Dancing Our Fears [EN PAUSE]

01. LANA

♫ taylor swift – vigilante shit

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Une semaine plus tard...

D'un geste appliqué, je finis du bout des doigts d'attacher les dernières mèches brunes de mon chignon, puis plaque le tout avec un peu de laque. Je veille à ce que le spray ne se diffuse pas sur mon justaucorps noir, puis commence à sortir de mon sac mes chaussons. Comme chaque mercredi soir, j'ai pris pour habitude d'arriver volontairement en avance, de sorte de pouvoir répéter ce même enchaînement d'actions et tout ceci, sans n'être dérangée par personne. Tenue, bouteille d'eau, coiffure, retouches maquillage, échauffements. Voilà à quoi se résume ma routine avant chaque cours de danse. J'aime que tout soit impeccable, et ce, depuis maintenant quinze ans que je me suis inscrite dans cette école. Pas le moindre faux pas, pas la moindre entorse au règlement au fil des années. Toujours rester dans les codes. C'est définitivement la clé du succès ici.

Je relève le menton fièrement, jette un œil au miroir et souris. Le reflet dans la glace face à moi me renvoie l'image d'une jeune fille forte. Conquérante. Froide. Confiante. Tout simplement parfaite. Je ricane. C'est tout moi, finalement. Il faut dire que cette image, je l'ai façonnée durant des années. J'en ai contrôlé chaque parcelle, chaque infime poussière qui s'ajoutait à l'ensemble du masque, jusqu'à ce que j'en sois pleinement satisfaite. Jusqu'à ce que j'ai enfin établi mon empire. Et que je me sois vengée. Je n'ai pas eu besoin d'apprendre à aimer cette image. Juste à l'accepter et à en prendre soin. Depuis toute petite, elle fait partie de moi. Le travail, les sacrifices, les douleurs et les nombreuses longues heures de répétitions n'ont fait que la forger davantage, et sculpter mon corps et mon mental selon les objectifs toujours plus exigeants de la discipline, mais aussi ceux que je me fixais, pour toujours me challenger et progresser à titre personnel.

J'inspire. Expire. Gonfle ma poitrine d'air et de confiance. D'autres danseuses, un peu plus jeunes, m'ont rejoint dans les vestiaires. Je les ignore et vérifie une dernière fois ma coiffure. Ne la trouvant pas assez plaquée et étirée à mon goût, j'y accroche quelques ultimes pinces, puis sors de mon sac mon tube de rouge à lèvres préféré. Le Dior 724 Tendresse mat. Celui que mon connard de beau-père m'a offert lors de mon précédent anniversaire. Comme si dépenser son fric en m'achetant des cadeaux, tous plus chers les uns que les autres, allait le pardonner de m'avoir pris mon père il y a une dizaine d'années. Mais soit. C'est son choix après tout, je vais le laisser croire ça. Si ça lui plaît de s'enfermer ainsi dans ses illusions, autant qu'il reste dans le déni, j'ai envie de dire. C'est de sa faute, après tout...

En tout cas, rien que la référence de ce tube me fout la gerbe. Ça me fait doucement rire aussi. Ironiquement bien sûr. Mon beau-père me l'a offert en disant que la couleur s'assortirait bien avec la carnation de ma peau. Sous-entendu, ce tube de rouge à lèvres lui a fait penser à moi et il a décidé de me l'offrir. Comme si le mot « tendresse », ça me correspondait, tiens. La bonne blague, genre. J'ai pas besoin d'être tendre dans la vie, putain. C'est pas la tendresse qui apporte le succès et la gloire. Au contraire, ça rend faible. Ça attire seulement des problèmes. Des obstacles au moment d'accomplir tes rêves. Et moi, c'est pas cette vision-là que je recherche de la vie et que j'attends d'elle. Alors son putain de rouge à lèvres, il peut bien se le mettre où je pense. Après tout, il faut dire les mots tels qu'ils sont. Tant pis pour la vulgarité. Et tant pis si ça choque quelqu'un. Je m'en fous. La provocation, c'est quelque chose que j'aime bien. Même si ça fait de moi une putain d'hypocrite manipulatrice, je m'en fous aussi. J'ai pas leur temps. Qu'ils aillent tous se faire voir.