SDF. Sans Différences Fatales. 4

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- Ça tourne monsieur...

Je m'avançais vers elle après qu'elle m'ait adressé ces quelques mots prononcés d'une faible voix. Je posais ma main sur son front brûlant. La femme c'était tut. Je sortis un paquet de mouchoirs de ma poche et décidais de nettoyer le nez de la fillette. Cela fait, je mis le mouchoir usagé dans ma poche et pris la petite dans mes bras pour la porter et la couvrir avec les bords de mon manteau.

- Qu'est-ce que vous faites?!

S'affola la soi-disant responsable de la jeune fille.

- Vous êtes incapable de vous occuper d'une enfant de sept ans ou quoi? Elle devrait être dans un lit, au chaud en train de se reposer et non pas en plein milieu d'une foire! Vous avez vu dans l'état où elle est? Mais vous êtes complètement irresponsable! Elle est à peine couverte !

La femme avait baissé la tête de honte et il y avait de quoi. La petite avait directement mis sa tête sur ma clavicule fermant les yeux. J'entrepris de me diriger vers la sortie en ayant assez vu pour aujourd'hui, mais c'est sans compter la tutrice de Minha qui me poursuivait. Je sortis de la grande salle au plus grand bonheur de mes tympans.

- Attendez monsieur Jung, vous ne pouvez pas faire ça ! Vous ne pouvez pas l'amener !

Je me retournais vers elle en plein milieu du couloir désert, fait essentiellement de verre donnant sur des salles de réunions. Mon mouvement fit arrêter brusquement la femme qui me courait après.

- Parce que vous croyez que je vais la laisser entre vos mains ?

Lâchais-je mauvaisement.

- Vous êtes tous des incapables et ne savez même pas vous occuper d'une enfant malade. Elle sort de la rue putain et vous vous trouvez le moyen de la laisser là en plein milieu de ce vacarme en espérant qu'elle se fasse des copains et copines ? Mais vous êtes fou ma parole. Je vous avez prescrit un traitement d'une semaine pour sa grippe qui j'imagine ne lui a pas été administré en plus de repos et voilà dans l'état où je la retrouve. Et vous espérez que je ferme les yeux. Vous êtes complètement à côté de la plaque alors je la ramène avec moi que vous le vouliez ou non. Je suis peut-être en dehors de mes heures de travail, mais le devoir d'un médecin est de sauver ses patients pas de les laisser crever sans aucun scrupule. 

Je me retournais pour partir à grande enjambées et énervé, la petite ne bougeant toujours pas contre mon torse.

- Mais monsieur Jung s'est défendu, c'est comme si vous la kidnappiez !

- Je pense que c'est vous qui mettez le plus en danger cet enfant.

Je ne me retournais pas pour autant et continuais de me diriger vers l'ascenseur alors que je l'entendais toujours courir à petites foulées avec ses talons derrière moi.

- Elle est sensée aller à l'adoption monsieur !

- Alors préparez les papiers et appelez moi quand ça sera prêt.

Elle s'arrêta de courir complètement sous le choc alors que les portes de l'ascenseur se refermèrent sur la petite endormie dans mes bras sous mon gros manteau. Au moins, je suis sûr qu'elle n'appellera pas la police pour kidnapping, mais...

J'ai peut-être été trop loin...

*** 

Voilà trois jours que je ne bouge presque plus de mon lit de carton. J'ai de plus en plus mal, partout. J'ai pourtant fait attention, en général, les maladies quand on vit dans la rue ça ne pardonne pas. J'ai beau avoir pris mes précautions comme je le pouvais, mais j'ai quand même réussi à attraper une de ces saloperies.

J'ai terriblement mal à la tête, je tousse et ais besoin de me moucher, mais je ne peux rien faire contre tout ça. Et ça risque d'empirer dans les prochains jours.

La plupart des gens qui passent sur les trottoirs et qui nous regardent doivent se penser que nous allons survivre à l'hiver, au froid, à la pluie, à la neige, et que l'on ne sera pas malade, car nos anticorps sont renforcés à force d'être confrontés aux maladies qui traînent dans la rue. Mais c'est faux, du moins ce n'est pas pareil pour tout le monde. La plupart des gens comme moi doivent mener une guerre contre tout ce qui pourrait nuire à notre santé voire jusqu'à nous tuer. Mais la plupart du temps c'est en vain, car un de nous mourra de sa pauvreté.

C'est pour cela que nous ne nous approchons pas les uns des autres dans cette rue. Pour éviter de se contaminer entre nous si l'un est porteur d'un quelconque virus. Nous ne sommes pas vraiment soudés ici, on ne s'adresse qu'à peine la parole et si quelqu'un se met dans la mouise c'est son problème. Mais le respect que l'on porte pour chacun est une de nos règles. Notre but à tous n'est pas de se faire la guerre ou au contraire de s'aimer, mais de sortir de la rue. Nous sommes comme des alliés. Il y a une société qui ne nous comprend pas, du moins c'est l'impression que j'ai. Alors nous avons créé la nôtre qui est bien différente de la leur. Nous avons nos règles, nos droits et un seul devoir envers les autres qui est le respect de chacun. Il faut une stabilité dans chaque société. Et celle de la rue ce n'est pas l'entraide, ce n'est pas tout donner à la personne qui en a soit disant plus de chance de s'en sortir, non. C'est être tous sur le même piédestal et s'honorer entre nous.

Bien entendu ces règles sont pour notre rue, ce n'est pas partout la même chose et c'est parfois même pire avec des viols, des vols, des agressions et j'en passe.

Cette aristocratie à été installé par un vieux qui a passé la moitié de sa vie dans la rue. Il savait mieux que personne comment ça marchait. Alors après avoir vu toutes les horreurs que peuvent offrir la pauvreté, il en a déduit ce qui est bon pour nous et à fondé cette sorte de clan. Nous n'avons pas de nom, mais nous sommes assez connus pour notre bonté envers les autres du même registre que nous. Malheureusement, le froid à emporter ce chef il y a apparemment quelques années de ça. 


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⏰ Dernière mise à jour : Jul 27, 2020 ⏰

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S D F.(sans différences fatales)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant