Un jour infini

Prologue

-Dites-moi, Kotei... Il vous est déjà arrivé de penser à votre vie avant tout ça ?

-Sincèrement ? questionna le jeune homme en fixant ses mains.

Il leva lentement ses yeux gris vers son interlocuteur qui semblait perplexe face au simple mot qu'il venait de prononcer. Ses cheveux noirs commençaient à être long, si bien que certaines mèches masquaient son regard mystérieux. Il tira fermement sur la manche de sa veste avant finalement répondre.

-Pas le moins du monde.

-Cependant, n'est-il pas nécessaire de se tourner vers le passé pour aller de l'avant ?

-Croyez-vous vraiment que nous allons retrouver notre vie passée après tous ces événements. Nous avons grandi ensemble dans cette épreuve. Certains d'entre nous ont péris et nous sommes là à discuter si oui ou non le cours des choses reprendra son flux originel.

-Kotei. Je suis là pour vous aider. Vous étiez sur les premières lignes et beaucoup de vos connaissances sont... parties. Que ressentez-vous, en évoquant leurs noms ?

-Rien. Ne pensez-vous pas que le problème est là ? Qui ne vous dit pas que je suis un monstre depuis le début, que je ne suis pas celui que je prétends être ?

-Si c'était le cas, serions-nous là à débattre là-dessus ?

-Je vous l'accorde. Mais parfois, j'ai l'impression d'être la cause de ce désastre.

-Qu'est-ce qui vous fait penser ça ? interrogea l'homme en costume de l'autre côté du bureau.

Kotei resta un long moment muet à regarder le bureau en bois de la pièce. Son regard était indéchiffrable. On avait aucun mal à deviner qu'il passait en revue tous les événements qui lui était arrivé récemment. Ses yeux remontèrent finalement au niveau du torse de son interlocuteur, là où se trouvait un badge présentant le nom de ce dernier. James Kort, psychologue, journaliste. Il croisa ensuite le regard brun de ses yeux clairs. La communication semblait se faire dans un silence pesant, si bien que l'adulte détourna un instant son regard.

-Vous êtes journaliste, non ? C'est votre métier de lier les informations entre elles pour ainsi dévoiler une vérité au monde.

-Une vérité ? répéta James Kort.

Kotei quitta sa chaise, un sourire au coin de ses fines lèvres.

-Oui, une vérité. Faut-il maintenant savoir si elle est celle qu'on peut appeler la vérité. Mais dites-vous bien une chose. Selon moi, ceci n'était que le début.

-Que voulez-vous dire ?

Le jeune homme rajusta sa veste avant de saisir un long sac noir en bandoulière. Il salua poliment le maître du bureau avant de pivoter en direction de la porte.