Chapitre 10

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— C'est toujours pareil, fais toi une raison. J'espère que le jeune aura pensé à nous.

— J'espère.

Le silence s'étire un moment, puis le bruit de la musique envahit l'habitacle.

— Toujours Jennifer Lopez ?

— J'aime bien cette chanson.

— Tu fais plus que l'aimer, tu l'écoutes tout le temps.

Je ne suis pas vraiment rassuré quand j'entends la chanson « I ain't your mama ». Elle a un truc contre les hommes cette nana, j'en mettrais ma main à couper. Et ça, c'est pas super bon pour moi. Surtout si elle me découvre caché derrière son siège, comme un violeur attendant son heure. Mouais, vraiment pas bon.

— Il était encore là, ce soir, relance Sunny.

— Hum.

— Ne me la fais pas à moi, je sais qu'il te plaît. Il te regarde comme si t'étais un cornet de glace. Si un mec me regarde comme ça sans jamais rien me demander, je crois que je ne pourrais pas le repousser. Il est fou de toi, c'est évident. Pourquoi le rejettes-tu ?

— Je ne le repousse pas.

— Ah ouais ?

— Ouais. C'est lui qui me fait la tête. Il a dû se sentir diminué, j'sais pas.

— Il est mignon dans son genre. Toutes les filles craquent sur lui tu sais. Elles le regardent comme des affamées. C'est pas tant sa belle gueule en fait, mais cet air sombre qu'il trimbale en permanence est terriblement excitant. Et sa façon de te regarder, c'est torride ! On a toutes envie qu'il nous regarde comme ça.

— Toi aussi ?

— Bien sûr ! Je suis certaine que c'est un bon coup, en plus.

Viviane a un petit rire.

— Il a tout ce qu'il faut où il faut, faut dire. Sa peau est la plus douce que j'ai jamais touchée. Et il est... tendre.

— Tendre ? T'es pas cap de le refaire encore une fois, avoue. T'as peur d'être déçue, ou pire d'avoir des sentiments, pour une fois ?

— Bien sûr que si, je suis cap. C'est pas moi qui ai un problème, c'est lui. Je jouis pas, ben je jouis pas. Qu'est-ce que j'y peux, moi ? Il est incapable de prendre son pied et faire avec ? Je ne vais pas simuler pour soulager son pauvre ego, si ?

Serait-il envisageable qu'elles soient en train de parler de moi ? Non, impossible. Belle gueule, regard torride, bon coup, mignon : c'est forcément un autre mec. Je ne suis pas du genre modeste, mais quand même plutôt réaliste. Bon, que j'ai de la concurrence, ce n'est pas nouveau. Il va falloir que je sache qui est ce mec, ce putain de rival ! La jalousie me saisit, m'emplissant d'un froid tenace. Ça fait super mal. Pourtant, je n'ai pas le droit de ressentir ce sentiment, je suis invisible pour elle. Ce fait a beau me désespérer, c'est ainsi. On roule déjà depuis un petit moment... où va-t-on ?

— C'est ça, bien sûr. Pas cap, c'est tout !

— Va te faire voir !

Sunny glousse, et le silence s'installe pendant de longues minutes.

— Sun, hey Sun, réveille-toi.

— C'est bon, grogne celle-ci la voix endormie. On est arrivées ?

La voiture se déporte sur la droite. Elle manœuvre pour se garer.

— Oui, tu y vas pendant que je reste en double file ?

— Ah non, vas-y-toi. Il te mange dans la main, au moins on aura une chance d'avoir de quoi se restaurer.

— T'exagères, si tu n'y vas jamais comment tu peux savoir ? Il se comporterait certainement de la même manière avec toi.

— C'est ça, bien sûr. Et le bon Dieu porte une culotte de velours !

— Quoi ?

— Je me comprends. Allez, vas nous chercher à manger, j'ai faim. Je surveille la bête.

— Ce que tu peux être défaitiste par moment.

