C'est pas vrai, c'est pas vrai! Essaye de te concentrer Vicky!
- Victoire, encore dans la lune?
Oh non j'en étais sûre...
- Euh... non madame.
- Très bien. Qu'est ce qu'on vient de dire alors?, me demande ma trèèèès chère prof d'anglais.
Concentre toi. Concentre toi.
- On parlais de should et shouldn't...
- Oui c'est ça.
Ouf j'ai eu chaud.
- C'est effectivement ce qu'on a dit il y a une demie-heure. Allez passe moi ton carnet.
Je souffle. Ça me saouleeeeee. Je lui tends mon carnet déjà plein de billets remplis de "motif: dans la lune".
Je regarde mes pages remplies de gribouillis. Enfin, ce n'étaient pas des gribouillis au début. C'était des lettres. Des lettres et des lettres. Toujours les mêmes. Des lettres qui représentent toujours la même personne. Et elle est à deux rangs en face de moi.
Actuellement, elle me regarde, comme toute la classe d'ailleurs, à cause de l'incident du carnet. Quand nos regards se croisent, elle me sourit gentiment, puis se retourne.
Si seulement j'avais ce courage. Ce foutu courage de lui dire ce que je ressens réellement pour elle.
On m'a souvent dit que j'étais courageuse. Mais en ce qui concerne l'amour...
Honnêtement, plusieurs raisons me bloquent.Premièrement, nous ne sommes pas amies. Je dis pas qu'on ne s'entend pas bien, mais simplement, notre relation se limite à quelques sourires polis, comme celui qu'elle vient de m'adresser, à l'instant. En fait, nous ne nous sommes jamais réellement parlé.
Deuxièmement, à ce qui paraît, elle a un mec à l'extérieur. Je suis pas ce genre de filles qui s'en fout si la personne en face est célibataire ou pas.
Troisièmement... c'est ça le problème. Je suis une fille. Une fille qui aime une fille.
C'est d'ailleurs la raison de ma venue ici.
Quand j'avais 10 ans, j'ai invité ma meilleure amie chez moi, pour une soirée pyjamas. Je dormais dans mon lit, et elle, dans son sac de couchage, sur le sol.
En pleine nuit, elle s'est réveillée en sursaut, à cause d'un cauchemar. Elle m'a demandé de venir dormir avec elle, dans le sac de couchage. J'ai accepté. J'étais tellement innocente, à l'époque. Nous avons donc passé le reste de la nuit ensemble dans le sac de couchage.Mon amie revenait souvent dormir chez moi. Une fois par mois, au moins. Deux mois après la nuit du cauchemar, elle en a refait un. Je me suis donc glissée à nouveau avec elle, dans le sac.
La fois suivante, je lui ai directement proposé de venir dans mon lit, comme ça, si elle faisait encore un cauchemar, elle se rendormirait aussitôt en s'appercevant que je suis avec elle. Elle a accepté. À l'époque je faisais ça en toute amitié. Vraiment. Je la considérais juste comme ma meilleure amie.
Ce soir là, quand elle était directement venue dans mon lit, mon père est rentré dans la chambre pour nous dire bonne nuit. Quand il nous a vu ainsi, il a lâché:
"Enfin, les filles, vous allez pas dormir ensemble, vous valez mieux que ça. Emma, va dans le sac de couchage. Allez bonne nuit."
À ce moment la je n'avais pas compris à quoi il faisait allusion en disant "vous valez mieux que ça".
Emma était donc retourné dans le sac, mais m'a rejoint après son nouveau cauchemar.
La fois suivante, nous avions attendu que mon père soit passé pour nous réunir.
Et on a dormi comme ça à chaque fois qu'elle venait, pendant presque deux ans.
Jusque là nuit où tout a basculé. Depuis les deux dernières années, j'avais grandi, et évolué. Je ne savais pas que j'aimais les filles. Je savais juste que je l'aimais, elle. Plus qu'une meilleure amie. Et je voulais voir si c'était réciproque.
