Je ne suis pas à vendre [EN PAUSE]

Chapitre 19

Harry fixe un instant la cheminée dans laquelle Draco a disparu.
Le coeur battant, mais douloureux, il hésite à suivre le blond chez lui. Il fait un pas en avant puis se ravise finalement de passer dans le réseau.
Après tout, ils ont tous les deux besoin de réfléchir.
Harry se retourne. Il hume doucement l'air.

Il n'avait jamais vraiment pensé à faire entrer Draco dans sa vie intime.
Mais le fait qu'il sente son odeur via l'amortentia l'a totalement perturbé.
Il est vrai qu'il ait rêvé de lui une fois... et il ne pouvait nier l'érotisme flagrant de ses pensées.
Mais il ne pouvait pas dire s'il ressentait de l'amour ou juste une profonde attirance physique.

Lorsqu'il était à Poudlard, il était persuadé être amoureux de Severus. Mais aujourd'hui, il n'est plus du tout sûr de ce sentiment.
Peut-être que la nuit lui portera conseil.

***
Harry se réveille en sursaut en entendant un vacarme venant d'en bas.
Il attrape sa baguette et se précipite dans les escaliers qu'il dévale à toute vitesse.
Arrivé en bas, il entend des éclats de voix.

-Ron! Tu ne peux pas débarquer comme ça un samedi matin! Harry doit être en train de dormir!
-Ça va Hermione, on va l'attendre dans le salon.
-Non, on va rentrer et revenir cet après-midi !

Harry se met dans l'encadrement de la porte et croise les bras.
Hermione, qui le remarque en premier, se redresse.

-Harry! Comment ça va?
-Bien et vous?
-Tu es tout seul?

Harry lui lance un regard exaspéré.

-Oui Hermione, je suis seul.
-Oh, il n'est pas resté ? Même pas pour discuter?
-On allait pas discuter toute la nuit. Et puis, on parle de Draco là. Tu croyais vraiment qu'il allait rester?

Harry s'assoit sur un fauteuil.

-Ça va vieux? lui demande Ron.
-Oui ça va. Je suis juste un peu fatigué.
-Désolé si on t'a réveillé.

Ron et Hermione s'assoient sur le canapé.

-Donc il ne s'est rien passé hier soir? demande Hermione.
-Non, rien du tout.
-Mais vous avez bien discuté ?

Harry ne répond pas.

-Vous n'avez pas discuté, en conclut Hermione.
-Pas vraiment. Ni lui ni moi étions prêts à avoir cette discussion, Hermione. Je ne suis même pas sûr de ce que je ressens!

Kreattur apparaît de suite après, sans laisser le temps aux deux autres de répondre. Il jauge Ron du regard avant de se tourner vers Hermione.

-Kreattur a besoin de la sang de... de Mademoiselle Granger pour l'aider dans la cuisine.

Hermione hésite mais Ron l'encourage à y aller. Elle finit donc par se lever et suivre l'elfe de maison.
Les deux garçons se retrouvent seuls.

-Tu voulais me parler Ron?
-Ouais...

Ron se lève, fait un tour autour du canapé en se frottant les mains avant de se rasseoir.

-Je sais qu'il m'arrive parfois de me comporter comme un idiot. Je sais même que certains me prennent pour un idiot...
-Tu n'es pas un idiot, Ron. Sans toi, je n'aurai jamais pu arriver là où j'en suis.
-Tu dis juste ça pour me rassurer.
-Pas du tout! Regarde en première année, si tu n'avais pas pris en main la partie d'échec, je ne sais pas ce qui ce serait passé.

Ron sourit en se remémorant ce vieux souvenir.

-Dumbledore m'avait donné pas mal de points pour avoir joué une si belle partie.

Harry hoche la tête.
Les garçons se replongent quelques instants dans leur pensée.
Ron finit par se pencher un peu en avant.

-Du coup pour Malfoy...
-Je ne sais pas, Ron.
-Sache que peu importe ce que tu choisis de faire, je serai de ton côté. Et si tu veux le faire rentrer dans ta vie, je ferai un effort pour apprendre à le connaître.

