l'occasion de la voir, dû à mes diverses activités qui ne m'avaient étrangement jamais mené vers les livres. Ce sont ces couvertures reliées et colorées qui ont d'abord touché mon cœur d'enfant. A la suite de quoi j'en ai ouvert un puis deux, puis à force d'essais, je découvrais la littérature et son immense pouvoir sur moi.

                      Le premier auteur dont je me suis éprise ne fut pas totalement de mon choix. En effet, nous manquions tragiquement de variété dans notre bibliothèque familiale. Mon premier amour littéraire fut alors somme toute très classique. Je vous épargne mes élucubrations sur cet auteur et ses pairs par la suite. Mais c'est bien ce goût pour la lecture et la littérature qui m'a mené là où j'en suis maintenant. A force de lire et d'attraper toujours de nouveaux livres dans cette bibliothèque je me suis lassée des livres que je lisais et relisais. C'est alors que je me suis décidée à capturer un nouveau livre, jusqu'à présent hors d'atteinte dû à ma taille. J'avais beau grandir à vu d'œil comme pouvait le souligner ma famille, je n'arrivais toujours pas atteindre les dernières étagères, celles qui évidement m'intéressaient le plus. C'est un âge bien compliqué que je vivais là. Je n'étais jamais assez grande ou trop petite. A 13 ans, on est dans un entre-deux quasi insupportable, tout nous est refusé. Même la littérature m'excluait d'une part de sa connaissance. Je me sentais blessée personnellement, même si je ne captais pas toutes les subtilités des ouvrages que j'avais déjà pu lire. J'avais soif de nouveau, de découverte. J'avais tout simplement soif de cette connaissance qui semblait s'attacher à moi et non pas me fuir comme les sciences ou les arts plastiques. Je m'étais finalement résignée à atteindre ces livres. Pour une occasion qui fait défaut une fois de plus à ma mémoire, l'on m'avait offert un livre, neuf et fringant, tout le contraire de ceux que je pouvais trouver dans la bibliothèque. Cet ouvrage m'occupa, des heures, des jours et je dirai même des années.

                        Le second auteur dont je m'étais éprise, était bien évidement cet auteur si neuf à mon regard. Ce livre avait réussi à me faire oublier ceux inatteignable. Qui plus est quand on sait que par la suite mes parents n'ont eu de cesse de m'offrir de nouveaux ouvrages. Ces ouvrages m'occupaient un temps, puisque l'on m'encourageait à les relire, encore et encore. Pendant ce temps mon cousin, qui était finalement devenu comme un frère mais très distant parce que très occupé, brillait dans le domaine des sciences et faisait la fierté de mes parents. Moi j'apparaissais comme une charmante rêveuse, les bras plein de livres et les lunettes au bout du nez. On me croyait plus âgée et ma taille qui ne cessait de s'allonger ce qui n'arrangeait rien. A force de lecture et de relecture, je m'ennuyais de mes anciens auteurs, de leur vocabulaire qui n'avait de cesse d'enrichir le mien, quelques années auparavant. Je repassais devant cette bibliothèque et regardais ces livres avec envie et nostalgie sans bien comprendre ce qui me freinait à en prendre un tout simplement. Il me semblait qu'il n'était pas encore temps pour moi de me replonger dans ces ouvrages qui avaient construit ma pré-adolescente.

MIZOMBIE 

La BibliothequeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant