Fours y-tout (j'suis pas ta mère..!)

Une Histoire De Ratés // 2

Ses pas résonnent bruyamment autour de lui. Il est encore tôt.
Le soleil le devance à son front, perlant tout juste à l'horizon du paysage.

Eddie a chaud. Il semble en tension, mais continu à courir aussi vite qu'il le peut. Comme éprit d'une énergie inépuisable, qu'il ne peut contrôler. Il est terriblement frustré. Et la réflexion de cette raison lui fait accélérer le pas. Comme une peur inquiétante qu'il faut qu'il évacue à tout prix.

Il ne courre jamais habituellement. En tous cas, pas depuis les six derniers mois qui ont précédé sa renaissance. Il n'a revu aucun des ratés depuis leur séparation à Derry. Lui a repris son boulot comme il se devait de le faire, reprenant le court de sa relation maritale comme un droit et honnête citoyen. À une différence près : Il ne peut plus se forcer à y survivre.

Il ne parvient plus à faire face à son propre mensonge. Myra était devenue insupportable. Son boulot lui plaisait ; mais le tout réuni lui parait bien amer. Il s'était donc mis à courir pour franchir le cap.
Pour se défouler un peu, trouver des instants de répits. Au moins, il sait qu'elle ne lui demanderait jamais de l'accompagner.

Un an que tout s'était produit, il se le répétait plusieurs fois depuis le début de la matinée. Il n'arrivait pas à le croire. Il avait passé vingt ans de sa vie assez facilement, ne pensant pas un seul instant à ces moments passés avec eux. Et là, il ne pouvait tenir à peine une demi-année. S'en était presque dépitant. 

Il voyait souvent des articles de presses passés, notamment sur internet ou dans les journaux. Des nouvelles concernant les membres du groupe. Mike quant à lui, faisait parvenir ses nouveautés depuis son installation à Miami.
Ils semblent tous si épanouis. Eddie en retirait un avant-goût amer.

Il buffle violemment. Pour autant, il continu sur sa foulée et relève la tête vers son poignet. Cela faisait maintenant une bonne heure qu'il arpentait le petit chemin de goudron désert. Plongé dans l'aurore, il était toujours seul. La pensée de savoir comment il allait faire pour tenir la journée lui traverse l'esprit, mais il ne se penche pas plus sur la question.

Cette dernière le terrifie. Et comme pour lui répondre, il accélère la cadence. Cela ne fait pas taire ses pensées, mais il peut tout de même se concentrer davantage sur son effort physique.

- Eddie-Chou ? 
Il exulte un soupir de dépit. Comment diable est-ce possible de l'énerver à ce point ?
Sa femme s'avance vers lui. Son pas lui semble encore plus lourd qu'à l'intitulé. Elle a les yeux rougis, comme au quotidien depuis quelques semaines.

Elle sait que son mari part pour le weekend entier avec ses amis d'enfances. Tout ça, ce n'était pas prévu dans son programme. En tous cas, pas depuis les dix dernières années de leur relation conjugale.

Elle en est malade. Et puis, elle sent bien depuis son retour, Eddie n'est pas naturel. Ce n'est pas lui. Tout du moins, pas pour elle.

Elle ne bouge plus, attendant une réponse de la part de son mari à ses lamentations. Mais celui-ci ne fait rien, si ce n'est la regarder. Puis, il passe à côté d'elle et se dirige vers la salle de bain. Myra ne sait quoi répondre, après quoi elle éclate en sanglot. Elle sort sa dernière carte, et Eddie ne peut que se raidir.

Il est incapable de bouger, à mesure que la jeune femme s'effondre sur elle-même.

- Mon dieu, Eddie... Balbutie-t-elle entre ses doigts boudinés. 

Eddie en ressent un nouveau pincement au cœur. Ces gémissements lui font aussitôt penser à ceux de sa propre-mère. Comme un mauvais flash. Ses poings se resserrent dans un mouvement rapide.