Chapitre IV

169 22 1
                                    

Damien

Quartier des affaires, Montréal, 15 août 2019 - 2 h 00

Damien fixait sa tasse de café, le regard vide, alors que seule la lune éclairait la cuisine américaine dans laquelle il s'était installé. Boire du café quelques minutes avant d'aller se coucher n'était pas la plus brillante des idées qu'il avait pu avoir durant son existence, mais au point où il en était... Une heure qu'il était rentré de son escapade à la Speed&Victory et il ne réalisait pas encore qu'Alexandre était de retour à Montréal. Durant leurs conversations téléphoniques, son ex-petit ami n'avait pas émis le moindre indice sur son désir de revenir au Québec, au contraire. Et là, à une finale de course clandestine, il était réapparu, tout sourire et... debout.

C'est une très belle surprise de sa part, certes. Mais bon, j'aurais aimé l'accompagner, le soutenir et surtout, être présent lorsqu'il avait recommencé à marcher. L'encourager et le motiver par téléphone sont une chose, mais être physiquement avec lui dans ces durs et épuisants moments en est une autre.

Évidemment, il était heureux pour lui, mais cela lui faisait quand même un pinçon au cœur. C'était frustrant. Il soupira et fit disparaître les quelques larmes qui coulaient. Alexandre était de retour à Montréal et il ne fallait plus se remémorer le passé, d'autant plus que sa présence dans la ville signifiait une excellente nouvelle : à présent, il devait certainement mieux accepter sa sexualité, quelle qu'elle soit, et surtout, assumait ce qui s'était passé entre eux.

D'ailleurs, peut-être qu'avec le temps, on pourrait sûrement retisser des liens solides. Une amitié, c'était mieux que rien.

Soudain, le bruit d'une porte s'ouvrant et se refermant instantanément se fit entendre depuis le couloir de l'entrée. Il sursauta légèrement et, par pur réflexe, prit entre ses mains son mug à présent froid et attendit patiemment que Sofiane passe devant la pièce. Ce dernier fut on ne pouvait plus surpris de le voir encore debout à cette heure plus que tardive et cela se vit sur son visage, ce qui, en ce qui concernait Sofiane, était de l'ordre de l'exceptionnel : la physionomie de son colocataire était habituellement aussi expressive qu'un rocher. Seuls ses yeux témoignaient d'une humanité.

C'est relativement ironique étant donné qu'il a un caractère versatile.

- Pourquoi n'es-tu pas en train de dormir ?

Damien leva les yeux au plafond. Sofiane le vit et il le reprit immédiatement, agacé :

- Ne fais pas ça, c'est impoli !

Là, sa voix montra davantage son accent venant des pays orientaux. Sofiane était originaire d'Algérie et vivait au Québec depuis seulement cinq ans, même s'il faisait énormément d'aller-retour entre le Canada et son pays natal pour rendre visite à toute sa famille vivante là-bas. Comme Sofiane était lunatique, il ne prêta pas attention à son changement d'humeur et préféra même l'ignorer. Il lui souhaita une bonne nuit et monta au premier étage. Sa chambre étant adjacente à l'unique salle de bain de l'appartement, il entendit l'eau couler alors qu'il se déshabillait.

***

Il se réveilla à neuf heures. Il bondit du lit en découvrant l'heure. Normalement, le samedi il ne travaillait pas, mais il avait des dossiers à finaliser et il avait promis à son patron de se rendre au bureau à dix heures. Il se lava et s'habilla en vitesse, puis il sortit dans le couloir. Lorsqu'il descendit l'escalier vêtu d'un peignoir qui dissimulait son caleçon - afin de respecter l'unique règle de Sofiane qui concernait la pudeur - il vérifia les notifications sur son cellulaire. Il le rangea dans l'une des deux poches de la robe de chambre quand il entra dans la cuisine où son colocataire prenait son petit-déjeuner, déjà habillé de son smoking gris. Il lisait le journal avec une tasse dans la main. Des croissants étaient également posés sur la table en face de lui. Damien soupira, se préparant mentalement à la multitude de questions qui allait être posée (posées ?) sur le fait qu'il n'était pas encore couché à plus de deux heures du matin la nuit précédente. Puis il prit son courage à deux mains et se versa du café avant de s'asseoir en face de Sofiane. Ce fut à cet instant que celui-ci décida de rompre le silence des lieux en déposant son journal sur la table :

The Past, T2 : le chemin de la rédemption (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant