CHAPITRE 8

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Plus tard dans la soirée.
Prison de l'Organisme.
[Point de vue : Typhen]

Je me réveille en sursaut, haletante.
Nom d'un chien, quelle heure est-il ?
Je n'en ai aucune idée, et ma vue est floue. Lentement, je porte ma main à mon front dégoulinant de sueur et me l'essuie.
Du plus loin que je me souvienne, c'est le cauchemar le plus effrayant que j'aie jamais fait. Mes pensées s'entrechoquent, mes émotions s'emmêlent. Je n'y comprends plus rien.
Qu'est-ce que c'était, au juste ? Je me suis vue, en miroir, les traits déformés, les yeux gorgés de sang, les vêtements déchirés, munie d'un couteau, semblable à celui avec lequel j'ai...

Bordel de merde.

La personne que j'ai vue dans ce miroir était un monstre. Mon regard dégageait une folie bestiale qui n'avait rien d'humain. Je transpirais la soif de vengeance, de sang, de chair.
Cela ne pouvait pas être moi. C'est tout bonnement impossible. Je dois me réveiller.
Je dois me réveiller de ce foutu cauchemar, une bonne fois pour toutes.

Et pourtant, quand je lève les yeux, ce n'est pas mon reflet que j'aperçois, mais un homme ; petits yeux gris en amande tachetés de brun, large cicatrice sur le visage, masque sur la bouche, piercings aux oreilles, cheveux teints. Je le reconnaîtrais entre mille, même avec une vision myope.
Si je me souviens bien, c'est lui, "Sly".

Les sourcils froncés, il me dévisage avec perplexité. C'est extrêmement gênant, d'autant plus que j'ai encore du mal à reprendre mon souffle.
J'ai un mouvement de recul. Sly, jusqu'à présent immobile devant moi, ouvre la bouche, et sa voix grave gronde dans les quatre coins de la prison :

- Non mais ça va pas ?! T'es folle de crier comme ça !"

Je frissonne, intimidée par la prestance de son personnage et recule contre le mur. Il me domine de toute sa hauteur, mais je refuse de me laisser faire. Il doit comprendre que la personne qu'il a face à lui n'est pas qu'une gamine de dix-sept ans. J'ai beaucoup plus de répondant qu'il ne le pense, et je veux lui montrer que ce n'est pas en grognant tel un animal enragé qu'il obtiendra ce qu'il attend de moi.

- Que... Qu'est-ce que vous foutez dans ma cellule ? "

Pas le moins du monde perturbé par le ton légèrement cassant de ma voix, Sly me regarde avec dédain, arque un sourcil, puis se concentre sur le bol en terre cuite rempli de bouillabaisse qu'il tient dans sa main.
Il le renverse, sous mes yeux.

- Oups, fait-il avec sarcasme, je crois que ça m'a glissé des mains."

Le masque noir qui recouvre sa bouche m'empêche de le voir, mais je mettrais ma main à couper qu'il sourit, fier de sa connerie.

- Si ça avait été un tant soi peu mangeable, j'aurais répondu, mais cette tambouille est tellement dégueulasse que je le prends comme un service rendu, lâché-je sur un ton condescendant.

- Toujours quelque chose à dire, hein ?"

Sly me foudroie du regard. Je le lui rends, ravie de l'avoir contrarié.

- Sortez, maintenant.

- Non, dit-il avec fermeté tout en s'agenouillant devant moi, avant, je veux savoir pourquoi tu t'es réveillée en hurlant comme une attardée mentale.

- Pardon ? M'étranglé-je, en quoi est-ce que ça vous regarde ? 

- J'attends.

- Non, sortez.

- Pas avant d'avoir obtenu ma réponse, insiste-t-il, sans bouger d'un pouce, et sans me quitter des yeux, je peux rester ici toute la nuit, s'il le faut."

Mad Seeds - RED (T1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant