Malicia

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Je suis assise sur mon matelas qui est posé dans un coin de la pièce. Aujourd'hui, c'est le jour des douches. Je vais enfin pouvoir enlever la boue dans mes cheveux et avoir des habits propres, même s'ils ne le seront pas jusqu'à ce soir. Le soleil est à peine levé pourtant, les cris ont repris depuis un moment. Je ne sais pas qui crie, ni pourquoi. Je ne quitte ma chambre que pour aller au champ récolter les semis ou les jours de douche. J'ai calculé qu'ils nous lavaient toutes les cinq nuits. Nous ne sommes pas nombreuses dans la bâtisse que j'occupe, à peine une dizaine, je crois. Je ne peux pas dire que je sois malheureuse, mais depuis quelques temps je me pose des questions. De ma naissance à mes quinze ans, je vivais avec une femme qui n'était pas ma mère. Elle m'a appris comment me comporter en présence d'un homme, comment rendre son mari heureux, ce que je pouvais faire et ne pas faire. Elle m'a appris à cuisiner, entretenir une maison enfin tout ce qu'une jeune fille doit savoir pour être une bonne épouse et une bonne maîtresse de maison. Puis quand j'ai eu mes premiers saignements, j'ai été placée ici. Je n'ai dans ma chambre que ce dont j'ai besoin, un matelas pour dormir, une chaise et un bureau pour que je puisse apprendre quelques leçons et un petit coin pour mes besoins si jamais je dois me réveiller la nuit. Je n'ai jamais compris pourquoi j'entends des cris de femmes certains jours, alors que je ne vois personnes si ce n'est la dizaine de femmes qui ont leurs chambres ici et les hommes qui nous font avancer dans notre éducation. Je ne pose pas la question, une femme ne doit jamais remettre en question les décisions des hommes et n'a pas besoin de comprendre autre chose que ce qu'on lui apprend. J'attends donc que l'un des hommes vienne me conduire à la douche. J'entends des pleurs dans la chambre d'à côté. Madison, une fille d'un an de plus que moi, a fêté son anniversaire hier. Pour l'occasion, elle a pu se rendre dans la maison des maîtres. Il me tarde de pouvoir y aller. Dans un an, je serais honorée et un homme me prendra pour femme. J'ai hâte que ce jour arrive. Quand j'entends la serrure se déverrouille, je me place rapidement en position d'attente, à genoux les mains dans le dos et la tête baissée. Regarder un homme dans les yeux est un acte qui mérite une punition si cet homme n'est pas votre époux. Bien qu'il me faudra attendre que celui-ci me le demande. L'époux protège et assure à sa femme une stabilité. Elle se doit de le respecter en toute circonstance, de ne jamais se refuser à lui et toujours lui obéir. Voilà les trois règles de base pour devenir une épouse digne de son époux. J'entends la porte s'ouvrir, puis une main se pose sur mon épaule.

- C'est bien Malicia, ta posture est parfaite. Tu as toujours été une femme avec un grand potentiel. Ton époux aura de la chance. Maintenant, tu vas pouvoir te laver. Je te mettrais aux champs après.

Je me relève toujours tête baissé et suis les pas de l'homme. Je ne connais pas leurs prénoms, d'ailleurs tous les quinze jours, ils changent. L'homme me conduit dans la salle de douche et se tourne de façon à ce que je puisse me laver. L'eau froide agresse ma peau, mais rapidement elle devient tiède. Je ne perds pas de temps et commence par mes cheveux. Vu la couleur de l'eau ca ne leur fait pas de mal. Je me demande quand même pourquoi nous ne pouvons pas être propres plus souvent. Encore une question que je ne pose pas. J'en ai plusieurs comme ça. Pourquoi les cris, pourquoi nous laisser t-ils pas nous laver, pourquoi ne pas nous laisser sortir dehors quand nous ne sommes pas aux champs. Qui sont tous les hommes qui vont et viennent sur la propriété. Une nuit lors de ma dix-huitième année, j'ai réussi à m'approcher assez de la cour pour voir une grosse voiture et des femmes en descendre. Je pensais qu'elles rejoindraient notre bâtisse, mais elles sont directement rentrées chez les maîtres. Je n'en ai jamais parlé. D'ailleurs nous ne parlons entre nous que pour les besoins de notre apprentissage.

- Tu es encore dans tes pensées belle Malicia.

Je me dépêche de me rincer et m'enroule rapidement dans une serviette pour cacher mon corps des yeux de l'homme. Je sens son regard sur moi, mais j'ai commis une faute en me laissant savourer le moment sous la douche.

- Je vous prie d'excuser mon erreur, je ne recommencerais pas monsieur.

- J'en parlerais à qui de droit et le maître me donnera ses ordres sur la punition à te donner.

Je ne réponds pas, je sais que je le mérite. Cela faisait un moment que j'avais réussi à échapper aux diverses punitions. Il y a différents types de châtiments, certains corporels d'autre qui touche plus le moral. Dans les punitions corporelles, il y a la canne sur la plante des pieds, les aiguilles plantées dans la peau ou bien encore le fouet pour les fautes les plus graves. Pour ce qui est des punitions moral, nous avons l'enfermement dans la boite avec une durée différente selon l'impair commis. Il y a aussi la punition du bannissement. Je ne pense pas avoir à vous expliquer en quoi consiste le bannissement, son nom est assez explicite. Depuis que je suis dans la bâtisse, il n'y en a eu qu'un. Une jeune femme qui venait d'une autre maison de maître, elle tenait des propos étrange sur l'extérieur, comme quoi ce qui se passe ici n'étais en rien normal. Les maîtres ont dû intervenir en personne. Rare sont les fois où l'on voit Monsieur et Madame, mais pour les cas les plus durs, ils se déplacent. La jeune femme a été bannie et nous avons tous été puni pour laver les mensonges qu'elle nous racontait.

Je me dépêche d'enfiler ma culotte, ma robe de travail et mes sandales, puis me remet en position d'attente.

- Bien maintenant, je te conduis aux champs et j'irais voir le maître des lieux le temps que tu effectues ton travail. Nous verrons ce soir pour ta punition.

Lorsque nous arrivons aux champs, je ne perds pas une seconde et commence la récolte. Je ne sais pas vraiment à quoi sert les produits que nous récoltons, mais j'évite de trop en respirer, car après, j'ai une sensation de flottement, il m'arrive de rigoler pour rien et bien souvent, je ne me rappelle pas de tout. Je crois que la femme qui est partie en bannissement appelait cela calabisse, ou quelque chose dans ce genre. Nous mangeons rapidement une salade et nous retournons au champ. Quand les cloches sonnent la fin de journée, j'ai de nouveau de la terre sur la peau et dans les cheveux. Nous sommes en position d'attente et les hommes ramènent les femmes à la bâtisse. Moi, j'attends toujours. Je sais que je suis punie, mais je suis partagée. Une partie de moi trouve cela totalement normal, une autre, plus petite, me dit le contraire. Je vois une paire de chaussures avancer devant moi.

- Malicia, tu devras passer par la boîte pour avoir fait perdre du temps à ton gardien de douche. En restant plus que nécessaire, tu l'as mis en retard dans ses tâches. Tu n'en sortiras que demain matin. Bien sûr, le repas de ce soir ne te sera pas accordé.

C'est donc dans une boite trop petite pour être allongé et entièrement dans le noir que je vais passer la nuit.

Les Bandidos (Screen)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant