Qu'est-ce qu'il fait là ?! Il est censé être à l'infirmerie !
- Kyllian ? j'appelle tout bas.
Instinctivement, j'active mon Feu et améliore légèrement ma vision nocturne. Ce n'est pas aussi efficace que d'être dans une pièce éclairée, mais ça suffit. Ce ne serait pas raisonnable de l'épuiser en cherchant à voir encore mieux.
La pièce est meublée, on dirait simplement une grande chambre sous les toits. Il y a de nombreux livres et objets sur des étagères ou aux murs. Quelques meubles.
Pas de trace de Harou, je me demande si je n'ai pas tout imaginé... mais les cris de Kyllian, eux, sont bien réels.
Il est immobile, le corps recouvert de bandages et pansements qu'on a dû lui appliquer dès son arrivée.
Je ne sais pas si c'est le fait que ma vision nocturne soit faible, ou un effet du médicament, mais je le trouve un peu différent de d'habitude.
Oui, c'est bien lui, mais... sa peau me paraît bien plus pâle et presque bleutée, ses cheveux à la fois plus sombres et plus chatoyants que d'habitude.
Ses traits me paraissent également - si c'est possible - mieux dessinés, plus effilés...
Ses yeux sont clos, ses traits plissés, ses lèvres tordues dans une plainte déchirante. Sa main droite repose sur sa poitrine, qui s'abaisse et se soulève imperceptiblement. L'autre est étendue le long de son corps, faiblement accrochée aux draps du lit.
Est-ce normal qu'il soit ici, seul, sans surveillance ? Ne devrais-je pas aller chercher un adulte ?
Oui. Je devrais. Mais je ne peux m'empêcher, à la place, d'avancer jusqu'à lui. Ses cris de détresse me font trop mal. L'imaginer seul, ici, à appeler en vain, me noue le ventre.
Lorsque je m'agenouille sur le tapis pour poser ma main fraîche sur son front fiévreux, il entrouvre péniblement ses paupières.
Je suis alors aussi rassurée que surprise de voir son Feu briller dans ses yeux, faiblement. Il est d'une étrange couleur givrée. Habituellement, il est bleu vif. C'est peut-être encore mon médicament qui modifie mes perceptions ?
Kyllian tourne la tête vers moi. Ses yeux m'observent comme s'ils ne me reconnaissaient pas. Ce qui n'est pas franchement étonnant.
- Je suis une amie d'Ambre..., je précise donc tristement. Je peux t'aider ? Est-ce que je dois aller chercher quelqu'un ?
Il déglutit sans rien parvenir à articuler d'autre qu'un geignement meurtri qui me fend le cœur.
- Bon, je vais chercher quelqu'un, ne t'inquiète pas ! je décide alors.
Je n'ai pas le temps de me relever que, du bout des doigts, il agrippe le tissu de ma jupe pour me retenir.
- Oui ? Qu'est-ce qu'il y a ? Dis-moi ce que je dois faire..., je l'implore d'une voix inquiète.
Il prend une grande inspiration sifflante, visiblement pénible, puis souffle d'une voix à peine intelligible :
- Libheìr... shaeris... duillanen...
- Je ne comprends pas ce que tu dis, je grimace alors avec embarras.
Je me penche, approchant mon oreille de ses lèvres pour mieux entendre. Avec le peu de forces qui lui reste, sa main droite se lève alors pour venir saisir mon menton entre ses doigts.
Fronçant les sourcils, confuse, je tourne instinctivement mon visage vers lui. Nous nous faisons face un bref instant, puis ses lèvres se posent sur les miennes, sans prévenir. C'est un ultime effort qui lui arrache une plainte sourde.
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Oeris - Liés par le Feu
Fantasy« C'était tout ce dont j'avais toujours rêvé. Le problème ? Ce que j'avais pris pour un rêve était en réalité un cauchemar. » ** Ever a toujours observé avec envie les Protecteurs : ces mages-combattants les plus puissants, chargés de combattre les...