Harry se sent comblé. Son amitié avec Ron lui est précieuse.
Savoir que Ron acceptera son choix, quelqu'il soit, le rend heureux.

-Tu ne m'en veux plus du tout pour Ginny?
-Bien sûr que non! Et puis, c'est peut-être mieux comme ça. Je suis encore désolé d'avoir réagi excessivement.

Harry hoche la tête.

-Et comment va George?

Ron se renfrogne.

-Il est bizarre ces derniers temps. Il paraissait aller mieux... Mais apparemment il est revenu dans sa chambre. Il n'en sort quasiment plus... Ginny m'a dit qu'il pleure la nuit.

Harry sent sa gorge se serrer. Ce n'est pas bon du tout. Et il se pourrait bien que ce soit sa faute.

-Tu penses que je peux aller le voir?
-S'il te laisse rentrer, oui. Tu peux faire quelque chose?
-Je vais essayer.

Hermione revient à ce moment là avec de la nourriture dans les mains.

-Kreattur m'a donné ça.
-On va chez Molly, tu as qu'à lui apporter, dit Harry.

Sans attendre, le trio s'engouffre dans la cheminée.

***
Harry toque à la porte de la chambre de Georges.

-C'est Harry, je peux rentrer?

Un silence lui répond.
Harry donne encore quelques coups à la porte. Il finit par approcher la main de la poignée, mais cette dernière se tourne avant qu'il ne l'ait atteinte.
Une tête blafarde apparaît. Des yeux rougis et cernés le fixent sans vraiment le voir.
Georges recule lentement pour le laisser passer.
Harry s'engouffre dans la chambre. Il fronce le nez en sentant l'odeur de renfermé imprégné la pièce.
Georges passe à côté de lui et va se planter dans un coin de la pièce, le regard dans le vide.

-Je peux ouvrir la fenêtre ?

Aucune réponse.
Harry va ouvrir la fenêtre en grand et respire l'air frais.

-Tu veux aller prendre l'air?

Aucune réponse.
Georges a le poings serré. Les jointures de ses doigts sont d'une blancheur choquante.
Harry se rapproche. Ses habits crasseux empestent la sueur et la poussière.

-Tu veux que je te prépare un bain?

Aucune réponse.
Le coeur de Harry se serre.

-Tu as toujours la pierre, n'est-ce pas?

Les yeux de Georges se remplissent de larmes. Il a un mouvement de recul et apporte son poing serré contre son coeur.
Il murmure quelque chose.
Fred.
Fred.
Fred.
Harry se rapproche et le prend par les épaules. Et ensuite, Harry l'amène contre lui. Il caresse son dos alors que Georges pleure à chaudes larmes, sans cesser de prononcer le nom de son frère.
Harry n'aurait jamais dû lui donner cette pierre. Il le regrette profondément.

-Georges, tu dois le laisser partir. Laisse-le partir...

Fred.
Fred.

-Ni lui ni toi ne peut être heureux ainsi. Dis lui adieux.

Fred.

-Je suis désolé de t'avoir laissé vivre ça. Mais il faut que ça cesse. Tout le monde veut que tu sois bien...

Georges tremble dans les bras de Harry.
Harry sent les lèvres de Georges bouger contre sa peau. Ce sont les derniers mots qu'il veut laisser à son frère.
Georges s'agrippe. Il semble lutter.

-Harry... Harry...
-Georges?
-Aide-moi...

Harry amène Georges sur son lit. Il le pose sur les draps défaits. Le coussin est encore humide.
Harry s'accroupit et prend le poing fermé entre ses mains.
Avec beaucoup de délicatesse, il ouvre un à un chaque doigt. La pierre de résurrection, d'un noir acerbe, apparaît sur la peau pâle.
Georges fixe un point vide derrière Harry. Entre deux larmes, il laisse passer un sourire mélancolique... Puis Harry prend la pierre.
Georges se laisse tomber en arrière sur le lit, la main grand ouverte.
Puis il croise le regard de Harry.
Il se sentait vide et vivant. Froid et brûlant.
Il voulait juste dormir. Il ira voir sa famille. Plus tard...
Georges se glisse sous les draps.
Une main chaude se pose sur son épaule. Chaude et vivante. Rassurante.