« Le bonheur qui nous arrive, on le croit éternel. Puis un jour on s'aperçoit que l'un et l'autre se remplace : la souffrance, le bonheur. »
— Paul Perreault— Bonjour, je suis passée hier chercher des cartons, votre collègue m'a dit que vous en auriez aujourd'hui.
— Une seconde je vous prie.
Tandis que la vendeuse s'éloignait, je jetai un regard à Ruben. Ce dernier jaugeait les sacs qui trônaient près de lui.
— Ce sac est super moche, chuchota-t-il à mon attention, il y a vraiment des gens pour acheter ça ?
Je gloussai doucement, tout en espérant que personne n'avait entendu son commentaire. Je lui fis remarquer que beaucoup des vêtements présentés dans la boutique était de goût douteux. De ce que j'avais pu voir, les prix étaient également exorbitants. Mais on n'était pas là pour acheter.
À ce moment la jeune vendeuse réapparue avec sa collègue, et celle-ci nous indiqua de la suivre.
On traversa le magasin qui n'était pas très large mais très spacieux, les portants et étagères étant disposés de manière à ce que l'on ait suffisamment de place pour se mouvoir. À l'entrée de ce qui semblait être une réserve, des dizaines de cartons dépliés étaient entreposés les uns sur les autres.— Combien vous en faut-il ? me demanda-t-elle.
— Euh... On va dire quatre pour l'instant, s'il vous plaît.
On récupéra donc lesdits cartons, et après avoir remercié la jeune femme, nous sortîmes de la boutique, retrouvant le soleil et la chaleur écrasante de ce mois de juin.
— On était mieux à l'intérieur, me plaignai-je, il y faisait frais au moins.
Ruben acquiesça à mes côtés.
— On ramène ça chez toi et on va se chercher une glace après ? me proposa-t-il.
— Ça marche.
C'était donc péniblement que nous remontions la rue, profitant au passage des courants d'air frais provoqués par la ventilation des magasins qui la bordaient de part et d'autre. Heureusement, mon logement ne se trouvait qu'à quelques centaines de mètres de la boutique dans laquelle j'avais réussi à dénicher quelques cartons. J'étais également bien contente que Ruben ait accepté de m'y accompagner, ces derniers étaient encombrants au possible, glissant des mains à tout instant.
Un sourire m'échappa lorsque Ruben se mis à les porter tel un chapeau.— C'est vachement plupatrique, bafouilla-t-il alors qu'on explosait de rire.
— C'est vrai que c'est patrique, riai-je en l'imitant.
Sur cette position plus confortable, on arriva devant chez moi le souffle court et le sourire aux lèvres. Je débarrassai mon acolyte de ses cartons, et m'empressai de les déposer chez moi avant de le rejoindre à nouveau dehors. Mon petit appartement était un véritable chantier depuis que j'avais commencé à le débarrasser, et des affaires de toutes sortes trainaient au sol, aussi je ne souhaitais pas qu'il soit témoin de ce bazar.
— On va la prendre cette glace ? questionnai-je, le visage reflétant un air d'envie.
•
Assise à la terrasse d'un petit café-restaurant qui se situait au milieu d'une rue piétonne de la capitale, je savourais une coupe glacée au goût fruité. Ruben avait finalement opté pour une gaufre nappée de chocolat, bien que j'ignorais comment il pouvait manger ça par cette chaleur. Cette année marquait une forte canicule et le thermomètre avoisinait très facilement les 40 degrés Celsius. Le soleil brûlait ma peau, l'air était irrespirable et étouffant, si bien que je ne m'éternisais jamais longtemps dehors. Je n'avais aucune envie de me retrouver enfermée entre les quatre murs de mon petit appartement, mais à choisir il y faisait franchement meilleur qu'ici, ce qui faisait pencher la balance.
— Alors, comment ça va avec ton copain ? interrogeai-je Ruben, rompant ainsi le silence qui avait pris place.
À ma surprise, il haussa les épaules d'un geste qui se voulait désinvolte, le regard presque fuyant.
— Ça va bien, éluda-t-il.
Mais je n'étais pas dupe, alors j'insistai jusqu'à ce qu'il lâche soudain le morceau.
— On n'est plus ensemble.
— Mais pourquoi ? Ça allait bien jusqu'ici pourtant non ?
— Bah c'est ce que je croyais aussi, il ricana l'air amer, mais ça l'a pas empêché d'aller voir ailleurs pour autant.
Ma bouche s'ouvrît légèrement, marquant mon étonnement. J'assimilai la nouvelle quelques instants avant de lui répondre.
— Comment t'as su ?
Ruben reposa ses couverts dans son assiette, s'essuya les mains avec sa serviette en papier, et releva son regard vers moi. Il semblait à mi-chemin entre le désarroi et la colère.
— Il m'a trompé avec une de mes anciennes relations, un mec avec qui je suis toujours en contact. C'est lui qui m'a annoncé que mon « copain », dit-il en mimant les guillemets avec ses doigts, le draguait par message.
Je hochai la tête afin de l'inciter à poursuivre.
— Enfin bref, reprit-il après avoir avalé une gorgée d'eau, j'y croyais pas trop au début mais mon ex me l'a prouvé en acceptant de l'inviter chez lui. J'étais là quand il est arrivé, autant dire que sa tête affichait clairement combien il était surpris de me voir.
— Il s'est passé quoi ensuite ?
— J'étais énervé, sur le coup je suis simplement parti sans rien dire. Je suis retourné le voir à son appart quelques heures après, on s'est engueulés comme pas possible, c'était n'importe quoi. Il m'a même avoué que c'était pas la première fois qu'il cherchait à aller voir ailleurs.
Je laissai échapper une exclamation de colère. Quel culot franchement !
— Non mais quel con ! Il s'est même pas excusé ou que sais-je ?
— Ouais, grimaça Ruben. Bah il m'a sorti le discours habituel, du genre « j'ai besoin de temps pour changer, faut que t'aies confiance en moi », etc.
— Comment est-ce qu'il peut croire que tu auras encore confiance en lui après ça ?
Encore une fois, il haussa les épaules avant de me répondre.
— Au final je l'ai insulté, je lui ai dit ce que j'en pensais de son comportement et je me suis barré. Du coup tu vois, on n'a même pas officiellement rompu.
— C'est rien ça ! De toute façon t'as plus intérêt à retourner le voir ce gars, il en vaut pas la peine.
Il opina d'un air peu certain.
— Allez t'en fais pas ça ira ! souriai-je pour le convaincre. Bienvenue dans le club des célibataires, tu verras c'est pas plus mal d'un côté.
— Mais au moins toi t'as eu le courage de rompre quand il le fallait, ronchonna-t-il.
Il semblait en colère davantage contre lui-même plutôt que contre celui qui l'avait blessé. Je pouvais comprendre malgré tout.
Mais était-ce vraiment courageux de rompre ?Un nouveau chapitre dans lequel nous pouvons faire connaissance avec Ruben !
N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé 😉
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Fais sourire ton cœur
General FictionÀ dix-neuf ans, Léona est déjà fatiguée. Alors qu'elle recherche un semblant d'authenticité dans un monde qu'elle ne comprend pas, elle finit par tout quitter pour recommencer de zéro. D'étudiante pleine de rêves à caissière désillusionnée il n'y a...