- Salut grand gaillard ! Qu'est-ce qui t'amène ici ?
La voix rauque s'élève et se perd dans un grand champ d'herbes. Une main se tend mais personne ne répond à ce salut.
- A oui, c'est vrai pas de contact. Toujours aussi hypocondriaque hein ?
La main passe dans une tignasse brune puis lise la barbe qui l'accompagne.
- J'ai mis du temps à te retrouver, râla une voix un peu cassée presque robotisée.
- Désolé mon gars. J'ai déménagé et j'ai oublié de te prévenir. Tout est allé si vite !
La voix se perd sur ses derniers mots, honteuse de son oubli.
- Reste pas là, reprend-elle. Viens voir ma nouvelle maison.
Les deux personnes traversent le champ lentement, l'invité boitant tellement qu'il en rampe. Autour d'eux des yeux comateux les regardent passer peu curieux de la raison de leur présence ici.
- Depuis quand as-tu des animaux ?
- C'est venu avec mon nouveau chez moi. Ce sont des vaches normandes. Elles ont une belle robe hein ?
- Je croyais que tu n'aimais pas les animaux.
- Quand l'effondrement arrivera il faudra bien que je me nourrisse hein ? Donc là j'apprends à m'occuper des bêtes, obtenir du lait et tout le tralala.
- J'avais oublié ton obsession pour la collapsologie. C'est pour ça que tu as choisi ce coin paumé ?
- Ben quoi ? Le Cotentin est parfait pour mon exploitation. C'est sûr, ce n'est pas la même dynamique que Paris mais on s'y fait.
- Pas sûr que tu aies fait le bon choix.
Un ange passe.
- Comment ça ?
- Avec la montée des eaux, tu risques surtout de te retrouver sous l'eau.
Le visage blanc de l'hôte contraste violemment avec le brun chaud de ses cheveux. Il n'a pas le temps de répliquer, ils sont devant la maison. L'hôte s'avance en premier pour ouvrir la porte à son invité qui monte difficilement les marches du perron. En passant la porte, il est tellement grand qu'il se cogne la tête à l'encadrure lui laissant une belle trace sur son crâne chauve.
- Albrix ça va ?
- Oui, oui, marmonne-t-il d'une voix de robot. Ça va passer rapidement.
- Tu veux quelque chose à boire ? J'ai de la bière au frais.
- Volontiers ! Et d'ailleurs comment vas-tu faire après l'effondrement ?
- Mon voisin s'est mis à en faire donc on procèdera à un échange.
Le bruit de la bière brise le silence qui suivit cette déclaration. L'hôte cherche désespérément un sujet de conversation. Seul avec ses vaches, il n'a plus l'habitude des banalités.
- Et comment ça va chez toi Albrix ?
- Toujours la même chose, les mêmes histoires. Thédix m'en fait voir de toutes les couleurs.
- Ah mince... C'est pour ça que tu es venu ?
- Oui. D'ailleurs Charles, ça ne te dérange pas si je reste un peu ?
- C'est-à-dire « un peu » ?
- Quelque chose comme trois semaines ...
- Trois semaines ? dit Charles en recrachant sa bière au passage.
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Nouvelles
De TodoChaque chapitre consiste en une petite nouvelle indépendante. A lire sans modération !