CHAPITRE 24 ◈ Il suffit parfois d'un seul mot

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   Le sourire cynique de la démone provoqua un frémissement qui se propagea dans tout mon corps. Lilith semblait me dévorer des yeux, comme un prédateur le ferait avec sa proie. Son aura impressionnante grondait autour d'elle. Je ne pouvais empêcher mes mains de trembler en la regardant. Mon corps était si faible... Si impuissant.

   Même Andras qui se tenait à mes côtés peinait à rester debout. Lassée de notre piètre apparence, elle tourna finalement les talons pour faire face à Lucifer et mordit ses lèvres avec désir.

— Vous voilà enfin, mon doux seigneur, murmura-t-elle en se rapprochant de lui d'une démarche langoureuse.

   Ce dernier ricana, heureux de la voir. La démone caressa la joue du Diable et respira son souffle chaud. Elle déposa tendrement ses lèvres sur celles de Lucifer et l'embrassa. D'abord doux et calme, leur baiser devint de plus en plus fougueux. Étonné par la scène qui se déroulait devant moi, je détournai le regard et toussai avec un sentiment de gêne.

— Je te rencontre enfin, Lilith, déclarai-je tandis qu'une étrange chaleur montait en moi.

   Après quelques secondes d'un baiser langoureux, elle se détacha de l'étreinte de Lucifer et essuya le filet de bave sur ses lèvres. Elle m'observa d'un air hautain et dédaigneux. Ses sourcils arqués semblaient juger l'être pathétique que j'étais. Dans mes vêtements en lambeaux et mon corps presque humain, il était vrai que j'avais perdu toute ma prestance de séraphin.

   Je me redressai et levai le menton en arborant une posture plus fière.

— Tu es la première démone des Enfers, n'est-ce pas ?

— En effet, confirma-t-elle en soupirant. Lucifer m'avait prévenu de ton caractère si austère et de ton air méchant. Je vois qu'il ne s'était pas trompé.

   Je grinçai des dents en entendant sa remarque. Elle était aussi insolente que mon frère !

— Que fais-tu donc sur Terre ? m'enquis-je en fronçant les sourcils. Cela fait des siècles que je n'ai pas entendu parler de toi.

— Quand on est enfermé trois mille ans dans les Limbes, ce doit être difficile d'être au courant de l'actualité, répondit-elle avec impertinence.

   Mes pupilles se dilatèrent aussitôt et je grondai de colère. Elle regarda alors Lucifer d'un air innocent et plaça sa main devant sa bouche.

— Oh pardon, j'ai fait une gaffe ? demanda-t-elle en cachant maladroitement son sourire mesquin.

   Mon frère plaça sa main sur mon épaule et ordonna à Lilith de se taire. Elle acquiesça à contrecœur, mais ne protesta pas.

— Vous devez être ici pour une bonne raison, dit-elle d'un air plus sérieux en regardant le corps inerte de Théa dans mes bras. Suivez-moi. Nous devrions discuter dans un endroit plus chaleureux qu'un vieux couloir humide...

*

   L'atmosphère était tendue entre nous. Un silence sinistre régnait et seul le bruit de nos pas dans la terre grasse et boueuse résonnait. Lilith nous guida jusqu'à une porte en bois crasseuse et recouverte de liège. Elle murmura quelques mots, puis la porte s'ouvrit dans un grincement aigu.

   Je découvris une grande pièce remplie d'objets en toutes sortes. Je balayai d'un regard intrigué les murs où de multiples dessins et calculs étaient gravés. Sur les étagères se trouvaient des bocaux contenant des yeux, des cerveaux, des doigts, mais également des objets érotiques et des crânes humains subtilement cachés parmi de vieux livres poussiéreux n'ayant probablement pas été ouverts depuis des décennies.

La Tragédie de l'Ange - T.1 DAMNATIONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant