Prologue

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Danaé...








–– J’aimerais dire un grand merci à vous tous ici présents. Merci pour tout l’amour et le soutien. C’est un travail d’équipe, c’est l’amour de chacun de vous qui m’a portée jusqu’ici. Ce sont les espoirs et les rêves, le travail acharné et la foi. Alors à vous qui me soutenez chaque jour, continuez de rêver. Merci de partager ce rêve avec moi. Je vous aime très fort. J’adore Denver !

Les cris de la foule redoublent, les spots s’intensifient et la fumée envahie la scène derrière laquelle mon image en gros plan continue de se mouvoir, tandis que mon authentique silhouette disparaît progressivement, en s’enfoncer dans le sol. Les joies de la technologie en somme.

Essoufflée, je retire les appareils auditifs une fois dans les coulisses et les remets au technicien qui attendait déjà mon arrivée. Je reçois avec gratitude la serviette que me tend Okodi, mon assistante et m’éponge le visage, tout en m’élançant dans le couloir à ses côtés. Ma bouche entrouverte pour laisser entrer et sortir le plus d’air possible s’élargit vite en sourire lorsque je rejoins les membres les plus familiers de mon équipe. Plus un sourire de circonstance en réalité, pourtant il semble si vrai que certains jours que je m’y perds moi-même.

Tyler mon manager m’octroie un clin d’œil appréciateur en serrant ma main dans la sienne, Rayonda ma productrice me claque dans la main, puis dans le dos et Tara la directrice artistique de mon label me fait une révérence théâtrale, sourire aux lèvres. Ils ont beau être des gens bien, faits de sang et de chair, ils en ont surtout pour leur argent et moi, voilà bientôt cinq ans que je règne en maîtresse incontestée de la Pop culture, avec près de deux cents récompenses culturelles accumulées en six années à peine. En d’autres termes, je suis la poule aux œufs qu’ils ont judicieusement choisi de nourrir. De toute façon dans ce milieu, tu ne te fais pas nourrir si tu n’es pas en même de pondre au minimum, le quadruple de ce qu’on te donne alors…


–– Quelle énergie ! s’extasie Paul, propriétaire de plusieurs radio et ami de Tyler.


–– Danaé est une bête, psalmodie son acolyte.


–– C’est fou comme à chaque fois je me dis, ça c’était le plus beau show que j’aie jamais vu. Beau travail, minaude Tara réellement bluffée, le sourire dans sa voix.


Si je pouvais leur répondre, je leur dirais que j’ai une famille modèle pour qui l’excellence est un style de vie. Comme a l’habitude de dire Dwight, beaucoup n’est jamais assez. Et à un moment, j’en ai eu marre de ne pas être assez, d’être le vilain petit canard, mais ça je ne peux le dire. La version officielle est donc…


–– C’est grâce à vous. Merci, souris-je les mains jointes de façon pieuse, en prenant bien soin d’éviter le regard lubrique de Paul, cette queue ambulante.


–– C’est à toi dans dix minutes Danaé, m’informe Rayonda. La journaliste est déjà installée.


Le pouce en l’air, je le rassure, m’excuse auprès de mes supérieurs, puis poursuis vers la petite populace qui monte généralement avec moi sur la scène, mes musiciens et danseuses. Je prends la peine d’embrasser tout le monde, profondément reconnaissante du travail qu’ils abattent à mes côtés. Parce qu’au risque de fâcher certains, nous la masse ouvrière, sommes bien ceux par qui cette industrie continue d’être aussi prospère, bien que moins payés par la plupart de ces bureaucrates qui ne connaissent de la musique et du cinéma que l’argent qu’ils engrangent.
Comme à l’accoutumée, Nass, fidèle disciple de Bob Marley et batteur de génie balance un flow religieux mais œcuménique, que je subis à chaque fois, n’étant chrétienne que de nom. Parce que contrairement à mes frères qui ne le sont pas vraiment, ma mère biologique ––cette conne–– m’a fait baptiser avant de remettre ma vie entre les mains du sort.

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