On dit qu'après la pluie...

Chapitre 1 - Constat

Si j'en avale une seule de plus, je deviendrai moi-même une chips.. C'est le troisième paquet depuis le début de la semaine que j'engloutis. Je m'essuie les doigts gras sur mon pyjama floqué Harry Potter en allant jeter le paquet vide dans la poubelle. Il serait temps que j'arrête de faire semblant de culpabiliser.

C'est toujours comme ça !!! Un vrai combat entre la moi motivée qui n'en peut plus de ne plus rentrer dans ses fringues, qui ne cesse de remonter les bretelles à l'autre, et l'autre. La moi trop faible pour refuser à mon corps la malbouffe qu'il réclame encore et toujours. Inlassablement. M'enfin bon quand même, je crois que j'abuse vraiment. Un paquet de chips par jour ça fait beaucoup !! Pourtant j'en ai vraiment assez et tous les soirs, tous les jours, tout le temps en fait, c'est le même cinéma. Grosses et chaudes larmes qui roulent sur mes joues (de hamster dois-je préciser ?) quand je croise mon reflet dans le miroir qui me met face à la réalité de ce corps qui gonfle à vue d'œil. Seulement, il y a toujours cette chose au fond de moi qui m'obsède. Ou devrais-je dire me ronge ? Oui voilà, me ronge et me donne cette impression de vide intérieur que je comble avec mes chips, mes kebabs, McDon's, Couic et tout ce qui me passe sous la main à vrai dire.

Depuis quelques mois c'est comme ça. Je végète. Comme hors de moi-même. Il y a la Yasmine en mode automatique, qui répond aux autres quand ils lui parlent, qui sourit, rit, crie, marche et court. Puis il y a l'autre Yasmine, celle qui voudrait cesser de faire semblant et ne plus avoir à répondre aux autres, sourire, rire, crier, marcher et courir. Elle assiste comme totalement déconnectée, au spectacle donné par le masque pris par l'automate. Deux personnes dans un seul corps.

J'ai tout bonnement perdu l'envie de plaire depuis qu'on a rompu. Bon, ok. Ce n'était pas une rupture. Appelons un chat un chat. Moussa m'a larguée en bonne et due forme. Tout ça pour dire, faire attention à moi pour que les autres me remarquent ne m'inspire pas plus que ça. Même si je n'ai jamais vraiment été très coquette étant de nature simple. Ceci dit, je faisais tout de même quelques efforts pour être un peu plus agréable à regarder. Alors que ces derniers temps, je me laisse aller en enchaînant les paquets de chips, les kebabs, les McDon's, les Couic (qui sont devenus halal pour me faciliter les choses) et tout ce qui me passe sous la main .... Tiens d'ailleurs j'irais bien me prendre un suprême spicy chicken demain !! Et voilà, c'est reparti !! Qu'est-ce que je disais ? IRRECUPÉRABLE celle-ci !!!

Je ne veux pas admettre que cette rupture imposée soit réellement l'élément déclencheur de cette obèse folie. Peut-être serait-il temps que je me l'avoue ?? Commencer par admettre qu'il ne reviendra jamais serait déjà bien. Il faut tout de même rendre à César ce qui est à César, cette sensation de vide ne me quitte plus depuis que Moussa a décidé de rompre nos fiançailles! Pourtant je pensais avoir tourné la page, avoir remonté la pente. Je disais à qui veut l'entendre que j'ai ENFIN réussi à passer à autre chose. Je suis même inscrite sur des sites de rencontres !! Tu parles !!! Plus d'un an et demi que c'est fini, qu'il a choisi de mettre un terme à notre relation et me voilà toujours au même point !! Enfin, presque toujours au même point. Il y a du mieux quand même. Un peu. Dans le sens où je ne mords plus mon oreiller pour étouffer mes sanglots. Même pas quand j'ai appris qu'il a convolé en juste noce il y a tout juste 3 semaines. Deux jours avant son anniversaire. Oui, je me souviens de sa date de naissance et oui, je pense toujours à lui, toujours avec ce petit pincement au cœur qui me rappelle que l'avenir nous promettait une vie radieuse ensemble.

Très vite je me souviens que sa vie c'est avec une autre qu'il la fait aujourd'hui. Faut croire que lui, avec ou sans moi, il l'a sa vie radieuse ensemble. Ensemble, avec une autre. Elle n'est pas moi et surtout, je ne suis pas elle. C'est assez dur de se dire qu'on comptait si peu dans la vie de celui que l'on considérait comme l'homme de sa vie qu'il a préféré tout annuler pour des raisons futiles et en choisir une autre au lieu d'essayer d'arranger les choses. L'égo prend un sacré coup. Au final, je me dis que j'ai rien de spécial, en tout cas pas à ses yeux. Je me rends compte qu'il ne m'aimait pas pour qui je suis. Je remplissais juste des critères de sélection et ça ne suffisait pas. Je me demande si parfois il écoute Vitaa « à fleur de toi » en pensant à moi. L'idée me réjouit et m'attriste à la fois. M'attriste, parceque quand je l'écoute j'ai envie de pleurer en l'imaginant lui, l'écouter en pensant à moi. J'ai mal au cœur pour lui de devoir se réveiller aux côtés d'une autre, alors qu'il souhaiterait que je sois celle qu'il voit à son réveil. Au fond de moi je sais que ça fait un long moment que je n'occupe plus ses pensées, mais l'idée qu'il écoute une chanson d'amour triste en pensant à moi – qu'il pense toujours à moi tout simplement - me réconforte légèrement.

Paradoxalement, je ne pense pas que j'aurais accepté de reprendre notre relation où elle s'était arrêtée s'il était revenu vers moi. Malgré tout l'amour que je lui porte et toute la douceur qu'il m'inspire. Malgré tous les plans et tous les projets que j'avais imaginés pour nous, je n'aurais pas pu redonner une chance à notre histoire. Beaucoup de choses ont été dites. Beaucoup de choses qui ont engendré énormément de rancœur et qui ont brisé cette complicité qui nous unissait profondément.

C'est clair que c'est facile à dire quand tu te fais jeter comme une vieille chaussette sale alors que tu le suppliais autant par écrit qu'en pleurant au téléphone, de vous laisser une chance d'être heureux comme promis.

Enfin bon. Il est temps pour moi de cesser de ressasser le passé. Je ne peux pas rejouer éternellement cet épisode dont l'issue ne va pas changer étant donné la situation. Pour réellement aller de l'avant, il faut que je me concentre sur le futur. À commencer par cet entretien téléphonique que je passe demain.