Innocence

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Il est dans la nature de l'être humain de s'imaginer souvent ce qu'il pourrait lui arriver de pire. Sans doute pour éviter que cela ne se produise?

Il est dans sa nature même de penser à la façon dont il préfèrerait pousser son dernier soupire. Sans doute pour que cela paraisse moins pire?

Mais au fond ces prévisions ne sont que des illusions qui prouvent que dans son for intérieur l'homme n'est rien de plus qu'un innocent naïf bercé d'illusions.

Selon moi, la pire des sensations que l'on puisse éprouver est celle où l'on se sent piégé dans son propre corps.

La peur, quelle notion peut être plus concrète que la peur? mais pas n'importe quelle peur. Celle que l'on ne comprend que si un jour nous la vivons, ce que je ne souhaite à personne.

Tu la sens, cette peur? tu la sens qui glisse petit à petit dans chacune de tes veines jusqu'à ce que celle-ci devienne dure comme de la pierre? tu la sens qui fait tinter ton coeur d'un rythme macabre jusqu'à vouloir s'extirper de ta poitrine? tu la sens glisser lentement le long de tes membres tel un serpent ?

Moi je l'ai senti, cette froideur polaire presque insupportable. Tout mon corps devenait dur et raide tel une statue de pierre. À l'âge de l'enfance, méduse m'avait-elle prise dans ses filets, à cet instant?

Non. Et je me suis retrouvée enfermée à double tour. Mon corps était devenu une prison. Bien trop lourd pour mon pauvre esprit en proie à une terreur insoutenable. Le pire dans tout cela? c'est que je pouvais tout ressentir.

Je le sentais, lui, cet être étrange et inconnu qui se glissait entre mon âme d'enfant et la réalité sordide de ce monde pour m'ôter à jamais cette partie de moi que l'on appelait autrefois "innocence", "naïveté" ou encore... "intimité". Mon esprit bourdonnait tel une nuée de frelons asiatiques pris dans une bataille sanglante... mais mon corps, lui, s'était retranché dans les eaux nébuleuses et profondes de cet abîme sans nom. Je ressentais toutes sortes de sensations étranges et interminables... ce serpent qui parcourait chaque petite cellule de mon corps statufié avait fait de moi son nouveau trophée maudit.

Cette danse torturée de mon âme s'est finit quand de ses mains abominables  je me trouvais enfin libérée. Et à la minute ou mon corps se remit à vivre, mon esprit, lui s'est rendu, abandonnant ce combat monstrueux. Une partie de moi s'est envolé telle la colombe de la paix, douce, réconfortante et chatoyante. Oui, la paix c'est envolé à tout jamais, m'abandonnant aux flashbacks insurmontables de cet acte proscrit, à cette torture sans fin qui, marquée au fer rouge sur mes sensations, étouffa à jamais mes désirs légers et mes envies primitives; me ramenant sans cesse à cette prison d'autrefois.

La seule chose qui me restait, c'était le temps. Et la promesse d'un avenir radieux et merveilleux et pur qui me redonnerait le gout de vivre, la joie de me sentir en vie, la tentation de révéler au monde la personne que j'étais.

Mensonges... tout cela ne pouvait exister sans l'alliance parfaite de mon corps et mon âme seulement, il y a bien longtemps de cela que mon esprit s'est effacé. Je n'était plus que de la peau et des os, sans parlé de mon sang qui s'écoule lentement à mesure ou je vous parles

Mon corps redevient rocheux, dans la sombre clarté. Néanmoins, une douce quiétude que j'avais perdue depuis longtemps enveloppa lentement mon coeur blessé et me réchauffa peu à peu, à mesure ou le temps ravageur défilait. Un souffle rafraîchissant, délicat et duveteux s'extirpa lentement de mes lèvres qui se tendaient en un sourire apaisé. une perle saline roulant gracieusement le long de ma joue. M'offrant enfin la paix tant espérée. Le repos intense et bénéfique que désirait tant mon être à la fin de cette lutte si éprouvante... un repos éternel bien mérité.

Écrits FutilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant