Louis Island

Chapitre 3 : Le bayou

(Illustration : maison de Chase)

Point de vu de Chase 

Le soleil perçait déjà à travers les persiennes en bois. Je me levais et passais une main dans mes cheveux emmêlés. JJ était toujours endormi sur le matelas au milieu du salon. Attrapant la cafetière j'en vidais son contenu dans une tasse que je mis au micro-onde. Je me dirigeais à l'extérieure, la vieille porte grinça en se refermant. Pieds nus je m'avançais vers le marais. Je dépassais le vieux van de mon père. Ma mère avait disparu quand je devais avoir 10 ans. Elle serait en Floride à se couler des jours paisibles avec un riche vieux bouffon. Mon père m'avait gardé avec lui sur l'île. Il n'avait pas vraiment eu le choix. Aujourd'hui c'est lui qui m'avait quitté, ça fait bientôt un an. Je ne sais pas grand-chose. Un matin la police a débarqué pour me dire que mon père avait été retrouvé mort. Les enquêteurs avaient parlé d'un suicide mais je n'y croyais pas vraiment. Ce n'était pas le genre de mon père. Enfin le suicide est-il vraiment le genre de mort d'un type de personne ? Je ne pense pas. On se dit toujours que ça arrive aux autres jusqu'au jour où ces autres deviennent nous, moi. Depuis je me débrouillais seul. J'avais entamé une mesure d'émancipation pour éviter d'atterrir dans un foyer mais c'était mal barré vu mes conditions de vie. Heureusement JJ, Pope et Joanne sont là. Ils sont ma famille. JJ est comme moi, un peu paumé dans sa vie. Sa mère est morte en le mettant au monde et son père est un ivrogne violent et incapable. Pope lui est l'intello de notre bande. C'est lui qui s'en sortira le mieux. Et puis il y a Joanne. Que dire ? Aucun de nous trois ne sait vraiment pourquoi elle traine avec nous. Elle ne vient pas du bayou contrairement à JJ, Pope et moi. Sa famille est plutôt riche, ce n'est pas la plus riche de l'île mais elle s'en sort très bien. Ses parents ne comprennent pas non plus ce qu'elle nous trouve. Ça doit surement coller à ses convictions anarchistes et écolo. JJ a essayé de sortir avec elle mais Joanne l'a clairement recalé. C'était un instant magique. Depuis elle avait instauré une règle qu'on avait tous accepté. On ne devait pas essayer de sortir avec elle, pour notre amitié. Je voulais rester ici, avec eux. Mais pour ça il fallait que je prouve aux services sociaux que j'étais capable de subvenir à mes besoins. Je fini mon café et rentrais. JJ dormait encore ce faignant. Il allait encore arriver en retard à son travail. Il bossait comme livreur pour l'épicerie du coin. Ce n'était pas cher payé mais c'était du travail. Sur l'île tout travail est bon à prendre car rare. Je pris une douche, enfilais des vêtements corrects puis montais dans le van. Direction le nord de l'île, dans les riches plaines peuplées de colons ultra friqués. Il fallait que je me dégote un travail.

J'avais déjà proposé mes services à six propriétaires et aucun d'eux n'étaient disposés à m'offrir un travail. Je commençais presque à attendre avec impatience la période des tempêtes. En détruisant tout sur leur passage elle offrait du travail à tous les habitants. J'arrivais devant le 16 Lyons Street. Je n'avais pas revue cette fille depuis l'incident avec James. Je garais mon van le long de la rue et descendis. En arrivant près du porche j'aperçu trois garçons. De loin je n'arrivais pas assez à les distinguer pour pouvoir les reconnaitre. Si j'avais su que c'était Ambrose et Davis j'aurais fait immédiatement demi-tour. Maintenant c'était trop tard.

-Tiens mais voyez qui voilà ! s'écria Ambrose.

-Qu'est-ce que tu viens faire là minable, cracha Davis.

-Ça ne vous regarde pas mais je viens juste chercher un job les gars, je ne veux pas d'embrouille, dis-je en levant les mains.

-Tu es qui ? demanda le troisième que je ne connaissais pas.

-Toi tu es qui ? dis-je sur la défensive.

-Je suis le mec qui vis ici clochard, grogna-t-il.