UN JEUDI APRÈS-MIDI. Rien que ces trois mots ne présagent rien de bon. Qui a déjà entendu parlé d'un jeudi de cours agréable ? Edward est convaincu que c'est un mythe. Et il n'a peut-être pas tord, encore moins après avoir survécu à un contrôle de maths, une interro surprise par la prof de svt et deux heures de français avec des personnes mâchant bruyamment leur chewing-gum, d'autres qui s'amusent à toquer sous les tables comme pour imiter quelqu'un toquant à la porte, ou bien encore d'autres lançant des projectiles à travers la classe.
Edward, lui, avait une énorme envie de mourir en se pendant au bout d'une corde avant que la fin de la dernière heure de français sonna. Bien sûr, cette très chère professeure de français, aussi agréable soit-elle, retenu Edward à la fin du cours, Edward qui soupira bruyamment à l'appel de sa prof.
Celle-ci était petite, brune et avait une peau de couleur chocolat semblant aussi douce que celle d'un enfant. Elle avait également des yeux noirs en amande et portait toujours des énormes créoles à ses oreilles. Elle se nommait Madame Garance.
— Edward, tes notes ont étrangement baissées. Qu'est-ce qui ne va pas ?
Qu'est-ce qui ne va pas ? Ce qui ne va pas, c'est que je suis entouré d'idiots cinq jours sur sept par semaine, que le peu de fois où j'essaie d'apprendre à les supporter, quelqu'un finit toujours par m'agacer au point où je l'insulte d'un nom peu flatteur et part les mains dans les poches, les yeux à moitié fermés. Ce qui ne va pas, c'est que les gens existent putain. Les gens ne peuvent pas nous rendre heureux, les gens font souffrir.
— Rien, tout va bien.
Un silence s'installa entre la professeure et son élève, avant que la trentenaire ne passe derrière son bureau et commence à fouiller dans sa paperasse. Elle ressort alors un carnet et une feuille avec quelques phrase dessus.
— C'est un travail que je ne donne qu'à certains élèves. Je suis sûre qu'il pourrait te plaire.
— Ah oui, c'est vrai que du travail en plus, j'adore. ironisa le garçon aux joues roses.
Il attrapa la feuille dans un soupir et la passa en revue de haut en bas. La consigne est d'écrire un peu chaque jour ses sentiments, ses ressentis, ses propos. L'idée est d'extérioriser ses sentiments.
— En gros c'est un journal ?
— Si l'on veut, oui. Fais-en quelque chose de personnel. Je le reprendrais à la fin de l'année si tu as envie de me partager ton travail.
Edward hocha la tête et partit d'un pas rapide, une énorme envie de retrouver son lit lui trottant dans la tête. Un travail en plus, et puis quoi encore ? Pour quelle raison Edward avait-il accepté ? Il n'en savait rien, lui non plus. Il n'était même pas sûr d'écrire quoique ce soit là-dedans. Le journal allait sûrement trainé pendant tout le mois d'octobre sous son lit.
En entrant dans son dortoir, Milo avait mit le son de son téléphone à fond dans la chambre, avec comme son "Life is beautiful" de Lil Peep résonnant.
Par la fenêtre, des cordes de pluie tombaient du ciel, atterrissant ou sur le goudron, ou sur les arbres, ou même sur les élèves rentrant de leur cours d'eps leur ayant prit deux magnifiques heures de cette courte -ou longue en l'occurence- journée.
— C'est quoi ça ? demanda Milo en voyant Edward jeté son journal sur son lit.
Edward n'entendait rien à cause du son beaucoup trop fort que Milo avait prit grand soin de mettre aussi fort de sorte à faire chier les chambres d'à côté, les chambres d'à côté occupées par des garçons écoutant du rap français aux paroles trouvés sous la douche ou à l'anniversaire de leur p'tit frère, ou bien encore quand leur oncle bourré leur a raconté cette fois où il a pécho une mineure dans les toilettes d'un hôtel une étoile.
Milo cria à nouveau sa question et Edward comprit enfin à peu près ce que son camarade voulait lui dire.
— Un travail. Madame Garance me l'a donné parce qu'apparemment mes notes baissaient, ou alors j'en ai la capacité, j'ai pas trop compris en fait.
Milo rit. Milo a un rire assez aiguë mais qui détend toujours l'atmosphère, puisqu'il est vraiment très contagieux. Mais vraiment, très contagieux.
Milo lança alors un stylo à Edward tout en baissant le son de son téléphone, laissant toujours un fond de musique.
— Au boulot flemmard.
Milo monta dans son lit et tourna le dos à Edward, qui avait laissé une lampe allumée.
Edward soupira, à la recherche d'inspiration. Il ne voulait pas écrire quelque chose à la va-vite, parce que malgré qu'il ne voulait pas réaliser ce travail, il ne voulait pas le bâcler.
"C'est parti..." pensa Edward en posant la mine de son stylo noir sur la première page du cahier. Il commença à former un mot, puis un deuxième, suivit d'un troisième et ainsi de suite, jusqu'à avoir sa première phrase.
"Alors, un travail supplémentaire, hein ? Bah putain... C'est cool ça, merci, Madame."
Edward haussa les épaules et continua son premier texte, toujours les musiques de Lil Peep résonnant dans son dortoir.
"Pour être honnête, j'ai pas vraiment compris le principe de ce devoir, alors j'vais juste écrire c'qui me passe par la tête, avec sûrement des rimes, des phrases pas forcément connes mais pas forcément intelligentes non plus, et p'têtre même des moments de joie. On verra bien. Bref, prenez ça comme une introduction, car aujourd'hui j'ai rien de bien intéressant à raconter, alors j'vais juste me présenter :
J'm'appelle Edward, j'ai dix-sept ans, des joues roses et des cheveux bruns. J'suis pas forcément intéressant, ma vie est pas vraiment folle, j'suis juste un gars basique de dix-sept qui croit que quelqu'un s'intéresse à lui. J'ai aucun projet d'avenir, mais j'sais une chose c'est que j'ai pas envie de finir derrière un bureau avec une tonne de papiers, ou à faire classe à des adolescents aussi ingrats que notre génération. Bref, j'vais pas parlé de moi pendant quatre ans, j'vais sûrement aller dormir. Sur ce bonne nuit, et à demain, peut-être."Edward ferma le cahier, suivit de ses yeux, et s'endormit assez rapidement, toujours avec une chanson de Lil Peep dans le dortoir, avec cette même playlist que jouera jusqu'au lendemain.
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edward
Teen Fictionparce qu'edward, c'est danser sous les étoiles une bouteille à la main