Cette nuit là donc, on étaient dans les bras l'une de l'autre, comme à notre habitude. Et on papotait en chuchotant, comme toutes les filles lors d'une soirée pyjamas. À un moment, nous avions arrêté de parler, on ne dormait pas, on s'enlaçaient, tout simplement. Au bout d'une minute, n'y tenant plus, je lui ai embrassé le front, du bout des lèvres. Elle m'a regardé en souriant, et m'a dit bonne nuit. Ce que je fis également. Ensuite elle a fermé les yeux. Je n'en pouvais plus. Je ne pouvais plus me retenir. Je l'ai embrassée, très rapidement, sur les lèvres.
La seconde suivante, elle a ouvert les yeux, et m'a fixé pendant pas loin de dix secondes. C'est long, dix secondes, quand vous êtes dans l'ignorance totale.
Elle m'a juste dit: "Je vais dormir dans le sac de couchage."
Et ce furent les derniers mots prononcés cette nuit là.
Le lendemain matin, nous nous sommes juste échangé un bonjour. Elle m'a dit quand même, juste avant de partir: "Je dirai rien à tes parents." Avec un léger sourire, qui n'exprimait que de la pitié.
Non, elle ne l'a pas dit à mes parents.
Elle a fait bien pire.Le lendemain, au collège, je l'ai surprise avec une fille que nous détestions toutes les deux. C'était LA commère du collège.
Dès l'après midi, toute la classe était au courant de notre "baiser". Le lendemain, toutes les quatrièmes, y compris des personnes dont je ne connaissais même pas le nom.
Dans les semaines qui ont suivi, on me traitait de sale lesbienne, et les rumeurs commençaient à raconter des versions de plus en plus fausses et ignobles de ce qui c'était passé cette nuit la.
Je n'avais qu'Emma à l'époque. Et elle m'avait abandonné dès le premier jour. Je passais mes récrés seule, enfermée dans les toilettes des filles, dont les murs étaient recouverts de graffitis disant: "Victoire, salope", "Victoire, va te faire foutre", "Attention les filles, une prédatrice est en liberté".
Et moi je remplissais les poubelles de mouchoirs humides.
Quand j'ai décidé d'en parler au proviseur, de lui expliquer ma version, la vraie, sa réaction a été de me fixer, pendant une minute entière cette fois. Passé cette minute, il a téléphoné à mes parents.
Une demie-heure plus tard, mes parents étaient au courant de toute l'histoire.
De retour à la maison, mon père, qui ne m'avait pas adressé un regard depuis le bureau du proviseur, déclara de sa voix la plus grave possible:
"Fais tes bagages. Tu pars demain."
Je n'avais pas compris. Ma mère non plus apparemment. Quand mon père lui a expliqué, elle est venue me rejoindre dans ma chambre et a fondu en larmes en m'expliquant que mon père allait m'envoyer dans un internat pour filles, pour me faire passer cette "envie passagère", comme il disait. À la moindre fille que je toucherais là-bas, il avait payé la directrice pour l'en informer directement. Et alors, je serais envoyée directement dans une pension ou je ne pourrais revenir qu'une fois tous les deux ans.
Pour lui, le but de m'envoyer ici, c'était de me tester, et voir si je resisterais à la tentation en ayant toutes ces filles autour de moi.
Et aujourd'hui ça recommence.
J'ai croqué dans le fruit défendu, et je sais que je vais devoir le payer.
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Ok, je sais, ce chapitre a été long, et je n'ai pas beaucoup approfondi le signe du verseau. Le fait est que je tiens vraiment à raconter plus que de simples caractéristiques de signe. Chaque personnage a une histoire, un passé, et je trouve que là en l'occurrence c'était assez important de le raconter. Vous inquietez pas, vous n'avez pas fini d'entendre parler de l'histoire d'amour de Victoire.
Allez, à bientôt pour la suite!😉
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Les Filles Du Zodiac
Roman pour AdolescentsUn internat. Dans cet internat, 12 filles. Chaque fille est l'incarnation même de son signe du zodiac. Suivez-les dans leur quotidien aussi rythmé que surprenant, et par la même occasion, découvrez en plus sur votre signe!