Été mouvementé

Le voyage

Peu après notre arrivée dans notre nouvelle maison, ma mère annonce déjà une mauvaise nouvelle. Ma sœur et moi devons aller à un camp de vacance. Ce que je déteste. Ma jumelle, contrairement à moi, est folle de joie. Se faire des amis qu'on quittera deux mois après, non merci. La dernière fois que j'y suis allée, j'étais la plus âgée, et tout le monde croyais que j'étais monitrice. La pire expérience de ma vie. Ma mère m'a envoyée dans ces camps rejoindre ma sœur à partir de l'année dernière. C'est à dire à partir du moment où mes négociations ne marchaient plus. Je suis maintenant obligée de passer mes étés à manger des marshmallow grillés et à dormir au milieu des araignées. Le bonheur quoi.

Ma mère m'appelle pour la cinquième fois.

- Oui c'est bon j'arrive !

Je me dépêche de prendre mon sac et je descends les escalier rapidement. J'ouvre la portière et fronce les sourcils en voyant que ma sœur a pris la place que j'avais choisie.

- Non mais t'abuses là !

Jane me répond tout en continuant son roman :

- En même temps, t'es pas très précise quand tu dis « je prends la place près de la fenêtre » alors que les quatre places ont une fenêtre.
- Non mais je parlais de la fenêtre devant. Ho ! Déjà que je fais l'effort de venir, je vais sûrement pas me mettre à l'arrière !
- Parce que tu crois que moi, j'ai envie ?
- Je suis plus grande que toi, j'ai le droit de prendre la place des adultes !
- C'est pas parce que t'es sortie la première du ventre de maman que t'es plus grande ! T'avais qu'à être là avant.
- C'est pas le problème !
- Si, on t'a appelée cinq fois.
Ma mère intervient, agacée.
- Bon, Cris, n'en fais pas tout un plat ! La place des adultes est pour ceux qui se comportent en adultes. Et c'est pas l'impression que tu me donnes en criant comme ça sur ta sœur !

- Mais...
- Il n'y a pas de « mais » !

Je vais à l'arrière en claquant la portière pour exprimer mon mécontentement. Jane ricane puis reprend sa lecture.

J'avais tellement pas envie d'arriver que j'ai eu l'impression que le trajet s'est passé à toute vitesse. C'est toujours ça avec moi. Il se passe tout le contraire de ce que je voulais.

Je sors de la voiture et enlève mes écouteurs tout en observant l'endroit où je resterai les deux mois qui suivent. À vrai dire, je ne m'attendais pas à ça. Je pensais dormir dans des tentes, et je vois devant moi des grandes cabanes, je pensais qu'il n'y aurait que des gosses, et la plupart des gens présents ont certainement plus que dix-huit ans. C'est à dire un an de plus que moi. Là, j'ai plus l'impression d'être la gamine que la monitrice.

Ma mère revient avec les clés et nous donne à chacune une paire. Plus qu'à trouver mon cabanon. Je pars à sa recherche en trainant des pieds. Ils auraient pu penser à nous montrer le nôtre au lieu de nous obliger à nous balader dans toute la forêt. Ça aurait été une plutôt bonne idée, je trouve. Et j'avais vu juste, j'ai dû regarder toutes les petites maisons avant de trouver la mienne, la dernière. Alors que ma sœur avait, forcément, la première. J'essaye d'ouvrir la porte qui grâce à mes efforts, cède au bout du quatrième essai, et découvre une chambre contenant deux lits. Mais je ne vais tout de même pas me plaindre, j'en ai un pour moi, c'est déjà ça.