Tout était bleu. Le sol, les fleurs, le monde, la vie. Tout était bleu, teinté de bleu, repeint en bleu. Ce n'était pas faute d'essayer, pourtant, de sortir ses crayons et de les agiter vers l'horizon. Ce n'était pas faute d'essayer de porter des lunettes colorées ou encore de viser la lune pour s'en aller. A l'ombre de ma tasse de café séjournait une coccinelle. Elle se reposait, immobile et l'espace d'un instant il me fut évident que son regard se dirigeait tout droit vers le mien. Malheureusement, elle ne resta pas bien longtemps elle aussi, et elle s'éclipsa le temps que je cligne des yeux. Finalement, elle aussi était peut-être bleue.
Les aboiements du chien voisin me parvenaient aux oreilles, forts et perçant le silence d'été -qui au fond, n'en était pas un-. Un silence composé de bribes de discussions, d'un air de musique et du chant des oiseaux. Je crois que je me sens bleu, mais que j'aimerais me sentir rouge. Après tout, fut une époque où je me sentais rose, et puis bleu, c'est toujours mieux que gris. Comment te sens-tu, toi ?
Je portai la tasse jusqu'à mes lèvres, et toute l'amertume du monde sembla sonder mon esprit.
Se sentir bleu, c'était aussi effrayant que fascinant.
Et si le monde n'était pas bleu, aussi bleu que moi ?
Si c'est le cas, s'il te plaît, ne sois pas gris.