— Je vais faire semblant de croire que t'as pas dit ça.

Viviane s'agite sur son fauteuil. Le bruit caractéristique de la ceinture de sécurité qui se rétracte raisonne. Je suis si près d'elle que son parfum m'enveloppe. En tendant la main je pourrais toucher sa cuisse. J'imagine le bond qu'elle ferait, et me calme immédiatement. Pas de gestes inconsidérés, Max.

— Bon, c'est bon ! J'y vais.

— Merci beaucoup !

Elle s'éloigne, et je n'ose pas regarder. Elle discute avec les autres qui ont dû suivre en voiture, pour savoir ce que chacun désire. J'entends les mots croissants, pains au chocolat et chaussons aux pommes. Une halte à une boulangerie. Ils doivent avoir trouvé la seule ouverte à cette heure-là. Effectivement, il risque fort de ne pas y avoir grand-chose à acheter. Donc le mec qui lui mange dans la main, selon les dires de sa copine, est le serveur. Elle ne m'a pas semblé être plus intéressée que cela, mais à force d'aller chercher des viennoiseries chaque vendredi, des liens peuvent s'établir. Je pourrais leur faire toute une fournée, si elle voulait. Cela lui épargnerait de venir jusqu'ici pour quémander les restes.

Le joli rire de Viviane résonne jusqu'à moi alors qu'elle remonte en voiture, de toute évidence très satisfaite d'elle-même. Une odeur de croissants chauds envahit l'intérieur du véhicule et l'une d'elle fouille dans le sac. La voiture démarre.

- Alors, tu as tout ?

- Il nous avait mis des pains au chocolat de côté, car il n'y en avait plus. Il est vraiment chou !

Chou ? Mais il y a combien de mec qui lui plaisent, à cette fille ?

- Tu comptes lui offrir une partie de jambes en l'air pour le remercier de sa gentillesse ?

On ne peut pas dire qu'elle ne mette pas les pieds dans le plat cette Sunny. La réponse m'intéresse, et je retiens mon souffle pour écouter la suite.

- Il n'est pas comme ça.

- Ah non, il n'apprécierait pas ?

Je n'aurai pas mieux dit. Sunny est en passe de devenir ma meilleure amie.

- C'est encore un gamin.

Mouais les gamins, c'est les pires.

- Et sinon, ça t'as déjà arrêté ?

- Non.

Putain de merde ! J'ai les poings serrés, tellement je suis à cran. Je vais te faire oublier ce gamin moi, non mais !

- Des fois, je me dis que ça doit être génial d'être toi. Adulée et vénérée par tous. D'avoir une armée de mecs prêts à tout pour toi. De faire ce que tu veux tout le temps, sans te soucier de l'avis des autres, sans rendre de comptes. Ouais, des fois, je me dis que ça doit être vraiment le pied.

- Ce n'est pas le trip que tu imagines.

Intéressant. Arrivés à destination, tout le monde descend. Je profite du bruit ambiant pour me faufiler hors du véhicule et me planquer derrière un buisson tout proche. Nous sommes dans ce qui semble être un jardin, et filles comme garçons se rejoignent devant l'entrée d'une maison. C'est l'un des hommes, BCBG, petite barbe à la mode, lunettes, propre sur lui, rien à dire... Le genre qui pue le fric à dix kilomètres à la ronde. Le genre devant lequel je n'ai aucune chance. Il leur ouvre la porte d'entrée. Concurrence déloyale s'affiche en gros dans mon cerveau.

- Allez, mauvaise troupe, vous connaissez la maison : faites comme chez vous ! Ceux qui veulent rester dormir, merci de prévenir.

Dormir ? J'espère que Viv ne va pas dormir ici, chez Monsieur "propre sur lui".



# Suite des aventures amoureuses de Max qui tente de connaître la fille qui lui plaît :)

Bon week-end ! #

Je te déteste aussiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant