Le rêve de Romi

4.

Quand je franchis les portes vitrées de l'aéroport, je ne pris même pas le soin d'évaluer la situation ni de chercher le temps que j'avais devant moi. Je parcourais en vitesse les innombrables allées qui se profilaient à mesure que j'accélérais la cadence. Je devais le trouver.
Et je le vis, au loin, les bras ballants, le regard perdu dans le vide, à l'abri de tout, couper du monde. Il était devenu comme tout le monde. Banal, quelconque, homme aux multiples facettes, aux immortelles souvenirs et aux incontrôlables rêves. Un passager en transit. Un voyageur dans l'attente de sa prochaine destination. 
A ce moment là, je compris pourquoi Romane était amoureuse de lui. Robert Pattinson n'était pas qu'un acteur hollywoodien. Il était comme moi, comme elle, comme nous tous : un être humain. Cela le rendait immensément magnifique. Et, d'une certaine manière, j'étais fière de l'amour que lui portait mon amie.
Je stoppa ma course et m'approcha doucement de lui, comme pour amadouer un animal sauvage : tel un bout de scotch qui nous serait difficile à enlever de notre doigt, mes appriori persistaient cependant de le voir comme une personnalité publique inaccessible.

Arrivée à sa hauteur, il ne bougea pas, n'appela personne, ni se meut d'une quelconque façon que ce soit. Au regard que nous échangions, je compris alors qu'il savait qui j'étais, avec qui j'étais ici-même à Londres et qu'un tiers lui avait informé nos nombreuses démarches infructueuses dans l'optique d'en ressortir une entrevue. Son sourire rieur traduisait le détachement qu'il prenait face à la situation, assez ridicule, l'admettre en était une évidence : deux jeunes femmes remuant ciel et terre afin de rencontrer le rêve de l'une d'entre elle, sous le regard amusé de ledit rêve, qui était enfin devenu réaliste.

Dans l'état des plus cocasses des choses dans lesquelles nous étions plongés, nous nous esclaffâmes joyeusement un bref instant. Sentant la pression s'amoindrir alors, je pris la parole. Au fur et à mesure que mes mains gesticulaient dans l'espace qui nous séparait afin d'étayais mes arguments de mon discours improvisé, Robert Pattinson souriait ou hochait la tête, en signe de compréhension et d'approbation.

Invraisemblablement, il était d'accord par mon plan hasardeux.

C'est ainsi que, quelques minutes plus tard, complètement déconnectée de la réalité, je m'asseyais à ses cotés sur la banquette en cuir de sa voiture avec chauffeur.

Quand la berline se stoppa dans cette rue devenue familière de ce quartier de Londres, je descendis la première afin de pénétrer dans mon appartement. Je retrouva facilement Romane affalée dans un coussin, Netflix sur les genoux. Excitée par ce que j'avais entrepris, je lui fit un bref état des lieux, sans mentionner le fait que son Chéri D'amour l'attendait patiemment dans la voiture garé devant notre perron, afin de ne pas gâcher sa surprise.

Piquée ainsi par la curiosité, Romane se recoiffa machinalement et me suivît jusqu'à l'extérieur de notre loft. Au même instant, la portière s'ouvrit sur un séduisant et talentueux acteur américain. Tandis que je m'effaça sur le côté pour faire place à cette scène irréaliste, je vis ma Romi les yeux embuées de larmes de bonheur, un immense sourire collé à son visage, et des yeux transmettant milles émotions foudroyantes devant ce Robert Pattinson visiblement lui-aussi chamboulé.

Ainsi, je découvris, là, dans ce jardinet jouxtant notre appartement du centre de Londres, qu'un brillant acteur et qu'une somptueuse londonienne tombaient amoureux.

J'assistais impuissante et extasiée à un miracle extraordinaire.

J'assistais, comblée et ravie, à un coup de foudre enchanté.