AutOmATeS
Je précise que cette histoire contient plus de vulgarité que les autres, donc si vous êtes une personne susceptible de reprocher cette singularité à l’auteur, essayez de lire avec :) !!
Autre précision : Cette histoire a une restriction d’âge : 12 ans minimum. Vous comprendrez au troisième chapitre :)
Introduction
Je ne dirai pas mon nom, pour cause qu’il a été utilisé, encore et encore.
Je ne dirai rien de moi.
Parce que si je le faisais, je me réduirais au stade de tout humain inutile :
Des AUTOMATES.
Répétant sans cesse les gestes de leurs prédécesseurs, certains ayant des dons légèrement sortis de l’ordinaire, mais qui restent on ne peut plus réguliers, réglés, AUTOMATIQUES.
Comme des horloges, les humains vivent, ils pleurent, meurent, rient, jouent, et comment ont-ils appris cela ?
En regardant leurs CONCEPTEURS.
Ils répètent les gestes et mots qu’ils leur apprennent, mais ne se posent pas la question cruciale :
Qui suis-je ?
Si on me posait la question, je répondrais sans hésiter : qu’as-tu fait de ta vie ?
Il répondrait : « Je suis devenu (…) »
Les trois points, on peut les remplacer par tout et n’importe quoi. Président de la république, jardinier, cultivateur, éboueur, guide, aide-soignant, par tout sauf par HOMME.
Un homme n’est pas un homme s’il ne fait rien pour se distinguer.
Une femme n’est pas une femme si elle ne fait rien pour se distinguer.
Les places hautes de la société ?
Acteur célèbre ?
MAIS QUI A BESOIN DE CES CHOSES ?
QUI EN A BESOIN POUR VIVRE ?
Vivre, mot bien étrange.
On l’utilise pour dire que le cœur bat, que quelqu’un est biologiquement en état de se servir de son corps ou de sa tête.
Mais qui vit, par rapport aux autres ?
Les vivants, les morts, tout ceci n’a aucun sens.
Qu’avez-vous fait de votre vie ?
RIEN.
Voilà ce qu’est la vie pour certains.
Quant aux autres, ceux qui ont contré leur programme, ces idéaux incrustés, je ne peux rien dire.
Est-ce mal de vouloir changer ?
Est-ce mal de vouloir être soi-même ?
Est-ce mal de ne pas vouloir être comme les autres ?
De vouloir changer ?
De vivre ?
De devenir autre chose que des automates ?
CHAPITRE 1 // Une fille étrange
« Hana, le petit déjeuner est servi ! »
« Je viens… »
Je ne devrais pas à avoir à dire ça, à décrire, mais je le fais, sinon mon histoire ne sera composée que de paroles. Je lève mes pieds du lit, et les agite, par ce dimanche pluvieux.
« J’ai dormi avec mes chaussettes… »
Je finis par me lever, depuis le lit d’hôpital froid et tout blanc. Le jour où on m’a amenée ici, je devais avoir six ans. J’ai vaguement entendu les mots ‘’folle’’ et ‘’mentalement dérangée’’, mais à l’époque, je ne savais pas qu’on parlait de moi. Ma mère m’avait appelée, expliquant que je n’avais pas à m’en faire, que tout irait bien, qu’elle viendrait tous les jours me voir, et que je n’étais pas dangereuse. Dans l’innocence de l’enfance, je n’avais pas compris pourquoi elle me disait ça, pourquoi on m’attachait quand je dormais. Mais à quinze ans, après avoir épluché les articles sur Wikipédia sur la folie, j’avais fini par comprendre. On m’avait fourrée dans ce service parce que j’étais tout simplement une énorme PSYCHOPATHE.
« Les tests sont formels : Son niveau d’instabilité est extrêmement élevé, un cas à surveiller de vraiment très prêt. En plus de cela, elle est une enfant précoce. Elle pourra devenir une menace pour vous aux alentours de seize ans. »
Voilà ce qu’avaient dit les médecins.
Mais le problème, c’est que je me suis mise à voler les couteaux de cuisine à treize ans, juste pour voir quel effet auraient les lames sur mon pouce droit. J’avais pensé, à ce moment-là :
Ils ne coupent pas assez, c’est nul.
Sur le coup, les dents m’avaient arraché la peau du dessus, la corne, et du sang coulait sur mes draps. Mais je ne sentais rien, et j’étais véritablement étonnée quand je me suis rendue compte qu’une tache rouge s’était formée sur les draps blancs. On m’avait ensuite regardée comme un animal sauvage, puis avec de la pitié.
Sérieusement, qu’est-ce que j’en ai à foutre de votre pitié ?!
« HA-NA ! Le petit déjeuner est froid ! »
« Hmm-hm. »
Cette fois, je sortis de mon lit, repoussant la couverture. Je jetai un coup d’œil à l’oreiller, puis à la couette, couverte de petits lapins. Ce lit, je me rappelle avoir demandé à ma mère de m’apporter mes affaires depuis la maison. Je poussai la porte, bien qu’elle soit déjà entrouverte, et j’arrivai dans le hall. Ici, six enfants, entre sept et dix-huit ans, bénéficiaient des services médicaux réservés aux malades mentaux. Deux d’entre nous étaient en pension temporaire, autistes ; Trois étaient comme moi, dérangés, et les autres étaient simplement en garde-à-vue. Je m’assis à la table de Petra, pas vraiment une amie, mais plus un rassemblement par élimination.
« Bien dormi ? »
« Ouais. »
« T’as faim ? »
« Non. »
Ses questions étaient brèves, je répondais toujours par des réponses aussi courtes.
« Les enfants ! Nous accueillons un nouveau, après le départ de Nina ! »
Nina était l’une des deux en garde-à-vue, de trois ans plus jeune que moi. Elle aussi, elle devait penser :
Fermez vos gueules, je me fiche de votre pitié, je m’en fous !
Un peu comme moi.
« Il s’appelle Leslie. Il appartient à la catégorie D. »
D ? Voilà qui devient intéressant. D pour Dérangé, A pour Autistes, et GAV pour Garde-à-Vue.
« Il ? » demanda Nina, intriguée. « Leslie est un prénom de fille, non ? »
« Non, c’est un prénom transgenre. Il peut être utilisé pour les deux sexes. »
Des rires fusèrent à l’entente du dernier mot. Principalement ceux des enfants de huit ans.
Qu’est-ce qu’il y a de drôle ? Un mot est un mot.
Je repassai en revue les pensionnaires.
Moi, Hana (…), 15 ans, cheveux blonds presque blancs, yeux verts, groupe D
Nina Horu, 12 ans, cheveux châtains, yeux bleus, groupe GAV
Leslie (…), (…), (…) (…), groupe D
Petra Zlatovskaya, 14 ans, cheveux noirs, yeux bleus, groupe D
Himari Koni, 16 ans, cheveux noirs, yeux noirs, groupe GAV
Jun (…), 17 ans, cheveux blonds, yeux noirs, groupe A
Jin (…), 17 ans, cheveux blonds, yeux noirs, groupe A
Nonori Kimi, 15 ans, cheveux noirs, yeux verts, groupe D
Parfait, je me souviens d’à peu près tout, sauf des noms de famille de Jun et Jin, les jumeaux, et le mien. Je n’ai qu’à m’en inventer un.
Hana Haru.
Hana Koouki.
Hana Ryu.
Hana Seo.
Hana Vivian.
Hana Minoru.
Hana Uryuu.
Hana Yori.
Trop de choix.
« Dis, Petra, tu préfères quoi entre Hana Yori et Hana Koouki ? »
« Hmmm… Hana Yori, ça sonne bien. »
« Merci. »
Je reportai mon attention vers l’infirmière de groupe Torita, trente deux ans, avec un uniforme d’infirmière infantile avec des… des… encore des lapins.
J’adore les lapins.
Mais là il y en a trop autour de moi.
