Le gouffre

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Ecriture:1h56

25Novembre, 17:24

L'hivern'arrive que dans un mois, je marche lentement dans une de ses ruesétroites que j'ai l'habitude de fréquenter, mais qui me sontinconnues malgré moi. Le tonnerre gronde et l'obscurité domine.Mais je continue de marcher, ma valise à la main, puis à l'autre,j'échange quand l'une commence à geler, même si je sais que ça nesert à rien, car l'autre n'aura pas le temps de se réchauffer. Jecontinue à vagabonder et sort de la ruelle pour arriver sur uneavenue vide. Les routes et les trottoirs sont faiblement éclairéspar des réverbères en fin de fin de vie. Mes yeux bruns fatiguéssont fixés sur le sol. Mon temps cadavérique devient de plus enplus livide à chacun de mes pas et mes cheveux longs roux me collentaux visages, ils sont gras et sales. Ca fait deux mois que je n'aipas pu me doucher convenablement. Ma barbe à poussé, mes vêtementsusés et troués ne peuvent pas me protéger de l'averse, ilsm'abandonnent aussi. Mes traits sont tirés, j'ai les joues creuseset j'ai du mal à traîner mon corps pourtant très maigre. Mescernes sont marquées et le manque de sommeil me joue des tours, etquelques fois je m'arrête car je vois flou ou que, je ne vois plusrien. Je ne suis même plus sûr de savoir qui je suis ou, si j'ai ledroit à une identité,tant je me sens minable. Pour l'administrationje suis un fantôme,du nom de Oliver Davis, jeune garçon de 21 ans,mais pour moi, je suis juste une pauvre gars qui n'a pas compriscomment le monde marchait. Quand je me sens trop mal, j'essaye de merappeler comment j'en suis arriver là, et ça ne fait que m'enfoncerencore plus dans les abysses, dans un gouffre que personne peutremonter si on en a pas la foie. Mais tout seul et dans cet état, ilest difficile de trouver motivation. Je vois tous les jours, sur lestrottoirs, des familles, des amis ou même des gens seuls, rentrerchez eux ou dans un bus pour aller travailler. Je les enviesterriblement. Au moins,je sais où je vais passer la nuitaujourd'hui. Un garçon de mon âge m'a parlé d'une auberge quiaccueillait les sans abris pour la nuit.Je suis les indications dublond pour m'y rendre mais, ce n'est pas à côté. Cela fait plusd'une heure que je marche sans m'arrêter.Mais je dois arriver ! Mêmesi... ça m'effraie aussi en quelque sorte. Ce genre d'endroit n'estpas surveiller, qui voudrait faire garderie de personnes sansimportance ? Alors, il y a souvent des vols, et ça ne me rassurepas, de voir d'autres personnes, je veux dire, dans la mêmesituation que moi ne me rassure pas non plus. Mais je dois y aller !Sinon... Sinon...

-Dégage de devant ma maison le clochard ! Cria un homme mûr quisortait de sa demeure.

Jem'esquive pour éviter ses foudres et continue mon chemin, ça nedevrait plus être très loin. Ma gorge se serre et mon estomacappelle à l'aide. J'ai ralenti le pas,mes yeux sont à moitiéfermés, ma valise à l'air de peser plus qu'avant. Mais je ne peuxpas me permettre de prendre de pauses,sinon, je sais que je n'yarriverai pas. Si je dois encore une passer une fois la nuit dehors,je sens que je n'y survivrai pas. L'orage semble être comme un poidsse rajoutant sur mes épaules. Une migraine infernale vient metirailler l'esprit, je pose une main glacée sur ma figure crasseuseet rougit. Puis je la glisse sur mon front.

-Ho non, j'ai de la fièvre... Il ne manquait plus que ça, pensais-je

Jepresse le pas en suffoquant, il a mal, très mal. A chaque pas j'ail'impression que je vais tomber,que mes jambes vont lâcher. Mespoumons me font souffrir, à chaque inspiration j'ai c'est comme sije me détruisais de l'intérieur de plus en plus. Mes chaussures entoile prennent l'eau, mes os se glacent peu à peu. Je n'en peuxplus, mes jambes ralentissent sans mon consentement. Je m'arrêtepour reprendre ma respiration mais un piéton que je n'avais pas vume bouscule. Je l'ignore. Je continue mon chemin en marchant,accompagné de ma torture cérébrale. Je fredonne silencieusementune chanson que j'aimais beaucoup, avant tout ce qui s'est passé.Cette chanson me laisse en quelque sorte accroché à mon passé,mais ça n'a aucune importance, je n'ai plus d'objectifs, plus derêves, plus de vie. C'était plus une comptine qu'une chanson àvrai dire, mais le mot comptine est sujet à des brimades pour monâge.

-I believe in the sun, he is the only one who never put yourselfbehind...

Jela connais par cœur, je la chantais quand je ne me sentais pas bienet c'est toujours le cas. Mais dents claquent et ma mâchoirestremblent mais je poursuis mon chant discret. Sans m'en rendre compteje donne un coup de pied dans un objet. Je regarde celui et remarqueque c'est les restes d'un repas de fast-food qui ont été laissépar terre sans scrupules. Je tremble, et saisi la boîte en cartonavec mes doigts que j'ai du mal à plier. Je l'ouvre, l'odeur vientchatouiller mes narines.J'inspecte la nourriture : elle est encorechaude et aucune trace de moisissure. J-Je peux alors le manger, çaa été surement déposer ici récemment. Je sors le sandwichaméricain déjà trempé et le mets à ma bouche pour en prendre unebouchée. Des larmes coulèrent alors de mes joues, d'autres prennentle relais et je ne peux plus m'empêcher de pleurer, ma gorge se noueet tout mon être tremble. Trois semaines, vingt-et-un jours que jen'ai rien avaler.Trois semaines que je devais survivre en fouillantdans les poubelles mais que des personnes avaient été plus rapidesque moi, trois semaines à boire l'eau de pluie ou dans les flaques.Je me sens revivre et profite le plus possible de ces saveurs. Moncœur bat la chamade. Je ne laisse aucune chance aux miettes, ni àla sauce en trop. Une fois mon festin terminé je vais poser la boîteet les sacs à côté de poubelles, il n'y avait pas de soda quiaccompagnait l'hamburger. Je ne connais pas le code couleur, et jeneveux pas faire de bêtises. Je reprends mon chemin un peu plus enforme, cela n'a pas rassasié ma faim mais je me sens déjà mieux.Je pense avoir assez de forces pour arriver à l'auberge. L'hommem'avait parlé d'une vieille bâtisse rouge qui contrastait avec lesbâtiments résidentiels alentours. J'espère qu'il y aura encore dela place pour moi. Je continue de marcher sur le même rythme unedizaine de minute et commence à apercevoir un décor qui ressemblaità la description qu'on lui avait donné. Est ce une hallucination?Je ne sais pas mais ce que je sais, c'est que je veux en avoir lecœur net, alors je me mets à courir de toutes mes forces. Un bruitd'ambulance provient du quartier adjacent mais je n'y fais pasattention. L'image à travers les gouttes tombantes devient de plusen plus précise. Je suis arrivé.

-Tiens tiens ! En voilà un nouveau ! Je savais qu'il resterait encoreun cloporte qui viendrait !

Jem'arrête précipitamment, un homme baraqué plus grands que moi mebarre la route, il a une batte de base-ball en main, j'ai unmouvement de recul.

-N'ai pas peur mon grand ! Je ne vais pas te faire de mal, enfin. Jevais essayer. Tu ne devrais pas te balader dans les rues à cetteheure là tu sais ! C'est très vilain !

Ils'approche de moi dangereusement.

-Mais c'est que t'es mignon en plus ! Si on enlevait cette affreusebarbe, je suis sûre que tu ferais un parfait jouet !

Cetype me fait peur, je fais demi tour mais ma valise me ralentit. Ilm'attrape le poignet et me force à le suivre dans une ruelle sombre,où personne ne pourrait nous voir. Il rapproche son visage du bienen me maintenant fermement. Je peux sentir son haleine à l'ail.J'essaye de me dégager mais j'ai trop peu de force. Il m'attache àun tuyau longeant le mur avec un lien solide et sert le plus fortpossible, je veux crier, j'ail'impression que mes poignets vont sedétacher tellement ça me fait mal. Mais il pose sa main sur mabouche, et de l'autre, il ouvre ma valise et lance tout son contenuparterre.

-Tu n'en aura plus besoin mon garçon, c'est moi qui va m'occuper detoi maintenant ! Il suffira juste de te faire une petite teinture, tusais, les gens n'aiment pas les rouquins...

Unbruit de sirène d'une voiture de police retentit très près d'ici,des hommes armés pénètrent dans la ruelle, demandant de merelâcher. Tout se déroule très vite que je n'arrive plus àsuivre. L'homme se lève et essaye de me donner un coup de batte, jen'ai jamais eut aussi mal avant l'impact entre l'arme et mon estomac.

Uncoup de feu. C'est la dernière chose que j'ai pu distingué avantd'entrer dans le royaume de sombres. Je ne vois rien. Mon anciennevie revient me hanté en boucle, la douleur me submerge mais je nepeux pas me sauver. Je me sens partir. Cependant, mon sentiment étaitjuste : je n'ai pas atteint l'auberge alors ça a eut raison de moi.Cette nuit, Davis Oliver est mort.



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