Je me lève, me dirige vers ma chambre, sans manger – je n’avais pas faim – et m’assois directement sur le lit. Je réfléchis un instant, puis mes doigts se crispent sur le tissu avec des
(LAPINS)
motifs. Mes ongles griffent les
(LAPINS)
animaux, sans déchirer pour autant le
(LAPIN)
tissu. Une fois ma colère passée, je regarde l’heure. Il est plus que temps de se rendre en cours, mais je n’ai pas envie, je connais tout le programme par cœur, j’ai lu mon manuel, moi.
Je n’ai pas envie, mais comme je n’ai pas envie de rester avec ces
(LAPINS)
Ces… ces choses, j’y vais, regardant mes pieds, et imitant un bruit de pas avec ma langue à chaque fois qu’ils touchent le sol.
Ce n’est pas amusant, mais tant pis.
CHAPITRE 2 // Un garçon étrange
En plein cours de sciences, un garçon aux cheveux ébouriffés ouvrit violemment la porte. De dessous sa frange noire, on pouvait voir un éclat bleu et un autre vert. Mon cœur fit un bond.
« Je suis Leslie. »
Je le regardai un peu, m’attardant sur ses yeux de deux couleurs magnifiques. Il sembla s’en apercevoir, et me lança :
« Quoi ? »
Je levai les mains en signe de déni.
Ça commençait bien, tiens.
« Leslie, tu peux aller t’assoir près de… de… il n’y a plus qu’une place de libre. »
« J’ai vu. »
La place de Nina se trouvait à côté de celle de Petra, qui elle-même était à moins d’un mètre de moi. Comme elle était partie ce matin, il n’y avait plus que celle-ci.
Au moins, on n’est pas à côté.
Le cours se passa comme d’habitude, dans le plus grand des silences des D, même Leslie était silencieux. A la fin, il se leva pour venir me voir.
« Tu t’appelles comment ? »
« Hana Yori. »
« Tu viens du Japon ? »
« Non. »
« Tu aimes lire ? »
« Oui. Non, je ne suis pas sociable. Et alors ? »
« Ahah, moi non plus. Je n’avais pas envie de t’adresser la parole. Mais je l’ai fait par bon sens. »
« Ne me fais pas la morale, morveux. »
« J’ai deux mois de plus que toi, connasse. »
Il tourna les talons, plus amusé qu’énervé.
Idiot.
Il revint un peu sur ses pas.
« Au fait, j’ai trouvé ça sous ton oreiller. C’est à toi ? »
Il fit tournoyer autour de ses doigts un objet métallique qui était de toute évidence mon couteau.
« Oui, rends-le-moi. »
« Qu’est-ce que tu fais, avec ? »
« RENDS-LE-MOI ! »
Ma paume effleura le bord coupant et me déchira la peau. Je refermai ma main autour de la lame et tirai fortement vers moi. Leslie avait lâché, apeuré devant je-ne-sais-quoi.
« Hana, ta main… »
« Quoi, ma main ? »
Je la regardai, m’attendant évidemment à une petite coupure. Mais non, je m’étais ouvert la main assez profondément, assez pour que le sang recouvre les trois quarts de mon avant-bras.
« … »
« Je t’emmène voir quelqu’un. On est dans un hôpital, donc ce serait vraiment stupide de dire ‘’On va à l’infirmerie’’… »
Je ne bronchai pas, sachant pertinemment que j’avais besoin de soins immédiats, malgré la non-douleur inquiétante. En chemin, j’entendis Leslie se parler à lui-même, en baragouinant des mots incompréhensibles. Toutefois, il arrivait que j’en saisisse un ou deux.
« Quelle est la sensation de non-douleur ? Comme si rien ne s’était passé ? Bizarre. Je n’ai jamais essayé, moi. Je pourrais. Et Hana ? Est-ce que le terme ‘’masochiste’’ peut s’appliquer à elle ? »
« Eh ! Je ne suis pas masochiste ! »
« Hm, quoi ? Je n’ai pas entendu. »
« J’ai dit : je ne suis pas masochiste ! »
« Ah, euh, oui… »
Il semblait gêné, comme s’il ne s’attendait pas à ce que je comprenne quelque chose dans ce qu’il disait.
Ce type est bizarre.